POLITIQUE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR

Enseignement supérieur : que peut faire Benoît Hamon ?

« L’ancien leader étudiant contre la loi Devaquet en 1986 devient le patron des profs », résume Le Monde. Un beau paradoxe que Marie-Sandrine Sgherri décrit ainsi dans Le Point : « Son seul fait d’armes [pour l’enseignement supérieur] est d’avoir commencé en politique comme étudiant et en manifestant contre la loi Devaquet de 1986, qui entendait instaurer l’autonomie des universités. Question de génération : ces vastes cortèges ont fait perdre 20 ans à l’université ». Mais beaucoup d’eau a coulé depuis sous les ponts et l’autonomie des universités devenue – plus ou moins – une réalité.

La passation de pouvoir du 2 avril

Un choix très politique

Si on avait évoqué d’autres noms ces dernières semaines, la nomination de Benoît Hamon à l’Education nationale est tout sauf une surprise et on en parlait déjà fin 2013 quand on apprenait que Vincent Peillon allait se présenter aux élections européennes. « Force est de constater que les considérations qui ont doté Benoît Hamon de son portefeuille de ministre relèvent plus de la stratégie d’appareil (offrir une place de choix à la gauche du PS pour contrebalancer l’image droitière du nouveau premier ministre) que d’une réelle vocation », explique Arnaud Gonzague dans Le Nouvel Obs.

Un certain intérêt pour l’enseignement supérieur

Rencontres Universités entreprise 2013. Jean-Loup Salzmann, le patron de la Conférence des présidents d’université, me présente un invité un peu inattendu : Benoît Hamon, ministre délégué à l’Économie sociale et solidaire et à la Consommation, venu donner une conférence intitulée « Les universités ont elles un rôle particulier à jouer dans le rayonnement de l’économie sociale et solidaire? » et remettre un prix AEF valorisant les initiatives exemplaires de collaboration entre universités et entreprises. Très intéressé par les explications de Jean-Loup Salzmann sur l’autonomie des universités on le voit sur une photo en pleine discussion avec Jean-Luc Vayssière, le président d’une université Versailles Saint-Quentin pas encore dans la tourmente.

Geneviève Fioraso secrétaire d’État ?

Benoît Hamon se retrouve aujourd’hui à la tête du grand ministère chapeautant toutes les questions d’éducation dont rêvait Vincent Peillon. Pour autant, il devrait se concentrer sur la question des enseignants du primaire et du secondaire et nommer la semaine prochaine un secrétaire d’État chargé plus précisément de l’enseignement supérieur et, plus encore, de la recherche. Benoît Hamon n’a en effet jamais marqué un intérêt particulier pour la recherche et l’entrepreneuriat, contrairement à  Geneviève Fioraso. Depuis qu’il a conclu son discours de passation de pouvoir avec Geneviève Fioraso d’un « à bientôt », beaucoup imaginent même qu’elle pourrait bien être ce secrétaire d’Etat. Pour autant, l’hypothèse Isabelle This Saint-Jean, vice présidente chargée de l’enseignement supérieur et de la recherche à la région Ile-de-France et proche des enseignants-chercheurs les plus en pointe, tient encore la route.

Beaucoup d’attentes, peu d’espoirs

Dans l’enseignement supérieur comme partout on attend de la nouvelle équipe qu’elle infléchisse certains choix. D’un côté les universités espèrent plus de moyens – sans trop y croire -, de l’autre les grandes écoles souhaitent plus de reconnaissance, sans trop parier qu’elles seront entendues. La Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (Cdefi) a ainsi tenu « à exprimer sa préoccupation quant à la méthode mise en œuvre pour l’application de la loi Fioraso ». Enfin l’Unef demande que Benoit Hamon s’attaque aux « tabous qui provoquent l’échec des étudiants » et estime que « les difficultés des étudiants sont aggravées par l’autonomie des établissements, qui font plus souvent le choix de l’élitisme que de la démocratisation ».

Tous souhaitaient en tout cas qu’on conserve bien un ministère comprenant l’Enseignement supérieur et la Recherche. Même si beaucoup auraient préféré un ministère à part, la nomination de Benoît Hamon à un grand ministère comprenant aussi bien l’Education nationale que l’enseignement supérieur et la recherche devrait les rassurer.

  • Lire aussi L’éducation, un « short » ministériel taille XL pour Benoît Hamon sur Le Monde, les articles d’Educpros et du Figaro.
  • D’André Bouloche à Vincent Peillon et Geneviève Fioraso, la liste complète des 29 ministres de l’Education nationale (Benoît Hamon est le 30ème) et de l’enseignement supérieur est consultable sur le site education.gouv.fr
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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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