En 2014-2015 naissent d’immenses universités qui ont depuis connu des fortunes diverses
En ce début d’une année 2024-2025 qui s’annonce particulièrement tendue dans l’enseignement supérieur faisons un retour de dix ans en arrière. Souvenons-nous : ce ces années universitaires qui ont été cruciales pour tous les acteurs de l’enseignement supérieur avec la mise en place des Comue.
Bye bye les PRES voilà les Comue. Et le moins que l’on puisse dire est que la constitution des nouvelles Comue a permis aux acteurs de l’enseignement supérieur de faire preuve de créativité. D’un côté d’immenses ensemble (Bretagne-Pays de la Loire ou Lyon) de l’autre de petites Comue comme Paris Sciences et Lettres ou Bourgogne Franche Comté. Face à face modèles « fédérateurs » accueillant tous les acteurs locaux, universités comme grandes écoles de tous statuts (Paris-Saclay ou Université fédérale de Toulouse) et « exclusifs » n’accueillant comme membres fondateurs que les établissements sous tutelle du MESR (Lille ou Bordeaux). Partout des ambitions cachées, des craintes inavouées, des personnels inquiets… Le titre du congrès 2014 de la Conférence des Grandes écoles (CGE) est explicite : « Regroupements de site : à la recherche d’un équilibre entre uniformité et diversité ».
Où va l’École polytechnique ? Où va Paris-Saclay ? Les débats ont été houleux mais ont accouché en décembre 2015 d’un projet de scission entre l’École polytechnique et Paris-Saclay. Et d’un symbole : trois ministres et secrétaire d’État, Jean-Yves Le Drian (Défense et tutelle de l’école), Emmanuel Macron (Économie) et Thierry Mandon (Enseignement supérieur et Recherche) s’étaient déplacés à l’École polytechnique pour le présenter. Les écoles de Paris-Saclay (X, CentraleSupélec, Ensta ParisTech, Agro ParisTech, Télécom ParisTech, Télécom Sud Paris, Ensae ParisTech, l’Institut d’optique, ENS Cachan) mais aussi proches (Mines ParisTech et Ponts ParisTech) voire plus lointaines (Isae, Ensta Bretagne et Télécom Bretagne) avaient maintenant jusqu’au 15 mars pour rendre un « schéma précis sur leur travail commun en matière de formation, recherche, international et entrepreneuriat » qui débouchera sur une scission et la création de l’IP Paris.
De quoi « Paris Saclay » est-il le nom ? Au début il y avait l’université Paris Sud Orsay, l’École polytechnique, l’ENS Cachan ou encore HEC puis est arrivée l’université Versailles Saint-Quentin et l’université d’Évry Val d’Essonne en tant que membre associé. Certes ces deux universités possèdent de bonnes facultés – notamment en médecine pour l’UVSQ – mais force est d’admettre qu’on parle plus souvent d’elles pour leurs difficultés financières que leur excellence dans la recherche. En deux ans, le projet initial d’une université Paris Saclay, chantre de l’« excellence à la française », semble donc s’être peu à peu transformé en projet d’aménagement territorial.
La création du Hcéres. Début 2014, la publication sur le site du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche du rapport rendu fin décembre 2013 par Denis Pumain et Frédéric Dardel sur l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur marquait l’entrée dans la dernière étape du processus de passage de l’Aeres au Hcéres (Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur). Vilipendée, accusée de tous les maux, bouc émissaire idéal d’un monde de l’enseignement supérieur et de la recherche en mal de repères, l’Aeres n’aura donc vécu que sept ans. Et parce que décidément le gouvernement aime les commissions, Sophie Béjean et Bertrand Monthubert se sont vu confier fin 2013 une mission de concertation sur la stratégie nationale de l’enseignement supérieur (la «StraNES») qui a livré résultats au printemps 2014.
Un nouveau statut pour les écoles consulaires. Face à la baisse programmée des moyens des CCI dont la plupart continuent plus ou moins à dépendre, les écoles de management doivent brutalement repenser leur modèle économique. S’y ajoute une réforme de la taxe d’apprentissage qui devrait encore les fragiliser. Trouver de nouveaux moyens grâce à la montée en puissance de leurs fondations et de la formation continue devient urgent. C’est dans ce cadre que le nouveau statut des écoles de management consulaires, les EESC (établissements d’enseignement supérieur consulaires), a été adopté fin décembre 2014.
Passion MOOC. En 2014 était lancée la plateforme française de MOOCs France université numérique. Un accomplissement pour ceux qui ont été les pionniers des MOOCs tout au long de 2013 et notamment dans la formation continue. Si les MOOCs s’adressent à tous, le succès du MOOC « Gestion de projet » de Rémi Bachelet l’avait d’abord démontré, celui du MOOC « Du manager au leader » du Cnam (14 000 inscrits sur FUN) le démontre, ce sont d’abord les professionnels en activité qui s’inscrivent aujourd’hui.
Dure année pour les bac+5. Les conclusions de l’enquête annuelle de l’Apec sur l’emploi des jeunes furent particulièrement inquiétantes en 2015. Ainsi seulement 62 % des jeunes diplômés de niveau bac +5 et plus de la promotion 2014 sont en poste moins d’un an après l’obtention de leur diplôme. C’est encore un recul de 1 point par rapport à la promotion précédente et de 10 points par rapport à 2010. En tout 28 % de l’ensemble des jeunes diplômés 2014 sont encore à la recherche d’un premier emploi moins d’un an après l’obtention de leur diplôme. Et ceux qui ont un emploi sont plus précaires : la part des CDI, même si elle reste majoritaire (50%), est en baisse de 9 points, alors que celle des CDD a augmenté d’autant à 43 %. Le statut de cadre (57 %) est en baisse est de 5 points par rapport à la promotion précédente.
Des stagiaires mieux protégés. L’Assemblée nationale a voté en 2014 un encadrement accru des stages. À côté des dispositions qu’on connaissait déjà, notamment sur la limitation du nombre de stagiaires dans les entreprises ou la durée des stages, ont été votés plusieurs nouveaux amendements qui prévoient notamment que la gratification, qui reste seulement obligatoire pour les seuls stages de plus deux mois, sera due dès le premier jour.
L’année des logos. En quelques mois on a vu fleurir en 2014-2015 les nouveaux logos (École polytechnique, Grenoble EM, université de Bordeaux, IAE France etc.) au fronton des établissements d’enseignement supérieur à un rythme inégalé. Des créations qui en annoncent beaucoup d’autres en cette année de fusions et de créations de Comue. Mais un logo ce n’est pas qu’une image, c’est aussi l’occasion de délivrer des messages et, pour les IAE, de changer même de nom en devenant des « écoles universitaires de management ».
- Et encore… La CTI fête ses 80 ans. Fondée en 1934, la Commission des titres d’ingénieur (CTI) fêtait en 2014 ses 80 ans. Umultirank voit le jour. Le très attendu classement Umultirank promu par la Commission européenne pour concurrencer ceux de Shangaï ou du Times Higher Education a été mis en ligne en mai 2014.