Les projets proposés dans le cadre des Idex comme la réforme du collège en sont imprégnées, interdisciplinarité et pluridisciplinarité sont aujourd’hui plébiscitées par les universitaires. « L’interdisciplinarité favorise l’imprévu, l’innovant, la sérendipité », assurait ainsi Michel Serres lors de l’inauguration (voir la vidéo) du centre qui porte son nom. Petit état des lieux.
Croiser les disciplines pour mieux innover
« Les grandes questions que se pose aujourd’hui l’humanité sont très complexes et ne peuvent être correctement traitées qui si on mêle les disciplines et les compétences. L’excellence, c’est connaître les limites de sa discipline », confie Olivier Laboux, président de l’université de Nantes dont le projet d’Idex (porté par toute le Comue Université Bretagne Loire) s’intitule La transdisciplinarité au service de la société. La transdisciplinarité c’est demander aux chercheurs de passer les frontières de leur discipline pour travailler sur un enjeu sociétal majeur. La transition numérique n’est pas que technologique : elle impacte les usages, les comportements, l’industrie… « Aucun problème n’est aujourd’hui seulement traitable par une seule spécialité. L’écologie c’est aussi bien de physique que de la biologie, de la sociologie ou du droit. L’université meurt d’être trop analytique et pas assez ouverte sur les autres disciplines », assure Michel Serres. « L’Université du 21ième siècle, est globale, elle décloisonne, elle est systématiquement internationale, la recherche et la formation questionnent les grands enjeux sociétaux, et l’ancrage avec le territoire est déterminant », conclut Olivier Laboux.
Il faut décloisonner !
Mais comment passe-t-on d’un système « tubulaire » à une organisation horizontale interdisciplinaire ? L’université de Caen s’est appliquée à répondre à la question en créant par exemple un master de Valorisation des innovations biologiques qui réunit des enseignants de biologie et des juristes autour de la question de la valorisation de la recherche. Elle veut aller plus loin comme l’explique son président, Pierre Sineux : « Nous regroupons nos composantes. Par exemple, les UFR de géographie et de sciences économiques vont fusionner en septembre 2015 pour devenir une seule UFR avec des projets communs. De la même façon nous créons une composante Humanités et Sciences sociales, et rapprochons nos facultés de médecine et de pharmacie, Sciences et Biologie tandis que les IUT, l’école d’ingénieurs interne et l’IAE travaillent en commun sur la formation professionnelle. Il faut décloisonner ! »
Au-delà d’universités, qui trouvent dans l’interdisciplinarité une raison d’être des Comue, toutes sortes de rapprochement se font entre les grandes écoles. « Nous ne sommes plus seulement une école de management ! » peut ainsi proclamer Frank Vidal, le directeur général d’Audencia, après son rapprochement avec l’École Centrale et l’Ecole d’architecture de Nantes dans L’Alliance Centrale Audencia ensa Nantes : « Avec 150 doubles diplômés chaque année, nous avons aujourd’hui un savoir-faire sans équivalent dans la formation des ingénieurs-managers et nous pensons maintenant à créer des bachelors hybrides ».
Relais de croissance
En permettant l’éclosion de nouvelles formes pédagogiques comme celle que porte le Centre Michel Serres, l’interdisciplinarité ouvre aussi la porte à toute une nouvelle gamme de formations. « Tout le monde se demande aujourd’hui comment surmonter les défis de l’hybridation et de la transdisciplinarité et nous avons justement la chance de posséder trois écoles très complémentaires », expliquent Pascal Brouaye et Nelly Rouyrès, président et vice-présidente du pôle universitaire Léonard de Vinci, dont deux des écoles, une de commerce l’autre de l’Internet, l’EMLV et l’IIM, s’associent pour lancer un diplôme commun.
Ces dernières années on a ainsi vu naître une école généraliste de l’Internet, la Web School Factory, fondée sur les compétences croisées de trois écoles du groupe Studialis (Hétic, l’ESG et Strate école de Design), le programme d’innovation et de design I.D.E.A du rapprochement entre Centrale Lyon et l’EMLyon alors qu’Artem va enfin entrer en vitesse de croisière avec l’implantation de l’ICN sur un campus tout proche de celui de l’École des Mines de Nancy, l’un de ses deux partenaires avec l’École nationale supérieure d’art de la ville. Ingénieurs managers, managers ingénieurs, juristes managers, designers ingénieurs, médecins managers, diplômés de sciences humaines web designers… la carte de l’interdisciplinarité et de l’hybridation des savoirs est sans limite !