Antonin Ricard, directeur de l’IAE Aix-Marseille
Alors qu’il vient d’être réaccrédité Equis pour 5 ans, l’IAE Aix-Marseille se concentre de plus en plus sur la dimension environnementale de ses enseignements. Son directeur, Antonin Ricard, revient avec nous sur la stratégie de son IAE.
Olivier Rollot : L’IAE d’Aix-Marseille a décidé de s’engager particulièrement dans la lutte pour le climat. Expliquez-nous comment.
Antonin Ricard : Nous disposons d’une liberté financière qui nous permet d’être au plus proche des étudiants et des enseignants-chercheurs nous avons décidé de nous rapprocher du concept de caring school, une école attentionnée envers son environnement. C’est dans ce contexte que nous agissons.
En 2021 la Convention des entreprises pour le climat a réuni 150 entreprises qui ont rédigé une feuille de route pour passer de l’économie de l’extraction à celle de la régénération. Il ne s’agit pas seulement d’avoir un impact faible sur le climat. Pendant un an, nous avons donc travaillé avec notre écosystème pour bien prendre conscience de l’enjeu et réfléchir aux éléments du modèle à mettre en œuvre.
Notre levier principal, ce sont les étudiants que nous allons former pour travailler dans les entreprises avec une approche très profonde des enjeux. Cela a un impact fondamental sur nos programmes avec une nouvelle ligne de lecture de la dimension systémique du changement, qui nécessite d’interconnecter les disciplines.
Il faut bien faire comprendre par exemple qu’utiliser une nouvelle machine qui consommerait moins de terres rares mais plus de matières polluantes et non recyclables crée de nouveaux problèmes. Il nous faut repenser toutes les chaines d’approvisionnement !
C’est dans ce contexte que les apprenants doivent faire partie de l’expérience d’apprentissage pour être au cœur des problématiques.
O. R : Pouvez-vous nous faire un portrait rapide de l’IAE Aix-Marseille.
A. R : L’IAE Aix-Marseille compte 40 professeurs permanents et reçoit 850 étudiants, essentiellement en master avec de petits effectifs – 20 étudiants – en licence 3 avec un rôle d’ascenseur social. La question de créer un jour une licence complète se pose parfois mais pour l’instant nous préférons nous concentrer sur les années de master pour être au plus proche de nos étudiants. 15% d’entre eux suivent leur cursus en Executive Education, notamment grâce à une approche par blocs de connaissances et de compétences (BCC) sera opérationnelle dès septembre 2024.
O. R : Envisagez-vous d’accroitre vos effectifs dans les années à venir ?
A. R : Nous nous situons plutôt dans un objectif de stabilité, voire de très légère augmentation de nos effectifs pour toujours sélectionner les meilleurs étudiants.
O. R : Est-il possible de suivre son cursus en apprentissage ?
A. R : C’est même le cas de 80% de nos étudiants ! Et nous tenons à ce qu’ils viennent le plus souvent possible sur le campus pour renforcer l’attachement à leur institution. Nous sommes donc passés à un rythme 3 semaines en entreprise / 1 semaine à l’IAE. L’obligation pour certains d’avoir un double logement n’est pas un facteur important de désistement. Jusqu’à présent nous ne demandions pas de reste à charge aux entreprises mais c’est le cas depuis la prochaine rentrée pour passer un cap supplémentaire et garder notre rang de leader en termes de retour sur investissement.
O. R : L’IAE Aix-Marseille vient d’être réaccrédité EQUIS pour 5 ans. Qu’est-ce que cela signifie pour vous ? Et à l’avenir, pourriez-vous recherche une autre accréditation internationale ?
A. R : Nous sommes accrédités EQUIS depuis 1999 et, jusqu’à l’année dernière, le seul IAE à l’être. Cela nous permet de nous comparer au niveau international et de valoriser le modèle IAE en étant classés. Dans le classement des masters in management du Financial Times nous nous classons ainsi dans le top 15 (14ème) du meilleur retour sur investissement et à la première place en France.
Pour ce qui est d’une autre accréditation internationale nous regardons du côté de l’AACSB (Association to Advance Collegiate Schools of Business) qui pourrait nous permettre de compléter certains critères qu’EQUIS évalue.
O. R : Et dans ce contexte quels sont vos concurrents ? Des écoles de management françaises ?
A. R : Le benchmark stratégique que nous avons effectué dans le cadre de notre réaccréditation Equis montre que nous correspondons plutôt à des écoles du nord de l’Europe comme Lund ou SSE Stockholm qui sont de taille similaire et ont la même capacité que nous à être proches de leurs étudiants. Nous sommes dans une approche fondée sur la légitimité plutôt que sur une approche volumique. Une approche dont nous sommes fiers.
O. R : L’IAE Aix-Marseille délivre un doctorat en propre. Quelle importance revêt-il ?
A. R : Après la création des IAE en 1955 par un professeur d’Aix-Marseille il s’est avéré assez rapidement légitime que l’IAE Aix-Marseille soir le premier à proposer un cadre de recherche en gestion. Aujourd’hui le Cergam (Centre d’études et de recherche en gestion d’Aix-Marseille) est le premier ou le deuxième centre de recherche, au coude à coude avec Paris-Dauphine, avec 80 doctorants et 20 soutenances par an.
O. R : Pourriez-vous créer un DBA (Doctorate of Business Administration) comme justement à Paris-Dauphine ?
A. R : Nous avons fait le choix de développer plutôt un PhD cette année. C’est-à-dire un programme beaucoup plus tourné vers l’international que le DBA avec un séjour à l’étranger et un jury international. Il est difficile de garantir la qualité d’un DBA avec des participants qui travaillent en entreprise.
O. R : Quelles sont vos relations avec Aix-Marseille Université ? On sait que les IAE se plaignent régulièrement d’être peu considérés par leur université.
A. R : Cela se passe extrêmement bien avec un président qui est aussi un ancien vice-président innovation et qui comprend bien l’intérêt d’avoir une recherche utile aux entreprises. L’IAE Aix-Marseille est une marque d’excellence au sein de l’université qui nous rend légitime dans la collaboration avec les autres disciplines. C’est une véritable force pour nous !