POLITIQUE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR

Un budget de l’ESR 2025 « contraint » mais « préservé ». Quoique…

Dans un cadre budgétaire « contraint » selon les mots même du MESR, le projet de loi de finances 2025 pour l’enseignement supérieur et la recherche « répond à la double exigence de préparer l’avenir tout en contribuant à la maîtrise des finances publiques. Le projet de loi de finances 2025 ne remet pas en cause nos priorités : nous continuons à mettre en œuvre le cœur de la loi de programmation de la recherche, avec un budget en hausse pour l’année à venir », établit Patrick Hetzel, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en présentant un budget largement inspiré des lettres plafonds envoyées il y a quelques semaines par Gabriel Attal. La recherche y est la grande sacrifiée puisque seulement un tiers des montants prévus pour la Loi de programmation de la recherche (LPR) est financé sur un budget initial de 500 M€ pour 2025. Les établissements d’enseignement supérieur attendent maintenant encore les arbitrages sur le financement de l’apprentissage.

26,8 milliards d’euros. Le budget du MESR s’élèvera en 2025 à 26,8 milliards d’euros, soit une augmentation de 89 millions d’euros par rapport au budget initial de 2024, qui « préserve le financement de ses priorités tout en contribuant aux efforts demandés à l’ensemble des ministères pour ramener le déficit à 5 % en 2025, puis sous le seuil des 3 % d’ici 2029 » explique-t-on au MESR. Ces 26,8 milliards sont répartis en trois programmes :

  • 15,3 milliards d’euros pour le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire », soit 91 millions d’euros de plus qu’en 2024;
  • 8,3 milliards d’euros pour le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires », soit 67 millions d’euros de plus qu’en 2024;
  • 3,2 milliards d’euros pour le programme 231 « Vie étudiante ».

En tout le budget du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a augmenté de 4,3 milliards d’euros sur la période 2017-2025 et de 2,7 milliards d’euros depuis le démarrage en 2021 de la Loi de programmation de la recherche (LPR).

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La LPR sacrifiée ? La LPR perd les deux tiers du financement prévu pour sa deuxième étape de 2025. En revanche le projet de loi de finances 2025 ouvre 91 millions d’euros supplémentaires sur le programme 150 et 67 millions d’euros sur le programme 172. « Ces moyens permettront de préserver la mise en œuvre du protocole d’accord relatif à l’amélioration des rémunérations et des carrières, dans le cadre de la loi de programmation de la recherche. Nous ne renonçons à aucune mesure même si certaines seront moins dotées comme le financement des chaires de professeur junior (CPJ) et l’ANR moins dotée », détaille le MESR.

Ainsi, en 2025 :

  • le nouveau régime indemnitaire des chercheurs et enseignants-chercheurs continue son déploiement avec près de 68 millions d’euros alloués ;
  • les repyramidages des personnels enseignants-chercheurs et des bibliothèques, ingénieurs, administratifs, techniques et sociaux et de santé (BIATSS) se poursuivent pour un montant de 10 millions d’euros ;
  • la convergence indemnitaire entre les personnels ingénieurs et personnels techniques de recherche et de formation (ITRF) des universités et ingénieurs, techniciens et administratifs (ITA) des opérateurs de recherche sera mise en œuvre pour un montant de 16 millions d’euros ;
  • les primes des personnels enseignants du second degré. exerçant dans le supérieur (ESAS) seront bien revalorisées de 358 €, atteignant ainsi 3 501 € dès le 1er janvier 2025 pour 5 millions d’euros ;
  • le régime des professions libérales sera aligné sur le régime indemnitaire des personnels enseignants et chercheurs (RIPEC) pour 1 million d’euros ;
  • la rémunération minimum des contrats doctoraux augmentera de 100 €, pour atteindre 2 200 € bruts par mois pour une enveloppe de 22 millions d’euros en 2025.
  • s’ajoutent deux mesures pour 12 millions d’euros chacune, l’une en faveur des personnels des EPIC (établissement public à caractère industriel et commercial) et une autre pour diverses catégories de personnels MESR comme les contractuels et la revalorisation statutaire des jeunes chercheurs.

Enfin le budget d’intervention de l’Agence nationale de la recherche (ANR) est porté à 1,4 milliard d’euros en autorisation d’engagement, en augmentation de 120 millions d’euros en 2025.

Soutenir les étudiants : jusqu’où ? « Un certain nombre d’ajustements fins sont encore à faire et notamment sur la revalorisation des bourses », commente le MESR alors que le projet de loi de finances 2025 renforce le soutien financier au réseau des œuvres universitaires qui s’élève à 700 millions d’euros, avec une augmentation de 30 millions d’euros de la subvention. Cet effort permettra notamment de faire face à la hausse de fréquentation dans les restaurants universitaires (+ 2 613 places en 2025), tout en améliorant la qualité des repas dans un contexte de coût croissant des denrées alimentaires.

Le projet de loi de finances 2025 maintient à la fois une subvention d’investissement de 25 millions d’euros en faveur des logements du réseau des œuvres universitaires, et le repas à 1 € pour les étudiants boursiers et ceux en situation de précarité. Entre 2022 et 2024, le nombre de repas servis à tarif social (3,30 € ou 1 €) a augmenté de 16,7 %, avec plus de 6 millions de repas supplémentaires distribués, portant le total à 42,5 millions de repas en 2023-2024.

De plus, la loi du 13 avril 2023 garantit que tous les .étudiants aient accès à une offre de restauration à tarif modéré à proximité de leur lieu d’études. En complément des 800 structures de restauration existantes, une enveloppe supplémentaire de 13 millions d’euros est prévue en 2025, portant le financement total à 38 millions d’euros sur l’année civile.

Vie des établissements. Le projet de loi de finances 2025 pérennise une enveloppe de 35 millions d’euros permettant le lancement de la troisième vague des contrats d’objectifs, de moyens et de performance (COMP) auprès de 55 .établissements. Il offrira également une capacité de financement pour les COMP signés et à venir en 2025 pour les organismes de recherche (ONR).

Au niveau immobilier :

  • le MESR investit 1,2 milliard d’euros, notamment en faveur des campus durables ;
  • des financements issus du plan pluriannuel pour la transition .écologique des bâtiments de l’État de 1,6 milliard d’euros sont également mobilisés ;
  • les dotations du Plan Campus, soit plus de 200 millions d’euros par an, continuent de bénéficier aux établissements.

Apprentissage : le flou s’estompe. Lors de sa déclaration de politique générale, le 1er octobre 2024, Michel Barnier s’était montré été assez elliptique sur le sujet majeur d’économies possibles qu’est le financement de l’apprentissage : « Nous allons développer partout une culture de l’évaluation. Nous ne pourrons pas dépenser plus. Il faut dépenser mieux. Nous voulons par exemple continuer de soutenir l’apprentissage, mais en évitant les effets d’aubaine ». Depuis la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet a confirmé des « ajustements » des aides concernant la formation en alternance.

Avec une baisse de 10% de ses crédits le ministère du Travail est particulièrement touché. Devant s’adapter à un budget en baisse à 21,35 milliards d’euros, il doit trouver pas moins 2,35 milliards d’euros d’économies selon le projet de loi de finances pour 2025 présenté le 10 octobre dernier. Le budget consacré à l’apprentissage, qui atteint aujourd’hui 16 milliards d’euros, trois fois plus qu’en 2017, serait particulièrement dans la ligne de mire de Bercy alors que les seules aides à l’embauche d’un apprenti coûtent 4 milliards d’euros.  L’une des pistes privilégiées serait de faire passer le montant de la prime d’embauche versée aux entreprises de 6 000 à 4500 €. Une prime qui pourrait ne pas être versée aux entreprises dépassant les 250 salariés ou si les apprentis concernés sont de niveau bac+3 et plus. Rassurante Astrid Panosyan-Bouvet n’en a pas moins affirmé qu’il fallait « éviter les fausses réponses pour les alternants en deuxième année de master qui ont « permis à un tiers des étudiants d’accéder à ce niveau d’études grâce à l’apprentissage et cela a permis à beaucoup d’entreprises comme les TPE/PME de recruter ce type de profils et d’augmenter le niveau de qualité de l’emploi pour tous ». A suivre…

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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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