Un établissement reconnu, une association d’anciens dynamique, une riche fondation, tel est aujourd’hui le triptyque de la réussite d’un établissement d’enseignement supérieur. Si aux États-Unis la recette est bien connue, peu sont encore ceux qui savent la servir en France. À cet égard l’expérience d’HEC Alumni et de la Fondation HEC est tout à fait remarquable comme l’explique Laurent Allard, le directeur général des anciens d’HEC, dans un entretien publié sur le blog d’HEADway.
Des associations plus ou moins puissantes
Longtemps absente des préoccupations des universités, la gestion des anciens a largement été déléguée à leurs associations par les grandes écoles. Avec plus ou moins de réussite et d’autonomie vis-à-vis de leur « maison mère ». Totalement indépendante, HEC alumni n’accueille que depuis l’année dernière le directeur du campus et le président de la fondation HEC en son sein. Un temps largement reprise en main par l’EM Normandie, son association d’anciens – le Réseau EM Normandie – reprend maintenant peu à son autonomie avec l’élection à sa présidence du vice-président finance et administration de Microsoft International, Claude Changarnier.
Quant aux Gadzarts des Arts et Métiers ParisTech, de l’avis de tous les plus puissants des anciens, ils représentent un véritable « État dans l’État » dont le poids a longtemps été crucial dans la gestion de l’école. Eux comme les anciens centraliens ou X gèrent même un véritable patrimoine immobilier avec, par exemple, un immeuble avenue d’Iéna à Paris pour les anciens de l’Ensam. Du côté des universités, il n’y a guère que dans les plus fameuses facultés de droit, comme par exemple les Assas Alumni, qu’on puisse trouver des associations en voie de prendre autant de poids que dans les grandes écoles. Mais que d’efforts parfois pour convaincre les responsables de master de «livrer» la liste de leurs anciens à une structure centrale.
Une nécessaire synergie à trois
Si la levée de fonds de la Fondation HEC a été si réussie à la fin de l’année dernière c’est à la fois parce qu’elle a a su se structurer derrière un trio composé d’un président charismatique, l’ancien P-DG de Carrefour Daniel Bernard, un directeur général engagé, Bernard Ramanantsoa, et un réseau d’anciens porté par Laurent Allard. C’est grâce à leur bonne entente et du choix d’une stratégie commune portée vers l’international et soutenue par la CCI Ile-de-France que 112 millions d’euros ont pu être levés, dont 60% provenant des diplômés. Et si la Fondation de l’École polytechnique n’a levée «que» 35 millions d’euros dans le même temps, tous proviennent eux des diplômés.
Dans les deux cas ce sont de véritables « communautés » d’anciens qui se sont mobilisées autour de valeurs communes et, souvent, de la volonté affichée de rendre aux plus jeunes une partie de la réussite qu’ils doivent à leur école. Pour HEC, l’un des éléments les plus motivants pour mobiliser les anciens est même la délivrance de bourses qui couvrent intégralement les frais de scolarité des plus modestes.
Être d’abord des «friends makers»
Les chiffres d’X et HEC font bien sûr rêver toutes les institutions d’enseignement supérieur. Surtout s’ils imaginent un jour pouvoir se comparer aux grandes institutions américaines comme Stanford qui, pour la première fois en 2012, a dépassé le milliard d’euros de dons. Mais elles sont d’abord obligé de constater que la générosité des anciens, hors les deux grands exemples cités précédemment qui sont de toute façon loin de ce qu’on peut voir outre-Atlantique, est loin d’être équivalente en France.
Directeur du développement de l’Ecole Centrale Paris, Gilles Gleyze en faisait récemment le constat sur son blog Educpros: les alumni sont pour la plupart très détachés de leur école et, avant de faire du fundraising, il convient d’abord de faire du «friend raising». C’est-à-dire d’offrir des services et de créer des événements afin de faire naître des communautés avant de leur demander de mettre la main à la poche.
La concurrence des réseaux sociaux
Les associations d’anciens se doivent d’autant plus d’être dynamiques qu’elles subissent de plein fouet la concurrence des réseaux sociaux. «Avant l’avènement des réseaux sociaux les associations de diplômés étaient votre point de focalisation et de rencontre. Maintenant vous préférez vous organiser entre vous au travers de réseaux sociaux privés ou de groupes sur des réseaux publics», écrivait la semaine dernière à ses anciens Denis Lapert, l’ancien directeur de Télécom EM, sur son blog. HEC Alumni a ainsi implanté sur son propre site certaines des fonctionnalités des réseaux tout en prenant bien soin de faire vivre des groupes sur Linkedin ou Twitter.
Plus que jamais utiles à des établissements d’enseignement supérieur en mal de financements, les alumni doivent être de plus en plus choyés et motivés. Le développement de formations qui leur sont spécifiquement destiné peut dans cette optique être autant un relais de croissance que de fidélisation.
Olivier Rollot (@O_Rollot)