Evaluations : Skema, un modèle financier « solide », selon le Hcéres

by Olivier Rollot

Le rapport d’évaluation de Skema que publie le Hcéres (Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur) insiste sur la force d’une stratégie articulée autour de trois axes — avant-garde, engagement, internationalisation — déployée via le plan SKY25. SKEMA bénéficie d’une forte dynamique d’attractivité, illustrée par son classement SIGEM (6e place) et la hausse continue du nombre d’étudiants, notamment internationaux (42 % en 2024). Reconnue EESPIG depuis 2015, l’école compte près de 9 800 étudiants et opère sur trois campus français et six campus internationaux, de la Chine aux États-Unis en passant par l’Afrique du Sud.

Sur le plan financier, l’école « présente un modèle solide » avec un résultat net positif, la maîtrise des charges et des investissements ciblés. En 2023-2024, la masse salariale représente 44 % du budget, répartie à hauteur de 60 % pour les enseignants et 40 % pour les personnels administratifs. Les dépenses de fonctionnement, incluant la gestion des campus et les outils numériques comme l’ERP Oracle, s’élèvent

à 52 %. Les investissements ont été limités à 4 % du budget au cours du même exercice, en raison de la nécessité d’amortir deux projets majeurs réalisés en 2021-2022 : la rénovation des campus et le développement des sites à l’international. Cette maîtrise des équilibres budgétaires s’est traduite par un résultat net positif de 1,1 million d’euros en 2023-2024.

Mais sa dépendance aux frais de scolarité — 87 % des recettes en 2023-2024 avec une progression significative de 55 % depuis la précédente évaluation, — constitue un « point de vigilance majeur ». Le HCERES recommande donc de diversifier les sources de financement : formation continue, mécénat, financements européens.

Un développement territorial affirmé mais contrasté. Le rapport met en lumière une politique de site ambitieuse : coopérations renforcées avec l’Université Côte d’Azur (doctorat, recherche, institut 3IA), partenariats structurants avec Centrale Lille, ITEEM ou l’ENSAM Lille. À l’inverse, les relations avec l’Université de Lille restent rompues malgré les recommandations de 2019

À l’international, SKEMA poursuit une stratégie de multiplication des campus, permettant des parcours multiculturels riches. Mais le comité alerte sur deux risques : une visibilité insuffisante dans certains pays et une possible « cannibalisation » des campus français par les flux d’étudiants internationaux, susceptibles de réduire l’accès des étudiants français aux programmes.

Une recherche en forte progression. Depuis la création du SKEMA Research Center en 2021, l’école a structuré son activité autour de sept axes thématiques. La production scientifique progresse d’environ 7 % par an et les publications de haut niveau augmentent nettement (16 par an en catégorie 1 contre une seule en 2018-2019).

Trois programmes de PhD, adossés à des partenaires académiques (Dauphine, UniCA, Louvain), témoignent de l’ambition doctorale. La labellisation DD&RS obtenue en 2023 illustre également la volonté d’intégrer les enjeux sociétaux dans la stratégie scientifique.

Un modèle pédagogique innovant, mais perfectible. Le plan « SKEMA Way of Learning » se structure autour de l’IA, de la personnalisation des parcours et de l’interdisciplinarité. L’école a créé plusieurs écoles thématiques — Law, Design, AI, Geopolitics — pensées comme leviers d’hybridation, mais encore insuffisamment intégrées à la gouvernance académique.

Le HCERES « salue la flexibilité des parcours mais note une faible visibilité de ces dispositifs auprès des candidats ». Quant à l’utilisation de l’IA en pédagogie, elle « reste à un stade précoce malgré les investissements réalisés ».

Des fragilités organisationnelles persistantes. Le rapport pointe une complexité organisationnelle qui pèse sur les équipes : superposition des instances, procédures multiples, outils de pilotage non interconnectés (Oracle ERP, Tagetik). La surcharge de travail se manifeste dans les fonctions support comme chez les enseignants-chercheurs, avec un risque d’impact sur la qualité pédagogique et la recherche.

Le comité recommande :
• une clarification des responsabilités entre gouvernance centrale et directions internationales ;
• une cartographie des instances ;
• un suivi structuré de la charge de travail ;
• une évaluation des risques psychosociaux avant tout nouveau projet d’envergure.

  • En conclusion, le HCERES estime que SKEMA satisfait pleinement aux exigences du statut EESPIG : qualité des formations, recherche soutenue, stratégie territoriale et internationale cohérente. Seule la dépendance financière aux droits d’inscription appelle une vigilance renforcée.

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