ECOLE D’INGÉNIEURS

«La transformation numérique de la formation s’est brutalement accélérée»: entretien avec le directeur de l’EPF, Jean-Michel Nicolle

Directeur de l’EPF, il vient d’être réélu vice-président de la Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieur (Cdefi). Alors que nous approchons de l’échéance présidentielle il revient avec nous sur les grands sujets qui vont occuper sa conférence tout autant que sur l’actualité d’une école qui s’apprête à déménager dans de nouveaux locaux à Cachan. Entretien avec un directeur très engagé, Jean-Michel Nicolle. (Photo : Patrick Lariven)

Olivier Rollot : Jacques Fayolle, réélu Président, vous restez à la vice-présidence de la Cdefi (Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieur). Qu’est-ce qui va caractériser votre action alors que nous approchons de l’échéance présidentielle ?

Jean-Michel Nicolle : La question de la place des écoles d’ingénieurs dans notre enseignement supérieur, en relation avec les territoires, et leur contribution à l’attractivité internationale de notre modèle de formation et de notre recherche resteront au cœur des actions de la Conférence.

Nous aurons aussi à réaffirmer l’excellente adéquation de nos diplômes d’ingénieurs aux besoins des entreprises et aux grands défis auxquels sont confrontés nos sociétés, économie durable, respect de la diversité et inclusion sociale en premier lieu.

Les écoles ont toujours développé une culture identitaire d’innovation et de recherche, que ce soit au sein même des processus de formation que dans des laboratoires en propre ou partagés. En effet, ce qui caractérise nos structures, c’est qu’elles s’inscrivent naturellement dans des politiques de coopération et de collaboration au sein de sites dont les EPE (Etablissements Publics Expérimentaux) ne sont qu’une facette.

Positionnées à la croisée des territoires avec lesquels elles partagent de nombreuses initiatives et de l’international qui se révèle un espace d’interactions nombreuses et de mobilité étudiante, on ne peut que reconnaitre leur forte personnalité !

Une autre question importante est précisément celle de la visibilité et de l’attractivité de l’enseignement supérieur à l’international. Alors que la crise Covid et la fermeture des frontières menaçaient une attractivité qui s’effritait déjà, le MAEE et le MESRI ont très rapidement mobilisé les parties-prenantes, conférences, réseau des VPRI, Campus France, Crous etc. pour accompagner les établissements, permettre d’affiner au fil des informations disponibles, une gestion de l’accueil à flux tendus en suscitant des initiatives pour que collectivement, nous préservions la position de la France dans la course à l’attractivité. C’est dans cette perspective que l’EPF a créé en juillet 2020 un « Virtual Tech Camp », 100% à distance, en langue anglaise, gratuit, pour promouvoir l’originalité de notre modèle d’école d’ingénieurs et nos territoires. Plus de 700 personnes se sont connectées pendant une semaine en participant à une vingtaine d’ateliers inspirés de nos formations comme « Biomécanique et santé » ou « A quoi servent les mathématiques ? ».

Bien sûr, la transformation numérique de la formation s’est brutalement accélérée au sein de nos écoles pour maintenir nos missions de formation dans un dispositif totalement distanciel et, pour l’EPF, en grande partie « commodal » (gestion simultanée d’une classe physique et virtuelle). Le modèle des campus connectés a d’ailleurs trouvé tout son sens dans cette période de crise.

La Cdefi réunit des écoles de ministères et de statuts différents. C’est une posture originale qui permet d’exposer des modèles économiques et de développement différents, parfois d’inspirer les politiques des écoles, de favoriser les liens mais surtout mettre en lumière le potentiel de création de valeur produit par la diversité de notre enseignement supérieur. La Cdefi souhaite consolider la place de toutes les écoles, quelle que soit leur identité, afin qu’elles puissent s’associer à une dynamique collective et s’inscrire dans l’ensemble des dispositifs d’orientation des politiques publiques et d’incitation à l’innovation comme les PIA.

Si la valeur des écoles d’ingénieurs est unanimement reconnue, leur place est parfois contestée. Leur taille, relativement modeste, peut rendre difficile leur visibilité dans le paysage de l’enseignement supérieur national même si leur contribution à la création de valeur collective est indéniable.

O. R : Entre les écoles d’ingénieurs et les universités les oppositions apparaissent régulièrement !

J-M. N : Je ne dirai pas qu’il y a opposition mais parfois quelques frottements !

Les deux modèles, complémentaires à l’origine dans leurs missions et leur organisation, se sont progressivement rapprochés mais ils gardent toujours de fortes spécificités. Les écoles d’ingénieurs restent encore mal connues, y compris au sein même de la communauté de l’enseignement supérieur. Paradoxalement, la perception de leur identité est plus forte à l’étranger qu’en France. Probablement parce que les fortes coopérations et mobilités internationales de leurs étudiants et leurs personnels, facilitent la mise en valeur d’un modèle aux caractéristiques fortes : des processus de formation et de recherche-innovation en interaction, la place importante de la   coopération écoles-entreprises qui soutient la professionnalisation des diplômés, de nombreux stages, des pédagogies innovantes orientées vers la décision et des projets dans lesquels les professionnels ont toutes leur place, une forte porosité entre l’école et son environnement. Autant de facteurs dont s’inspirent d’ailleurs certains modèles étrangers.

La référence reste encore aujourd’hui le modèle universitaire. L’assimilation reste une tentation pour simplifier un système et espérer le rendre plus performant. Or, c’est justement l’inverse qui crée de la valeur. L’agilité, l’adaptabilité, la résilience et surtout la diversité restent les principaux facteurs de création de valeur vis-à-vis d’une offre mondiale qui joue la carte de l’industrialisation de la formation à outrance dans son modèle, y compris économique. Je suis pour ma part adepte des stratégies de différentiation et de niche et c’est une vision qui me parait mieux adaptée à notre identité culturelle et… nos moyens !

La mobilité d’un système à l’autre doit devenir une évidence. Diplômes d’ingénieurs, Master en ingénierie, BUT ou bachelor des écoles sont autant de propositions différentes qui contribuent à élargir le choix des jeunes. Trop souvent, la raison d’être de nos missions, l’intérêt des jeunes, est mis au second plan dans nos débats internes.

Il me semble plus que jamais nécessaire d’allier les forces plutôt que de nourrir des divisions stériles. Le vrai défi c’est celui de la compétitivité et de l’attractivité de notre modèle face à des géants qui disposent de ressources bien plus importantes que les nôtres. Nos établissements contribuent à former les décideurs de demain et nous devons élargir notre sphère d’influence pour accompagner la compétitivité de notre économie.

O. R : Tout récemment un autre sujet de friction est apparu entre la Cdefi à la Conférence des présidents d’université (CPU) sur le niveau auquel les titulaires du tout nouveau bachelor universitaire de technologie (BUT) devaient être acceptés dans les écoles d’ingénieurs. La polémique est derrière nous aujourd’hui ?

J-M. N : Ce qui a pu apparaitre comme une opposition n’est que le résultat d’une incompréhension. Très sincèrement, je n’ai pas le sentiment qu’il y ait de divergences de fond même s’il faut reconnaitre que la situation générale et en particulier la crise sanitaire, les forts mouvements de notre environnement, les contraintes économiques, ne facilitent pas la mise en œuvre d’un dialogue régulier et serein. Les bureaux des deux conférences se sont rapidement rencontrés pour éclairer les positions et continuer à construire une relation de confiance.

Notre modèle de formation est basé sur un processus en 2+3. C’est pourquoi les DUT et leurs programmes nationaux étaient parfaitement insérés dans un parcours de formation d’ingénieur. Certaines écoles ont une formation en 5 ans après le bac d’autres, dont les plus prestigieuses, un modèle de formation en 3 ans après les classes préparatoires, mais toutes s’inscrivent dans un accès sélectif.

Nos référentiels sont construits sur cette temporalité et la CTI veille au respect des exigences et à la qualité de nos formations. Compte-tenu des niveaux académiques requis et de l’existence de stages en entreprises ou en laboratoire, en France ou à l’international, le temps strictement de formation est sous forte contrainte. Le « cycle ingénieur » (qui intègre L3, M1 et M2) constitue un processus continu cohérent, un temps essentiel pour construire l’identité du futur professionnel. Toute réduction de cette période pourrait avoir un impact négatif sur l’objectif visé. L’année L3, année charnière, joue un rôle structurant en assurant le basculement de l’académique vers le professionnel, en contextualisant les connaissances pour construire les compétences et en ouvrant à la recherche et l’innovation. C’est aussi une année au cours de laquelle le sentiment d’appartenance se construit, une identité se reconnait dans la vie étudiante. La Cdefi a rappelé le rôle essentiel de ce processus continue mais qui laisse bien sûr, au cas par cas, ouvertes des dérogations et des passerelles.

Les BUT sont de nouvelles formations qui ont le statut de licences professionnelles. Leur vocation naturelle est l’activité professionnelle et la qualité reconnue des IUT ne manquera pas de produire ces cadres intermédiaires dont notre industrie a tant besoin. Il en est de même pour les bachelors en sciences et en ingénierie des écoles d’ingénieurs dont certains ont obtenu le grade de licence. C’est le cas pour les deux bachelors de l’EPF.

Que ce soient les BUT ou les bachelors de nos écoles, la poursuite d’études est évidemment possible. D’ailleurs, le cahier des charges du grade de licence intègre des exigences comme l’ouverture à la recherche qui permettent de l’envisager. Elle s’inscrira dans un processus similaire, quel que soit le bachelor, guidé par le seul souci de la réussite des élèves, et la passerelle d’entrée naturelle sera la L3. Cela n’empêchera pas que dans telle ou telle spécialité, en fonction des prérequis et des programmes des BUT ou de nos bachelors, il puisse y avoir une admission directe en M1 mais cela relèvera de la seule responsabilité des écoles.

Mon sentiment est que ce sera marginal.

O. R : Dans deux ans cela va provoquer un certain « trou d’air » à l’entrée dans les écoles d’ingénieurs qui ne vont plus pouvoir recruter des BUT avant leur troisième année. Ni des BUT en deuxième année donc ?

J-M. N : Le BUT n’est pas un DUT plus une année. Il a été construit comme un processus continu avec des redistributions d’enseignements qui n’assurent plus la correspondance qui permettait une intégration naturelle avec les formations d’ingénieurs et en particulier celles proposées en apprentissage.

Ce « trou d’air » va probablement se produire à la rentrée 2024. Pour gérer cette situation, certaines écoles pourront ouvrir à certains élèves en formation étudiante un accès à la formation en alternance, ce qui ne manquera pas d’alléger le coût de leurs études.

Mais dans des cas limités et certaines spécialités, certains jeunes titulaires d’un DUT conserverons la possibilité d’entrer en première année d’apprentissage.

O. R : La difficulté qu’il y a aujourd’hui à envoyer des étudiants à l’étranger est l’une des conséquences les plus évidentes de cette pandémie. L’expérience internationale doit-elle évoluer à l’avenir dans les écoles d’ingénieurs ?

J-M. N : La Commission des titres d’ingénieur (CTI) est effectivement interrogée sur les conditions de la mobilité internationale de nos étudiants. On voit l’émergence de concepts comme l’« international at home » qui visent à satisfaire les compétences produites habituellement par une « expérience internationale ». Nous devons regarder plus loin et valoriser la crise non en reculant mais en avançant. La projection dans un environnement académique, scientifique, culturel et humain transforme chaque personnalité. Elle est un révélateur, un facteur d’émancipation, un activateur de résilience.

La doctrine que nous défendons à l’EPF est que chaque étudiant doit construire son projet personnel de mobilité en cohérence avec ses objectifs. C’est un processus qui nécessite un niveau d’encadrement important donc économiquement couteux mais la création de valeur individuelle est bien plus forte que celle qui résulte de mobilités en groupe. En 2020 et 2021, nous avons renforcé certains partenariats avec des universités étrangères pour associer nos étudiants dans la réalisation de projets communs de dimension internationale avec des interactions exclusivement en langue anglaise. Nous avons ainsi réussi à adresser les compétences visées sans dégrader nos exigences. L’ensemble de nos actions ont porté sur la sécurisation des « learning outcomes », les compétences attendues.

O. R : La « Génération Covid » n’est pas une génération sacrifiée ?

J-M. N : La mobilisation de toutes les parties prenantes de notre enseignement supérieur et l’extraordinaire implication des personnels aura permis d’écarter ce risque d’une génération Covid ! Je dirais même que cette expérience douloureuse qui préfigure un monde plus volatile aura renforcé une grande majorité de nos étudiants. Cette génération sera emblématique par la capacité de résilience qu’elle aura su démontrer. Cela ne doit pas masquer qu’une partie de notre jeunesse a véritablement souffert et que nous devons continuer à l’accompagner dans la durée. Nous devons regarder avec bienveillance et beaucoup de responsabilité les parcours de nos élèves dans cette période troublée et leur donner le temps de se reconstruire y compris sur le plan académique.

O. R : France Compétences semble rencontrer quelques soucis pour financer la montée en puissance de l’apprentissage. Cela vous inquiète ?

J-M. N : Bien sûr que l’incertitude nous inquiète ! Nous nous inscrivons dans des stratégies à long terme qui nécessitent des engagements, des investissements et des organisations adaptées. Notre enseignement supérieur a répondu présent aux sollicitations, en particulier à la dynamique de renforcement de l’alternance souhaitée par le Président de la République. Nous sommes convaincus que c’est un modèle vertueux pour favoriser l’emploi et faciliter la rencontre entre le monde académique et le monde professionnel.

Mais ces engagements ne peuvent mettre en péril le modèle d’équilibre général des établissements. L’apprentissage, c’est un suivi précis par les tuteurs, un processus original de construction des compétences, c’est un rythme qui doit satisfaire les contraintes des parties, ce sont des exigences à satisfaire sans concession dont la mobilité internationale. C’est un processus original et complexe qui mobilise ses propres ressources et génère un coût qui doit être couvert.

Les montant de « coûts contrat », c’est-à-dire auquel France Compétences finance nos formations, doit couvrir leur coût complet réel sous peine de provoquer un « subventionnement » de l’apprentissage par d’autres activités qui perdraient ainsi leur propre capacité de développement. Je pense, entre-autre, à la recherche sur laquelle nous investissons fortement.

Ce serait une mauvaise approche de gestionnaire !

Aujourd’hui, nos formations coûtent effectivement entre 9 000 et 11 000€. Notre inquiétude est que la « remontée » des coûts actuels – c’est-à-dire en période de pandémie – deviennent la référence alors que nous savons qu’ils reflètent une situation exceptionnelle et que des dépenses non engagées ont, en fait, été déplacées sur les prochaines années.

O. R : Dans quel objectif avez-vous transformé la structure de vos dépenses ?

J-M. N : Tout simplement pour prendre en compte la situation exceptionnelle, éviter un taux d’échec supérieur à celui des années précédentes, par exemple, en renforçant fortement l’accompagnement scolaire cette année et les deux prochaines années. Nous avons aussi massivement investi dans les technologies numériques, équipé 45 salles d’enseignement en mode « commodal », renforcé notre dispositif de bourses en complément des possibilités offertes par la CVEC qui a aussi joué un rôle de régulation notable pendant cette crise.

Maintenir le niveau d’exigence final de nos étudiants nous demande d’investir mais nous ne sommes pas inquiets du résultat. Les premiers signes positifs sont rassurants.

O. R : Comment se déroulent les inscriptions pour l’EPF cette année. Alors que les journées portes ouvertes (JPO) sont difficiles à organiser et que les salons d’orientation n’ont pas pu avoir lieu les classements jouent-ils un rôle encore plus important ?

J-M. N : C’est vrai que les JPO ont une fonction importante dans la détermination du choix de l’établissement. Ce sont des moments de rencontre avec les équipes pédagogiques, les élèves et l’administration. C’est le moment de « respirer » une école, sa culture, son identité, ses valeurs. Et quand ces moments ne sont pas possibles, les choix s’opèrent à partir des seuls éléments accessibles et les classements en font partie.

Ce qui est troublant, c’est que depuis quelques années, un certain nombre d’établissements les appréhendent comme des objets marketing. Il suffit de voir les positions relatives étonnantes de certaines ou des trajectoires rapides d’autres alors que nos organisations se caractérisent par un niveau d’inertie important. Pour progresser, il faut mobiliser des ressources, investir, recruter et ceci se réalise dans un temps long.

Les classements tentent d’objectiver la position des écoles principalement à partir de critères quantitatifs qui ne s’avèrent pas toujours « indépendants » sur le plan statistique. Par exemple les 3 critères, nombre d’enseignants-chercheurs, de HDR (habilitation à diriger les recherches) et pourcentage de poursuite en thèse pour apprécier l’excellence académique, sont intimement interdépendants et ne facilitent pas une bonne discrimination au sein de la population des écoles.

Je pense qu’il faut intégrer d’autres critères qualitatifs qui renvoient aux valeurs, aux engagements, à l’expérience étudiante et qui contribuent à une meilleure information du public. Les questions de « l’ouverture », de l’engagement et de la diversité sont au cœur de la stratégie de l’EPF. C’est pourquoi nous sommes collectivement mobilisés, par exemple, pour accompagner les personnes en situation de handicap et menons des actions fortes pour prévenir les violences sexistes et sexuelles. Ces postures marquent une culture d’organisation et ont un impact sur la manière dont sont réalisées les missions de formation et de recherche de l’école. Elle affecte le profil du futur ingénieur et contribue à sa différentiation.

L’exemple du « Challenge Innovation handicap » déployé depuis 5 ans pendant 24 heures sur les 3 campus de l’EPF illustre ce point de vue. Etudiants, enseignants-chercheurs, partenaires industriels, médecins, associations engagées dans l’accompagnement des personnes empêchées, personnes handicapées, sportifs, alumni et d’autres encore, s’associent pendant 24 heures, sans interruption, pour faire émerger de nouvelles solutions technologiques qui changeront la vie de personnes en situation de handicap. Et chaque année, certains projets sont repris par des industriels et d’autres amorcent une initiative entrepreneuriale.

O. R : Mais pour montrer tout cela il faut que les candidats viennent sur vos campus…

J-M. N : Oui, les rencontres physiques sont essentielles pour comprendre le modèle de formation, appréhender son environnement et surtout faciliter l’échange avec les étudiants qui peuvent alors partager leur expérience.

Elles nourrissent la réflexion et contribuent au choix de chacun.

Une enquête que nous venons de réaliser avec Epoka et Harris interactive montre que près de 75% des candidats qui intègrent l’EPF reconnaissent que leur expérience est bien plus riche et valorisante que ce qu’ils pouvaient imaginer avant leur arrivée.

Ils découvrent, dans une véritable formation généraliste, l’important potentiel d’individualisation des parcours et peuvent accéder à une large palette de doubles diplômes dont certains avec des institutions réputées comme CentraleSupélec, Georgia Tech ou Sciences Po. L’EPF c’est aussi un terreau qui permet de nourrir les ambitions et les talents de chacune et chacun et de permettre d’identifier un chemin pour orienter et accélérer sa carrière.

O. R : L’EPF va bientôt déménager pour s’installer sur l’ancien site de l’ENS à Cachan. Les travaux avancent bien ?

J-M. N : Les travaux avancent bien et vous pouvez suivre l’avancement du projet sur la page https://www.epf.fr/cachan2022. L’inauguration aura lieu en début d’année 2022. L’environnement offrira les atouts d’un pôle d’enseignement supérieur de dimension internationale avec les logements et la restauration du Crous, une vie associative en liens avec d’autres écoles (ESTP, AIVANCITY, ECAM-EPMI, ESITC Paris, IUT de CACHAN, les Lycées principalement). L’EPF disposera, à l’issue d’une importante rénovation, de près de 18.000 m² pour accueillir à terme 1600 élèves. Ce campus résolument disruptif et qui place la technologie au cœur du bâtiment, a été conçu pour faciliter la large diffusion des nouvelles pratiques pédagogiques et assurer une forte interaction entre la formation et la recherche. Il permettra aussi l’accueil d’entreprises et disposera d’un incubateur de 3000m².

O. R : Après Troyes et Montpellier avez-vous d’autres projets de création de campus de l’EPF en régions ?

J-M. N : Nous prévoyons d’ouvrir un nouveau campus à la rentrée 2022 à Saint-Nazaire, d’abord dans des locaux provisoires puis en 2024, dans un nouveau bâtiment en cœur de ville. Les premiers élèves accueillis intègreront la 1re année post-bac et une nouvelle majeure dédiée à la transformation des organisations avec une forte culture numérique. L’identité de ce campus se dessine progressivement en fonction des offres préexistantes, des besoins du marché et de l’identité du territoire. Nous recherchons systématiquement la coopération et, si possible, les synergies au sein du site.

O. R : La recherche est de plus en plus importante dans les écoles d’ingénieurs. Quels grands axes développez-vous ?

J-M. N : Notre approche est très pragmatique : nous recherchons la meilleure articulation possible entre la formation, la recherche et la satisfaction des besoins des entreprises. Le modèle que nous avons retenu est celui de plateformes technologiques articulées sur les spécialités développées localement et les besoins du marché.

A Troyes, celles-ci sont dédiées aux technologies de la fabrication additive et à la performance du bâti avec des dispositifs expérimentaux très originaux (mannequin instrumentée, plateforme BBC+ mobile par exemple). Nous développons cette dynamique avec l’UTT à laquelle l’EPF est associée.

A Montpellier, l’Energy’Lab, qui a reçu le soutien de la Région, est un démonstrateur permettant de combiner la majorité des sources de production d’énergie pour effectuer des mesures de performance. Sur notre nouveau campus de Cachan nous créons plusieurs plateformes dont une salle technologique d’analyse du mouvement associée à un laboratoire de biomécanique et en coopération avec l’ENSAM.

Notre recherche s’inscrit dans une perspective « Tech for good » au service d’une société durable avec des problématiques qui concernent la santé, la dépollution des eaux, la durabilité des matériaux. D’ailleurs, l’un de nos enseignant-chercheurs récemment recruté est médecin et travaille sur les interactions société, environnement naturel et technologie.

Pour développer toutes ces actions, Philippe Rouch, Professeur d’Université au laboratoire de Biomécanique Humaine Georges Charpak et directeur du campus parisien des Arts et Métiers, rejoindra l’EPF à la prochaine rentrée pour prendre la direction de notre recherche et du développement.

O. R : Au titre de la Cdefi vous présidez la commission Afrique du Forum Campus France, qui implique les représentants des conférences, le réseau des vice-présidents relations internationales, les grands organismes etc. Que doit faire la France pour mieux s’impliquer en Afrique ?

J-M. N : L’Afrique sera le continent du futur et la France doit bien sûr y être présente pour des raisons historiques mais aussi politiques et économiques. Cet immense territoire est dans le spectre d’influence de nombreux Etats étrangers et l’enseignement supérieur tout particulièrement compte-tenu de son impact sur la société.

La croissance démographique nourrit une forte demande de formation alors que l’offre actuelle s’avère insuffisante. Plus de 90% des candidats étrangers à la mobilité étudiante en France sont d’origine africaine et 95% d’entre eux ne seront pas admis dans nos établissements.  Il y a donc de réelles opportunités à développer pour l’enseignement supérieur français d’autant que des soutiens nationaux (Adefsa, PEA) et européens sont mis en place pour accompagner le financement des initiatives, le plus souvent, en co-construction.

Nous avons de réels atouts à notre actif, les liens amicaux, la langue, la qualité de nos formations, nos référentiels, notre modèle social qui valorise la RSE (responsabilité sociétale des entreprises), l’inclusion et l’égalité des genres.

L’objectif de la Commission reste d’une part d’informer largement les établissements français, créer un espace d’échange de bonnes pratiques pour éclairer les stratégies d’internationalisation vers l’Afrique et, d’autre part, de produire, à l’issue des travaux, des recommandations à nos autorités. Différents niveaux d’approches sont identifiés comme les questions de modèle économique, de recherche collaborative, de financement, de coopérations avec le secteur économique pour être partagés avec les membres de la commission, réseau des VPRI, CPU, CGE, CDEFI, Organismes de recherche, des personnalités invitées et les représentants des organisations membres du Forum. Par exemple, le prochain webinar accueillera trois présentations, les campus connectés, l’expérience de l’université virtuelle du Sénégal en temps Covid et les dispositifs d’accompagnement financier de la Commission Européenne.

Pour l’EPF, l’Afrique est inscrite dans la stratégie de développement international et deux projets en Tanzanie et au Sénégal sont en cours de développement. Notre approche vise à aligner l’offre de formation et les besoins importants du développement de la ville africaine du futur. Comme souvent, nos projets se font avec des partenaires. Sur ces dernières initiatives, l’ESIGELEC est à nos côtés.

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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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