Alors que les deux responsables de la Stratégie nationale de l’enseignement supérieur (Stranes), Brigitte Béjean et Bertrand Monthubert, sont dans la dernière ligne droite avant la remise de leurs propositions, la Conférence des Grandes écoles vient de livrer sa contribution et rejoint ainsi celles de la CPU ou de la Cdefi. Mais elle n’est pas la seule à prendre part au débat : le think tank proche du PS Terra Nova vient ainsi de relancer l’éternel débat de la sélection à l’entrée de l’université.
Les frais de scolarité pourront-ils augmenter ?
Dans sa contribution la CGE demande à ce qu’on « généralise des droits de scolarité dans le supérieur à un niveau correspondant à 10 % du prix de revient des formations (la cible à long terme étant de un quart à un tiers) ». Elle s’appuie sur la décision du ministère du Redressement productif de multiplier par plus de deux les droits de scolarité dans les établissements relevant de l’Institut Mines-Telecom. Une option vouée, selon la CGE, à se « généraliser dans l’enseignement supérieur, afin de doter les établissements de réels moyens pour développer des stratégies éducatives ambitieuses ».
Une option qui n’est pas applicable partout. « Il n’y a pas de modèle unique : pour demander une contribution, il faut d’abord que le diplôme soit considéré comme de valeur, en termes d’insertion professionnelle et de rémunération », explique ainsi Laurent Batsch, le président de Dauphine (relire cet entretien).
La difficulté de trouver de nouvelles sources de financements
Si la CGE demande que la question des frais de scolarité soit clairement posée, c’est qu’elle ne croit pas aux autres solutions « miracle ». Elle rejette ainsi toute incitation à la levée massive de ressources propres par le développement de la recherche. « Dans le mode actuel de financement qui prévaut, où les frais de structure sont faibles, cette inflation du chiffre d’affaires des écoles ne peut conduire qu’à des bilans structurellement déficitaires », argumente la CGE. De la même façon, la CGE estime que la substitution du financement barème (versement affecté directement par les entreprises au titre de la taxe d’apprentissage) par le financement quota (développement de l’apprentissage dans les écoles) ne peut pas être une solution alors que la « quasi-totalité des formations par apprentissage dans le supérieur sont financées en-dessous de leur prix de revient ».
Le tabou de la sélection sera-t-il un jour levé ?
En reparlant de sélection à l’entrée à l’université dans sa note intitulée Neuf idées pour redonner confiance aux universités et aux universitaires, Terra Nova a relancé un éternel débat. « L’Université doit avoir le droit de vérifier la réelle motivation des étudiants et leur réelle capacité à réussir les études qu’ils veulent entreprendre. Sinon, le gâchis est immense, surtout quand on les a laissés choisir des licences universitaires par défaut », écrit le pôle enseignement supérieur et la recherche de Terra Nova avant d’insister qu’aujourd’hui on « décourage les universitaires d’enseigner en licence, on méprise leur métier, en exigeant d’eux une mission impossible ». Et de préconiser que, pour le moins, certaines admissions ne soient plus de droit mais « laissées à l’initiative des universités au vu des dossiers, lorsque ces orientations conduisent à un échec quasi-certain (par exemple la philosophie ou la médecine après un bac professionnel) ».
Dans le même esprit, Terra Nova demande qu’on « arrête d’interdire aux universités de créer des « licences d’excellence » en prise sur la recherche pour attirer les meilleurs bacheliers et des étudiants étrangers de grande qualité » alors qu’aujourd’hui les universités en sont à « ruser « pour atteindre cet objectif (doubles licences, sélection déguisée, etc.). Oui mais voilà il est quasi impossible que les étudiants l’acceptent et les universités continueront à créer des filières sélectives sans trop se faire remarquer et à tenter de sélectionner sans le dire…
Olivier Rollot (@O_Rollot)