S’il est trois méprises dans les relations entreprises, il faut pour les déjouer s’appuyer sur trois disciplines d’action dans un objectif simple et clair : bâtir ensemble à long terme.
La première discipline est de considérer l’entreprise comme un partenaire à long terme.
L’enjeu est de savoir construire dans l’intérêt mutuel des deux partenaires. La relation avec l’entreprise doit être bénéfique pour les deux parties et remplir au moins quatre objectifs ultimes :
– assurer à l’entreprise de pouvoir recruter les talents qui correspondent parfaitement à ses besoins;
– apporter à l’entreprise de nouveaux contenus et de nouvelles approches ;
– apporter à l’Ecole ou l’Université des contributions pertinentes à l’évolution de son offre ;
– contribuer à son développement en appuyant ses financements.
Atteindre ces objectifs ne se décrète pas. Le premier ingrédient de la réussite est la confiance réciproque, une confiance qui se construit patiemment et qui nécessite de passer par de nombreuses étapes. Elle repose sur une stratégie clairement définie ; il ne s’agit certainement pas de monter des opérations ponctuelles ou de gérer des opportunités. Pour les institutions d’enseignement supérieur cela revient à marcher sur une ligne de crête. Se limiter aux dimensions de recrutement et de financement se traduit par une équation simpliste : des financements contre des diplômés. C’est insuffisant et risqué.
Pour construire à long terme, il faut développer une seconde discipline : les relations entreprises doivent impliquer tous les pôles d’expertise de l’institution d’enseignement supérieur : la recherche, les programmes, la direction académique tout autant que les directions administratives.
Cette implication doit donc mobiliser au-delà d’un seul service dédié. Les relations entreprises sont aussi l’affaire du corps professoral, de la direction académique, des parties prenantes et même des étudiants.
– Les entreprises peuvent s’investir à plusieurs niveaux dans les programmes, leur élaboration, leur développement, leur évolution. Beaucoup de praticiens d’entreprise interviennent dans les établissements. Pour autant quelle visibilité le management de l’Institution d’enseignement supérieur en-a-t-elle ? Comment bâtir sur cette présence au quotidien pour aller au-delà ? Recenser les contributions est toujours possible, bien que cela soit fort consommateur de temps, mais comment les piloter, les développer ? Les managers de l’enseignement supérieur ont besoin d’outils de supervision.
– Les entreprises, notamment à celles de taille intermédiaire ou de taille moyenne, sont parfois circonspectes sur l’apport que la recherche est en mesure de leur apporter. Cette situation touche de manière inégale les disciplines. Pour autant, quelle que soit la discipline, les entreprises peuvent s’enrichir de l’expérience des chercheurs. Leur approche est une source de renouvellement ; leurs capacités d’innovation, leur vision sont autant d’atouts. Les entreprises ont besoin des chercheurs, et les chercheurs ont besoin des entreprises, notamment parce qu’ils ont besoin de terrains d’études, tant pour l’analyse que pour transformer leurs innovations. Il est alors de la responsabilité de l’institution de développer des relations pérennes. Mais à nouveau se pose la question du pilotage et de la capacité des instituions à dégager un schéma d’ensemble favorable au développement de relations à long terme tout en respectant la liberté et l’indépendance académique. Le pilotage est de nouveau la clé.
– Impliquer les étudiants n’est pas une décision qui vient de la direction des établissements, mais un fait qui illustre le dynamisme souvent remarquable des associations. Mais là se pose la question de la coordination : les efforts des uns ne doivent pas être nuisibles aux autres. La question qui se pose est celle du management ou plus exactement du pilotage des actions des différents acteurs. Quelle entreprise n’a pas déjà expérimenté d’être, dans des temps très rapprochés, sollicitée à la fois par des étudiants pour un développement associatif et par l’institution elle-même ? Quelle douloureuse expérience alors pour l’Institution de se voir annoncer que les budgets qui auraient pu lui être alloués sont déjà lourds en raison d’un soutien à telle ou telle association. Pour autant, les relations institutionnelles ne doivent pas entrer en concurrence avec celles portées par le dynamisme des étudiants. Il faut se doter d’outils capables d’harmoniser de graduer et de piloter.
La troisième discipline relève avant tout du ciblage.
La stratégie des relations entreprises doit se fonder sur les points forts de l’institution. Mieux vaut cibler plusieurs objectifs circonscrits que de tenter une stratégie « attrape tout ». Cette dimension trouve son premier écho dans l’offre de formation continue. Une gamme trop étendue dilue l’image de l’institution et ses efforts. Elle pose en outre de réelles difficultés de management, parmi lesquelles on trouve sans être exhaustif :
– les coûts fixes importants relatifs à la constitution des programmes, à l’établissement du catalogue, à son entretien, au soutien de l’équipe support ;
– le défi pour la gestion du corps professoral : les entreprises souhaitent avoir « le spécialiste » de la question face à elle, ce dont ne disposent pas toutes les institutions. Problème magnifié avec une gamme trop étendue. La multiplicité des attributions des enseignants rend périlleuse le suivi des plans d’activités. Souvent les institutions recourent à un corps professoral spécifique pour les relations entreprises, se privant des synergies qui pourraient se développer avec une organisation différente ;
– L’éparpillement des efforts commerciaux, et la difficulté de la rentabilisation de l’offre.
La formation continue est l’un des premières zones de contact entre l’entreprise et l’institution. Elle constitue le fondement de relations ultérieures. Comment alors articuler l’identité de l’institution avec cette offre ? Comment capitaliser sur elle ? Quels sont les indicateurs pertinents pour la développer?
Si les problèmes posés par les relations entreprises sont souvent connus, la difficulté première réside dans la manière de les traiter, tant les relations entreprises sont un enjeu à dimensions multiples. Y répondre est à la fois simple et complexe : il faut est d’être capable de se doter de véritables tableaux de bords sur les différentes dimensions des relations entreprises. Comment les définir de manière à ce qu’ils soient des leviers d’action ? Si l’analyse doit prendre en compte la réalité de chaque institution, il faut aussi pour être réellement opérationnel pouvoir se comparer. C’est donc un pilotage managérial qu’il faut établir pour des relations entreprises « réussies ».
Sebastien Vivier-Lirimont lirimont@headway-advisory.com
Dominique Denis d.denis@headway-advisory.com