« Pendant deux ans avec la pandémie nous avons expérimenté énormément d’approches pédagogiques. Nous faisons maintenant le point sur ce qu’il faut conserver », explique Delphine Manceau, la directrice générale de Neoma, qui constate que l’école se trouve face à une « génération qui a toujours vécu avec le digital et a plus le réflexe de regarder une vidéo que d’ouvrir un livre ». Il faut donc selon elle « s’adapter aux approches de ces nouvelles générations » alors que les « manières mêmes de travailler ont évolué avec de plus en plus de travail on line ».
« La pandémie a accéléré nos transformations en amenant l’utilisation de nouveaux outils. » Avec Zoom ou Teams ont émergé le distanciel synchrone qui est venu s’ajouter à l’asynchrone déjà largement utilisé par les écoles. La question est maintenant de savoir quelle est la meilleure méthode pour chaque cours ? « Tous les cours seront demain combinés pour donner le meilleur de chaque format pour maximiser l’apprentissage », définit la directrice.
Pour ce faire ont été interrogés quarante professeurs et intervenants et plus de cent étudiants dans une démarche dite de « Neopédagogie ». Quelques verbatim issus de cette enquête : « En Zoom on peut faire intervenir trois P-DG dans un même cours pour témoigner quand c’est impossible en présentiel » ; « On se répartit facilement dans les salles pour travailler en groupe et les professeurs passent d’un groupe à l’autre » ; « On a les contenus sous les yeux. Le partage d’écran cela change l’approche ». Sans oublier des étudiants qui participent beaucoup plus facilement en distanciel qu’en présentiel et la possibilité de travailler selon son rythme : « Aucun étudiant ne renonce parce qu’il ne comprend pas aussi vite que les autres ! »
En revanche le modèle hybride – étudiants en présentiel et en distanciel à la fois – n’a pas convaincu Neoma : « Le professeur s’adresse soit aux étudiants présents, soit aux étudiants à distance et perd une partie de son public ».
Quant au présentiel il reste « inégalable » car il permet de « mobiliser des émotions de manière beaucoup plus forte qui font partie de l’apprentissage » sans oublier qu’en présentiel les « débats sont beaucoup plus sereins ». Au moins 60% des cours seront donc toujours délivrés en présentiel. Et d’autant plus que les étudiants sont jeunes. « Il faut d’ailleurs même leur place dans leur emploi du temps les cours en ligne pour qu’ils l’intègrent, après des années où ils ont toujours été pris en main dans leur calendrier d’apprentissage », remarque Delphine Manceau.
S’adapter à chaque étudiant. Placées au cœur une organisation « ambidextre » propre aux processus d’innovation – la transformation pédagogique d’un côté, son application de l’autre – une vingtaine de personnes, essentiellement des ingénieurs pédagogiques, accompagnent les professeurs pour les accompagner dans la redéfinition de leurs cours. Par exemple le rythme des cours est adapté – on parle d’« adaptative learning » – aux capacités d’apprentissage des étudiants. « Nous adaptons le cours pour les « fast » comme les « slow » learners avec des cours non notés qui sont monitorés par un système d’Intelligence artificielle (IA) et qui correspondent au niveau de chacun », explique Haithem Marzouki, directeur de la pédagogie innovante et professeur de finance.
L’intelligence artificielle (IA) peut mesurer le temps de travail et les résultats atteints par chaque étudiant. S’il est bien sûr indispensable de prévenir le professeur en cas développement durable , une des solutions est également de mettre en contact l’étudiant en difficulté avec un étudiant en pleine réussite dans une démarche de « peer to peer ». « L’objectif est que tous les étudiants arrivent au même niveau minimum quand ils viennent suivre leur cours », reprend le directeur.
Un campus en ligne. Bien avant qu’on parle de Metaverse Neoma avait créé son espace en ligne. Un vrai quatrième campus développé depuis maintenant dix-huit mois auquel tous les étudiants ont accès. « Cela génère beaucoup plus d’interactions et de personnalisations mais aussi de fluidité et de spontanéité dans les échanges. Beaucoup d’entreprises s’interrogent sur notre expérience », commente Alain Goudey, le directeur de la transformation gigitale et professeur de marketing à Neoma, qui veut maintenant développer le « iLearning », une dimension nouvelle du e-learning qui donne par exemple la parole à des experts, à des contenus interactifs et à des web séries immersives pour « plonger l’étudiant dans le contexte qu’on souhaite le voir observer en passant du « serious game » au « fun course » ».
Dans le cadre de ces web séries, l’étudiant est littéralement plongé dans une mission virtuelle en entreprise tout en étant accompagné dans les contextes fondamentaux de l’entreprise : « Nous avons même recréé un environnement de vidéo conférence avec la possibilité de poser des questions à des experts ». Chaque cours est présenté par des bandes annonces qui reprennent les codes du cinéma. « Nous allons jusqu’au bout des codes du monde audiovisuel », signifie Delphine Manceau quand Haithem Marzouki remarque : « Toutes ces adaptations sont également rendues possibles par l’arrivée de jeunes professeurs issus du monde entier qui sont formés à ces nouvelles technologies ». Le plan de charge des professeurs reste quant à lui toujours calibré en nombre d’heures dédiées à l’enseignement et à sa préparation.