Paris 1 et maintenant l’Ena qui quittent Hesam, Lyon 3 que se désolidarise de l’Idex, Léonard-de-Vinci lâchée par ses membres quand les acteurs de Paris-Saclay n’en finissent pas de se déchirer. Alors que les nouveaux projet d’Idex ont été déposés la semaine dernière, l’actualité des communautés d’universités et d’établissements (Comue) reste chaotique. Un retour en grâce des grands établissements semble même être la meilleure solution pour permettre leur développement selon le directeur de l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR), Jean-Richard Cytermann, dans son dernier rapport intitulé Simplification des instruments de coordination territoriale et articulation avec les initiatives d’excellence. Comme si dans la loi Fioraso de 2013 tout avait été fait pour se donner de grands objectifs tout en se garantissant de ne pas pouvoir les atteindre : gouvernance ingérable, procédures incompréhensibles, compétences floues, etc. Et surtout accord en trompe l’œil de membres désireux à la fois de ne pas heurter leurs tutelles et de garantir leur indépendance.
A vouloir aller trop vite…
Le constat de l’Igaenr est sans appel : « Le ministère a, dans son processus d’approbation des statuts, privilégié le respect formel de la date prévue par la loi de mise en place des regroupements, par rapport à un examen critique du contenu des statuts et des compétences transférées ». Entendez : il fallait mieux engranger un succès politique que surseoir à l’établissement de Comue dont le projet était mal ficelé. Ce que n’ont pu ensuite que constater les membres des jurys des Idex qui ont retoqué de nombreux projets faute d’une gouvernance claire.
Pour autant s’il est au moins un point sur lequel tout le monde s’accorde c’est que les regroupements ont conduit des établissements qui ne se connaissaient guère à enfin se parler.
Mais nombreux sont ceux qui se sont également sentis rejetés, et tout particulièrement les grandes écoles de management consulaires. Comme le faisait remarquer Jean-Michel Blanquer, le directeur de l’Essec, lors de la présentation des propositions de la Conférence des grandes écoles pour les présidentielles « même si je suis très heureux dans ma Comue, je m’inquiète de la « strapontisation » dont sont victimes les grandes écoles mises à l’écart dans certaines Comue ».
Sans contrat de site… pas de site !
Si le bât blesse à un endroit c’est bien dans la non mise en place de contrats uniques de site. Comment imaginer que les acteurs d’un projet travaillent ensemble et donnent du poids à leur direction sans contrepartie autre que des financements d’Idex par nature contingents. Or le projet initial du gouvernement lors de la rédaction de la loi de 2013 était bien de proposer un contrat unique de site. Le rajout d’un volet spécifique à chaque établissement dans le contrat de site s’est fait à la demande des établissements afin d’instaurer des garanties pour chacun. Comme le constate l’Igaenr : « Au bout du compte, bien loin de simplifier la procédure contractuelle, le contrat de site est venu s’ajouter, de fait, au contrat avec chacun des établissements ». L’inspection souhaite donc aujourd’hui « expérimenter avec une COMUE et ses membres volontaires, l’abandon du volet spécifique des contrats ».
Comment garder son identité ?
Toute intégration au sein des Comue se heurte d’abord à la volonté de ses membres de conserver leur personnalité morale. Or aujourd’hui, il n’existe pas au sein des établissements publics administratifs, de personnalité morale composante d’un établissement ayant la personnalité morale à l’exception de l’Institut de France. Pour autant il est possible, en cas de fusion, de garantir aux composantes (écoles et notamment celles relevant d’autres ministères que le ministère de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche) le maintien de la plupart des attributs liés à la personne morale. Selon l’inspection, « l’attachement à la notion de personne morale est typiquement une problématique française et relève bien plus d’un caractère symbolique que de risques d’une réelle perte de visibilité et d’autonomie ». Le combat des Mines de Paris pour ne pas être « dissout » dans l’Institut Mines Télécom est sans la meilleure illustration de la persistance de cette volonté.
Pour relever le défi d’une intégration « douce » la Comue Paris Seine (dont font partie l’université de Cergy et l’Essec notamment) envisage aujourd’hui la création d’un « College undergraduate » qui pourrait être abrité par la Comue (recentrée sur cette fonction plus locale qu’internationale) qui comprendrait la licence actuelle de l’université, l’IUT et certains cycles des écoles membres de la Comue. Il ne s’agirait cependant pas d’une simple juxtaposition de l’existant mais bien d’une refonte du « cycle de licence ». Une vraie nouveauté dans un paysage où, jusqu’ici, ce sont les cycles « doctorat » et « masters » qui ont été mis en commun.
- En tout ce sont neuf regroupements qui ont remis leur dossier d’Idex le 29 novembre et vont maintenant attendre jusqu’en février pour savoir s’ils seront ou pas retenus.