Accords internationaux, séjours d’échanges académiques, doubles diplômes, professeurs et étudiants venus du monde entier, campus à l’étranger, l’enseignement supérieur français a largement investi le champ international. Alors que la France connait une augmentation régulière du nombre de ses étudiants qui s’expatrient (+70% entre 2006 et 2016), elle reçoit quasiment trois fois plus d’étudiants internationaux qu’elle n’en envoie chaque année à l’étranger : 245 000 pour 90 500. Un mouvement d’expansion dont les écoles de management sont les leaders.
- Promu par Audencia BS et Neoma BS, réalisé par le cabinet HEADway Advisory, c’est tout cet univers que se propose de découvrir ce Livre Blanc « L’enseignement supérieur français, acteur mondial »
Trouver les meilleurs partenaires. La première pierre de la construction d’une dimension internationale passe par la conclusion d’accords internationaux. « Qui se ressemble s’assemble et nous sommes en mesure d’envoyer nos étudiants dans les meilleures business schools mondiales – mieux vaut la London BS que l’université de Liverpool ! – pour les confronter à des modèle pédagogiques différents », commente le directeur international de l’Edhec, Richard Perrin, dont l’école accueille 40% d’étudiants internationaux et jusqu’à 70% dans ses MSc. Toujours chez des universités partenaires notamment pour y trouver des programmes complémentaires et des spécialités que ne propose pas l’Edhec. « Les implantations à l’étranger coûtent cher alors qu’il faut mieux allouer ces sommes à la signature d’accords avec les grandes business schools américaines », remarque Richard Perrin. Car envoyer ses étudiants aux Etats-Unis coûte souvent cher. Si l’Edhec paye l’essentiel de la différence ses étudiants ne doivent pas moins débourser 10 000€ de plus par an – des bourses existent pour les étudiants boursiers – pour réaliser le parcours GETT du PGE qui les emmène sur le campus de la Haas School of Business à Berkeley et de la SKK Graduate School of Business de Séoul en sus de l’Edhec.
Neoma BS organise des échanges académiques avec 330 universités partenaires dans le monde. « Le modèle de Neoma repose sur l’immersion culturelle des étudiants dans les meilleures universités de chaque pays. Nos étudiants vivent ainsi une véritable immersion avec, autour d’eux, peu d’étudiants français chez chaque partenaire », explique sa directrice, Delphine Manceau. Même démarche du côté de Grenoble EM comme l’explique son directeur général, Loïck Roche : « Nos programmes sont implantés au sein d’établissements partenaires à Londres, Berlin… Nous voulons nous implanter au sein d’écosystèmes qui nous ressemblent, là où il y a de l’innovation, de la technologie, cela veut dire, par exemple en Corée du sud, à Taiwan ou encore au Japon. Les entreprises et les anciens nous attendent ».
Des campus à l’étranger. Le mouvement est général : les écoles de management françaises s’implantent partout dans le monde. Fin 2018 emlyon a inauguré un tout nouveau campus à Casablanca, depuis longtemps l’Essec est à Singapour, l’EM Normandie à Oxford, Kedge à Suzhou, où Skema BS possède également un campus de même qu’aux États-Unis (Raleigh) au Brésil (Belo Horizonte) et elle s’implantera début 2020 en Afrique du Sud. « Nous mettons nos campus à la disposition de nos partenaires internationaux pour qu’ils y envoient aussi leurs étudiants. Un exemple : nous sommes partenaire d’une université québécoise dont peu d’étudiants venaient en France. Mais dont beaucoup sont ravis de pouvoir aller aux Etats-Unis. Nous avons ainsi pu rééquilibrer des échanges – que nous réalisons sans aucun flux financier – qui permettent à nos étudiants de se rendre chez nos partenaires », commente Patrice Houdayer, le vice-dean de l’école.
En 2016, Audencia décidait ainsi de s’implanter en Chine : à Shenzhen, une ville nouvelle aux portes de Hong Kong, au cœur de ce qui est aujourd’hui la métropole dont le développement est le plus dynamique dans le monde. « L’Université de Shenzhen avait entrepris des négociations avec différentes business schools dans le monde et nous nous sommes montrés les plus réactifs », explique Christophe Germain, qui dirigeait la SABS (Shenzhen Audencia business school) avant de prendre la direction d’Audencia BS : « Nous n’avons absolument pas pour objectif d’y accueillir tous nos étudiants mais d’y développer certains programmes liés aux spécificités de la ville, par exemple en finance, en innovation ou en entrepreneuriat ». Le tout dans le cadre d’un joint-venture où l’université amène ses locaux – et une partie du financement jusqu’au moment où les comptes s’équilibreront – et Audencia son expertise comme le rappelle Christophe Germain : « Je m’assure que la qualité soit la même qu’à Nantes dans le cadre de programmes délivrés exclusivement en anglais ».
Des implantation à l’étranger qui ne sont pas le modèle auquel s’attache l’Edhec. « Nous n’ouvrirons jamais de campus à l’international car cela n’aurait de sens que si nous étions capables de recruter les meilleurs talents locaux comme ne le faisons en France. Un modèle que seule l’Insead est aujourd’hui en mesure de réaliser. Et après y avoir mis beaucoup de temps », constate Richard Perrin. Même réflexion du côté d’Eloïc Peyrache, directeur délégué d’HEC : « En formation continue, il y a une véritable logique à aller à la rencontre des cadres qui n’ont pas la possibilité de s’éloigner durablement de leur lieu de vie. Mais en formation initiale, je suis intimement convaincu que la reconnaissance de la marque doit précéder l’implantation à l’étranger ». Et d’insister : « Une bonne partie des écoles qui ambitionnent d’avoir une forte reconnaissance mondiale et qui ne respectent pas cette logique doivent admettre des étudiants bien moins bons que ceux qu’ils ont sur leur campus historique. De plus, l’expérience internationale vécue par nos élèves est bien différente. Il est incomparablement plus stimulant et pertinent d’aller passer quelques mois ou même une année en petits groupes dans les meilleures universités du monde entier telles que Yale, Todai, Beida ou New York University que de se retrouver dans un entre-soi, même à l’autre bout du monde ».
Travailler avec des partenaires locaux. S’implanter à l’étranger cela passe, dans la plupart des cas, par un appui sur des partenaires locaux. Depuis exactement vingt ans Grenoble EM est ainsi partenaire de l’Esca EM, une business school de Casablanca qui est aujourd’hui la seule accréditée par l’AACSB (Association to Advance Collegiate Schools of Business) en Afrique francophone. « Nous avons coproduit des diplômes tout en laissant nos deux marques se développer et en remettant nos deux diplômes à nos étudiants ; 1512 très exactement aujourd’hui », remarque Jean-François Fiorina, directeur adjoint de Grenoble EM. Une école qui va maintenant développer une offre d’executive education vers l’Afrique. Toujours avec Grenoble EM. « Nous allons proposer des offres sur mesure pour les entreprises de tout le continent africain même si la priorité sera donnée à l’Afrique francophone », confie le directeur et fondateur de l’Esca, Thami Gorfi, qui insiste sur la valeur de ce type de partenariat : « Notre valeur ajoutée c’est notre capacité à décrypter l’environnement africain. Une école européenne peut faire quelques « coups » mais ne peut pas aller très loin tout seule ».
Toujours au Maroc, encore à Casablanca, emlyon est partenaire de KMR, le leader de l’enseignement supérieur privé marocain. En tout ce sont 90 millions de dirhams (environ neuf millions d’euros) qui y ont été investis pour construire un campus de 5000 m2. Trois ans après s’être installée dans la capitale économique du royaume, l’école s’affirme toujours plus « globale » après ses campus de Shanghai et Bhubaneswar en Inde et en attendant peut-être une autre ouverture en Afrique. « De Saint-Etienne et Paris à Casablanca en passant par l’Inde ou la Chine ainsi que nos partenaires académiques à travers le monde, on peut suivre notre bachelor sur six campus dans le monde. A Casablanca nous remettons même un diplôme visé par la France et un autre homologué par le Maroc », explique Tawhid Chtioui, qui a supervisé la naissance du campus avant de prendre la direction de emlyon.
Le PGE dans un autre environnement. Ces implantations attirent les étudiants qui veulent suivre leur programme Grande école dans un autre environnement. Depuis 2018 les étudiants du bachelor de Skema peuvent ainsi suivre un semestre sur chacun de ses six campus dès la fin de leur premier semestre, le temps en fait d’obtenir un visa d’études pour aller aux Etats-Unis ou au Brésil. C’est ce que l’école a appelé le « 6 x 6 ». « C’est un système qui s’équilibre bien sans que nous ayons besoin de répartir les étudiants en fonction de leur niveau. De plus nous tenons à ce que, dans chaque pays, une grande partie de nos professeurs soient locaux. Ils ne viennent pas dans le même avion que leurs étudiants ! Le tout pour quasiment le même prix dans chaque pays soit 10 000 euros. Un prix ridiculement bas aux Etats-Unis où on se rapproche facilement des 40 000 dollars par an », commente le directeur adjoint de l’école, Patrice Houdayer.
Avec ses six campus en Europe, ESCP Europe est quelque part l’incarnation de l’université européenne que désire voir créer Emmanuel Macron. « Il n’y a qu’à ESCP Europe que tous les étudiants ne peuvent être diplômés qu’à condition d’avoir réalisé un parcours européen. On ne peut pas être diplômé chez nous en ayant seulement étudié à Berlin ou Paris. De plus, nous sommes reconnus et accrédités dans chaque pays par les organismes locaux. Notre formation d’excellence qu’est le MiM permet d’obtenir jusqu’4 grades masters simultanément délivrés dans 4 pays différents », note son directeur, Frank Bournois. Mais ESCP Europe ce n’est pas que des Européens qui travaillent en Europe. L’école un rayonnement international avec 30% d’étudiants venus de Chine, d’Afrique ou des États-Unis. « Autant de nationalités que nous formons à devenir des business leaders européens, au sens culturel et intellectuel du terme, prêts à manager dans la complexité. Ce trait nous semble caractéristique de l’Europe, ce continent unique dans lequel se concentre un maximum de cultures dans un minimum d’espace. Au bout de leurs trois ans d’études, nos étudiants sont vraiment capables de travailler partout dans le monde », conclut Frank Bournois.
Le poids des accréditations. Avant de choisir un établissement, les étudiants internationaux scrutent les accréditations internationales. « Nos étudiants vivent une expérience d’intégration dans la culture locale et les habitudes pédagogiques du pays au sein d’établissements dont la majorité sont accrédités par Equis, AACSB, AMBA ou EPAS. Etre triple accrédités nous facilite la conclusion d’accords avec les meilleures Business Schools », note Delphine Manceau. « Notre double accréditation a facilité le recrutement de professeurs internationaux et la signature d’accords de partenariat avec des universités étrangères elles-mêmes accréditées », renchérit Jean-Guy Bernard, qui a obtenu l’accréditation Equis fin 2016.
S’il faut être présent sur tous les continents, il faut donc aussi l’être avec des partenaires de valeur auxquels les accréditeurs sont très attentifs. « Nous cherchons des partenaires en privilégiant ceux qui disposent d’accréditations internationales. Mais si ce n’est pas possible, par exemple en Europe de l’Est, nous nous fondons sur les classements locaux », explique François Bonvalet. Mais les business schools ne sont pas partout aussi attentives aux accréditations qu’en France, aux Etats-Unis ou en Chine. « Il y a une tradition très technologique en Allemagne qui fait qu’on y trouve encore assez peu de business schools de tout premier rang par rapport à la France ou au Royaume-Uni. Mais elles se développent à Mannheim, Berlin, Coblence, Cologne, etc. Le paysage change. En Europe de l’Est, les programmes de gestion sont le plus souvent intégrés dans des facultés d’économie et peuvent prétendre à EPAS, mais il y a de très grandes institutions à Varsovie (Kozminski), à Ljubljana (faculté de management) ou encore à Saint Petersburg (faculté de management) », détaille le directeur général de l’EFMD, Eric Cornuel.
« Internationalisation at home ». Quand on arrive à Rennes School of Business, il est difficile de ne pas être frappé par le nombre d’étudiants (40% des effectifs) et de professeurs internationaux : plus de 90% ! Brésil, États-Unis, Inde, Allemagne… « Les étudiants étrangers que nous recevons dans nos MSc partagent beaucoup de cours avec nos étudiants du programme Grande École qui, pour beaucoup, sont venus nous rejoindre pour profiter d’une ambiance internationale qui se ressent dès qu’on traverse la cafétéria », commente le directeur de Rennes SB, Thomas Froehlicher. Une volonté de faire venir des étudiants étrangers sur ses campus, en France mais aussi à l’étranger, qu’on retrouve du côté de Skema BS comme l’explique sa directrice, Alice Guilhon : « Faire venir des étudiants internationaux, c’est un modèle qui fonctionne mais prend du temps à se mettre en place. Comme nous l’avons fait, il faut déjà commencer par envoyer ses propres étudiants à l’étranger pour créer de véritables campus. Aujourd’hui, le système est bien rodé et nous sommes submergés de candidatures d’étudiants internationaux de bon niveau : 11 000 pour 1 000 places ».
Le tout est que les étudiants français et étrangers se mêlent les uns aux autres. « Au début, on voit souvent les étudiants français se regrouper entre anciens élèves de prépas, voire de la même prépa, pour créer des associations. Nous soutenons une association pour faire en sorte que tous les étudiants mélangent bien leurs talents dans le cadre des parcours européens », confie Frank Bournois.
Last but not least, encore faut-il que ces étudiants soient satisfaits de leur séjour et poussent d’autres à venir ensuite. Sur le campus de l’ESC Troyes (Yschools) on a, par exemple, décidé que les panneaux indicateurs seraient prioritairement indiqués en anglais. À Rennes SB chaque étudiant étranger est parrainé par un étudiant français dans le cadre d’une association qui les accueille à leur arrivée et facilite leur intégration. Ensuite, ce sera à eux de présenter leur université dans le cadre d’un « International Day ». « Pour recruter un étudiant international, il faut lui trouver un logement. Et imaginez le problème quand il est du Bangladesh et que le loueur demande les trois derniers bulletins de paye de ses parents alors que cela n’existe même pas là-bas. Soit il ne vient pas, soit on gère son cas et on s’occupe de lui brancher le gaz, l’électricité, etc. », détaille le directeur général de Burgundy School of Business, Stéphan Bourcieu.
Un environnement multiculturel. La dimension internationale est de plus en plus prégnante dans toute la pédagogie. Neoma vient par exemple de créer trois nouveaux dispositifs. « Entrepreneurs sans frontières » va permettre à ses étudiants entrepreneurs d’être reçus pendant six mois dans les incubateurs des plus grandes universités comme Jiao Tong à Shanghai ou FGV au Brésil. « Vie associative sans frontières » aux étudiants les plus impliqués dans les associations – qui suivent des cours le matin pour se consacrer à leur association l’après midi – de rejoindre les associations des universités partenaires de l’école. Enfin « Apprentissage sans frontières » donne la possibilité à des apprentis de poursuivre leur mission dans la filiale locale d’une entreprise française tout en suivant les cours de Neoma en e-learning.
Une seule école permet de partir à l’étranger dès le début du programme Grande école : l’EM Normandie. Une vraie motivation pour des étudiants comme Julia, étudiante en troisième année tout juste arrivée à Oxford après sa classe préparatoire : « J’ai choisi l’EM Normandie pour cette possibilité de partir tout de suite étudier à l’étranger, ce qu’elle est la seule à proposer ». « Ils viennent une année entière, c’est plus efficace que seulement un semestre. Ils peuvent même suivre tout leur cursus ici », précise Jean-Guy Bernard, le directeur général de l’école. Il y a maintenant quatre ans que l’EM Normandie s’est implantée à Oxford. Aujourd’hui ce sont 200 étudiants de tous niveaux – ils pourraient être jusqu’à 250 – qui viennent y suivre des cours chaque année. « Nous voulons mettre en place une pédagogie anglo-saxonne et donc faire appel à des professeurs locaux », commente le directeur du campus, Hendrik Lohse qui pousse ses étudiants à aller suivre le monceau de conférences gratuites qu’organisent les différents colleges d’Oxford. C’est aussi cela qu’offrent les business schools à l’international.