Nicole Belloubet présente à la presse les grands dossiers de la rentrée qu’elle souhaiterait « continuer à traiter ». Mais elle « peut également aller cueillir les champignons cet automne ».
« Nous devons assurer jusqu’au bout notre mission y compris les affaires courantes et c’est encore plus nécessaire en cette période d’incertitudes. » Pour sa conférence de presse de rentrée du 27 août la ministre de l’Education nationale, Nicole Belloubet, s’est voulue ferme dans son poste tout en étant bien obligée de répondre que les réponses aux questions des journalistes seraient la plupart du temps apportées par son successeur… Comme toute la société le monde de l’enseignement est en apnée en cette rentrée. Si Nicole Belloubet considère que la question de la réforme du lycée est « maintenant close » les menaces qui pèsent sur Parcoursup dans le programme du Nouveau Front Populaire restent dans les esprits. Qui seront demain les futurs ministres de l’Education, de l’Enseignement supérieur et du Travail ? Quels seront leurs programmes ? Tous s’interrogent.
Les réformes et mesures décisives de la rentrée dans l’Education nationale
Même si cette année la plupart des postes d’enseignants ouverts aux concours ont été pourvus la réforme de leur formation reste un sujet central. Mais voilà, regrette la ministre, leur « structuration avec un concours à bac+3 suivie de deux années rémunérées n’a pas pu aboutir » et « devrait être une priorité du prochain gouvernement ». Pas évident tant la réforme est contestée dans son principe aussi bien dans les Institut nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé) que dans les universités et les partis du Nouveau Front Populaire.
Les textes rendant obligatoires l’obtention du diplôme national de brevet pour entrer au lycée sont prêts mais également « suspendus ». D’ailleurs des stages de « prépas seconde » vont être expérimentés cette année pour des élèves volontaires – un petit millier aujourd’hui – n’ayant pas obtenu le brevet. Le stage en entreprise de fin de seconde est quant à lui maintenu pour 2025. L’enseignement privé sera quant à lui plus contrôlé avec un regard particulier sur le financement par les collectivités. En effet si pas plus de 10% de leur budget peut être financé par les régions il n’y a pas de limite pour les établissements techniques ce qui peut constituer une « manière de biaiser les financements ».
Très critique sur les limites du budget 2025 de son ministère que lui a présenté Bercy, la ministre considère que c’est une « base technique qui peut évoluer » alors que les plafonds proposés « nous contraindraient à une particulière rigueur en raison notamment de la GVT (glissement vieillissement technicité) » : « Ce budget ne correspond pas à nos besoins et devrait a minima être sanctuarisé ».
Enfin c’est crucial pour la ministre en ces temps très délicats pour la sécurité de la communauté juive, Nicole Belloubet a demandé aux recteurs de « redoubler de vigilance pour la sécurité des écoles juives et de leurs abord »
Le Nouveau Front Populaire contre Parcoursup
Comme APB avant lui Parcoursup est ainsi cible de critiques de la part de l’ensemble des partis de gauche au motif notamment de son caractère discriminant. Tout gouvernement tenant grâce à une majorité parlementaire issue plus ou moins du NFP risque de se poser la question de son avenir. Dans la partie de son programme intitulée « Faire une grande loi éducation, enseignement supérieur et recherche (ESR) » le Nouveau Front Populaire entendait en effet « démocratiser l’université en abolissant Parcoursup et la sélection dans l’université publique, instaurer le repas à 1 euro dans les Crous ». Côté recherche il s’agit pour le Nouveau Front Populaire de « créer un statut du jeune chercheur » et de « rehausser le niveau d’investissement public dans la recherche ».
Autant de mesures que le Nouveau Front Populaire prévoyait de prendre dans les 100 jours après son accession au pouvoir dans le cadre d’une grande loi « éducation ». Une loi qui serait sans doute largement inspirée de la proposition de loi déposée en avril 2024 par le député et professeur à Aix-Marseille Hendrik Davi, insoumis dissident mais réélu, qui demandait notamment que chaque lycéen soit « au minimum inscrit de droit dans la filière de son choix à proximité de son lieu d’obtention du bac ou de son lieu de résidence ». Dans sa proposition de loi Hendrik Davi entendait également « supprimer la possibilité pour une université de disposer de la qualification de grands établissements », « instaurer la gratuité des formations de l’enseignement supérieur public » et faire que la « dépense par étudiant doit tendre à être similaire d’une université à l’autre afin que l’affectation dans l’enseignement supérieur par sectorisation ne reconduise pas les inégalités territoriales existantes ». Un projet de loi qui prévoit également la création d’un poste de « délégué interministériel à l’orientation ».
Une suppression de Parcoursup contre laquelle Laurent Champaney, président de la Conférence des Grandes écoles (CGE), s’oppose dans une tribune aux Echos estimant qu’Il faut sauver le soldat Parcoursup. « Ceux qui sont contre Parcoursup sont aussi souvent contre la sélection à l’entrée de l’université. Or c’est le premier outil de la réussite. Orienter un étudiant vers une formation pour laquelle il n’a ni le niveau ni les prérequis est un crime. Il n’est pas non plus très malin d’orienter des jeunes surqualifiés vers des parcours où ils s’ennuieront avant de les quitter », argue-t-il tout en concluant : « Supprimer Parcoursup est un acte antisocial ! »
Les questions en suspens dans le supérieur
On l’a vu la réforme de la formation des enseignants semble encalminée. Un sujet parmi bien d’autres pour l’enseignement supérieur. Quid des décisions sur la création d’un futur label des établissements d’enseignement supérieur privé et du financement de l’apprentissage ? Quel avenir pour le financement de l’apprentissage ?
Et qu’adviendra-t-il des postes de direction de premier ordre toujours en suspens de Sciences Po à PSL sans oublier bien sûr le très politique Hcéres (Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur) pour lequel sont en compétition son président par intérim, Stéphane Le Bouler ,et celui de France Universités, Guillaume Gellé. Une nomination très délicate car elle requiert l’accord du Parlement. En 1863 le journaliste Henri Rochefort estimait que la France impériale de l’époque contenait « trente-six millions de sujets sans compter les sujets de mécontentement ». On en est à combien aujourd’hui ?