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Sciences Po Paris se réforme

Frédéric Mion, le directeur de Sciences Po Paris (lire son portrait en bas de cet article), a présenté un ambitieux plan d’orientation stratégique pour son école intitulé Sciences Po 2022. Nouvelle gouvernance, réforme du premier cycle, achat de nouveaux bâtiments, réorientation des campus, celui a pris la tête de l’IEP de Paris il y a un peu plus d’un an après une longue crise, veut ainsi imprimer sa marque et répondre aux recommandations de la Cour des Comptes ou, plus récemment, de l’Aeres. Le tout en se réinvestissant dans la Comue Sorbonne Paris Cité où la « place de Sciences Po a été quelque peu obérée par les vacances de direction ». Frédéric Mion se donne huit ans jusqu’en 2022, date du 150ème anniversaire d’un institut créé après la défaite de 1870 contre les Prussiens, pour que le « nouveau » Sciences Po voit le jour.

Sciences Po Paris

Répondre aux critiques

En 2008 l’Aeres demandait que Sciences Po passe de de « la grande école à l’université spécialisée et sélective ». Fin 2012, la Cour des Comptes dénonçait une « gestion marquée par de nombreuses anomalies » et provoquait une grave crise au sein de l’institution. Peu avant, en avril 2012, son directeur emblématique, Richard Descoings (photo), décédait à New York. Non prévue par les statuts – jusqu’ici chaque directeur nommait son successeur – sa succession devait donner lieu à bien des rebondissements et la procédure fut sérieusement mise en cause par plusieurs candidats.

Depuis un an les tensions se sont apaisées et le mois dernier, l’Aeres rendait un dernier rapport plutôt encourageant. Notant que le modèle économique de Sciences Po « s’essouffle », insistant sur la « faiblesse » des organes de gouvernance, l’agence se félicitait de leur réforme de façon à refléter la « transformation de Sciences Po en une institution universitaire d’enseignement et de recherche ». Autant de critiques, mais aussi d’encouragements, auxquels Sciences Po Paris entend répondre aujourd’hui.

Une nouvelle gouvernance

« Sciences Po a doublé de taille en dix ans, mais son organisation et son fonctionnement ne se sont pas suffisamment adaptés  à cette dimension », estime Frédéric Mion, qui occupe à la fois le poste de directeur de Sciences Po Paris et d’administrateur de la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP) qui en assure la gestion. Un double rôle historique qui n’a pas forcément vocation à perdurer dans le cadre des nouveaux statuts initiés par le secrétaire général du Conseil constitutionnel, Marc Guillaume, qu’adoptent aujourd’hui la FNSP et Sciences Po. « Nous avons mis au point une procédure de convergence entre les conseils de gouvernance des deux organismes pour converger sur un seul nom mais les deux postes pourront dorénavant être disjoints », explique Frédéric Mion.

Frédéric Mion dirige Sciences Po Paris depuis 2013
Frédéric Mion dirige Sciences Po Paris depuis 2013

Pour répondre aux conseils de l’Aeres et de la Cour des Comptes, les conseils ont été repensés : le conseil d’administration de la FNSP comprendra toujours majoritairement des personnalités qualifiées mais recevra dorénavant également des représentants des enseignants comme des étudiants mais aussi de l’État. Quant au conseil de direction de Sciences Po, il étendra ses compétences à la recherche et à la documentation avec une plus grande place accordée aux enseignants-chercheurs. Enfin des règles de bonne gouvernance ont été adoptées qui prévoient notamment des limites d’âge aux différents postes et que les mandats d’administrateur de la FNSP et de directeur de Sciences Po, toujours de cinq ans, seront limités à deux (trois exceptionnellement).

Diplômes : un « vrai » bachelor, moins de masters, une nouvelle école

Cela ressemble un peu à un retour aux sources du temps où Sciences Po était d’abord un diplôme de bac+3 qui ouvrait à d’autres formations : Frédéric Mion entend donner au bachelor de Sciences Po une valeur qui approche celle des très bons colleges américains et britanniques de façon à que ses diplômés puissent ensuite postuler ailleurs : « Aujourd’hui nous ne pouvons pas recevoir assez d’étudiants « différents », ingénieurs, diplômés de l’université etc., en master car nos propres étudiants sont venus nous rejoindre pour 5 ans ». Certes nous délivrons déjà un diplôme de bachelor mais c’est largement un « bout de papier » sans valeur ». Pour autant, il n’entend pas pour autant obtenir le grade de licence à son diplôme : « Trop long, trop difficile ». Reste maintenant à réfléchir à comment rebâtir un cursus dont la troisième année se déroule aujourd’hui entièrement à l’étranger et représente aujourd’hui un élément d’attractivité essentiel.

Frédéric Mion entend également réformer l’offre de masters, « un peu trop riche et qui doit être clarifiée ». Enfin des nouvelles écoles spécialisées vont voir le jour : une École d’Affaires publiques dès la prochaine rentrée et une autre en Affaires urbaines en 2015.

Olivier Rollot (@O_Rollot)

  • Frédéric Mion, 44 ans, est administrateur de la Fondation nationale des sciences Politiques (FNSP) et directeur de l’IEP de Paris depuis le 29 mars 2013. Ancien élève de l’ENA (promotion Victor Schoelcher 1994-1996) et de l’ENS Ulm, il est diplômé de Sciences Po (1992) dont il fut ensuite responsable de la filière administrative de 1996 à 1999 et où il a enseigné le droit public jusqu’en 2003. Maître des requêtes au Conseil d’État il fut en 1998 rapporteur de la commission Attali, dont le rapport « Pour un modèle européen d’enseignement supérieur » a posé les bases de l’harmonisation européenne des études supérieures. De 2000 à 2001, il fut conseiller technique du ministre de l’Education nationale, Jack Lang, en charge des dossiers budgétaires, statutaires et juridiques. Puis il a occupé de 2001 à 2003 la fonction de directeur adjoint de la direction générale de l’administration et de la fonction publique. En 2003, il a rejoint le cabinet Allen & Overy en tant qu’avocat avant d’en devenir associé à partir de 2005. Enfin, il fut secrétaire général de Canal + de 2007 à 2013.
  • Lire aussi son portrait dans Le Monde au moment de sa nomination : Un pur produit de l’élite française pour Sciences Po et un entretien sur Educpros.
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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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