Le congrès de la Conférence des Grandes écoles (CGE) qui s’est tenu début octobre à Strasbourg avait tout sauf des allures de fêtes. On y parlait en effet essentiellement de rapprochements difficiles avec les universités, dans le cadre des Comue, et de difficultés financières toujours plus importantes dues à la réforme de la taxe d’apprentissage et aux ponctions effectuées par l’État sur les moyens des chambres de commerce et d’industrie dont la plupart des écoles de commerce membres de la CGE dépendent.
Quelle place dans les Comue ?
Le titre du congrès était explicite : « Regroupements de site : à la recherche d’un équilibre entre uniformité et diversité ». Les débats furent francs avec la preuve qu’il y avait autant de situations que de Comue, qu’universités et grandes écoles pouvaient aussi bien s’entendre (Paris Saclay) que se regarder en chiens de faïence (Bordeaux) avec toute une gamme d’entre deux. « Le monde universitaire est centré sur les unités de recherche quand le monde socio-économique est centré sur le développement », analyse Bernard Claverie, directeur de l’École nationale de cognitique de Bordeaux pour expliquer pourquoi la création de la Comue d’Aquitaine peine à se faire : « Toutes les écoles, toutes les universités ont signé les statuts à l’exception de l’université de Bordeaux. Aujourd’hui les universités sont devenues des acteurs politiques qui ont des ambitions politiques ».
Directeur général de Centrale Supélec (lire un entretien plus bac), Hervé Biausser se demande lui tout simplement si on ne se trompe pas de modèle en créant les Comue: « Est-ce que nous ne sommes pas en train de construire le plus beau des avions à hélices alors que c’est le moteur à réaction qui se développe ? Aujourd’hui il faut être agile ! » Ce que président de la CGE, Philippe Jamet, résume d’un « Nous ne voyons pas l’intérêt académique et nous redoutons les intentions politiques ».
« Unis dans la diversité »
Venue conclure les débats, Geneviève Fioraso se félicitait elle que la « Conférence, et les écoles qui la constituent acceptent de partager une même dynamique avec les autres établissements, notamment les universités, les inconvénients de la dualité qui parfois vous a séparés s’effacent devant les avantages d’une diversité enrichissante pour tous ». Et d’insister que les grande écoles peuvent « apporter beaucoup à ces regroupements, notamment par le lien spécifique avec les milieux professionnels, leur approche particulière de la recherche, leur capacité d’innovation pédagogique, leur culture de l’entreprise et de l’entrepreneuriat pour beaucoup ». Le tout pour faire naître un nouvel enseignement supérieur français « uni dans la diversité ».
Insistant sur la nécessaire « réduction des inégalités », qui passe selon elle par le développement de l’alternance, Geneviève Fioraso promet également qu’elle sera « très vigilante » sur l’évolution de la répartition de la taxe d’apprentissage et le nécessaire rapprochement avec les régions « désormais leaders clairement identifiés des modalités de financement ».
La nécessaire augmentation des droits d’inscription
Sous le titre « Le modèle académique de l’enseignement supérieur » un atelier avait particulièrement retenu l’attention des participants. On y parlait notamment de l’augmentation possible des ressources issues de la formation continue, mais sans trop d’espoir selon Florence Darmon, la directrice de l’ESTP : « Faire de la formation continue pour produire du chiffre d’affaires sans marge, cela sert quoi ? » Pas plus que la montée en puissance des fondations, la formation continue n’avait non plus les faveurs d’Yves Poilane, directeur de Télécom ParisTech, qui estimait que « la hausse des frais d’inscription était le seul système soutenable à long terme pour permettre aux écoles d’augmenter leurs ressources ». Une solution d’autant plus logique selon lui qu’on « connaît les catégories socio-professionnelles dont sont issues les parents de nos élèves ».
Un débat depuis longtemps ouvert dans les écoles de management (lire plus bas) mais qui semble arriver à son terme tant les niveaux sont aujourd’hui parvenus à un cap difficile à dépasser. D’où la colère de Xavier Cornu, directeur général délégué enseignement-recherche-formation à la CCI Paris Ile-de-France et, à ce titre, en charge d’HEC ou de l’Essec, qui constate qu’« encore une fois on va nous reprocher notre niveau de frais de scolarité élevé tout en nous obligeant à les augmenter par des mesures qui vont réduire les ressources des grande écoles ».