« Mais ils m’ont construit des amphis mon modulables ! » On se souvient de la réaction de ce directeur d’établissement en découvrant que ses nouveaux – très beaux bâtiments – dont la construction avait été décidée avant son arrivée à la tête de l’établissement dataient d’une ancienne ère pédagogique. Dans sa nouvelle implantation parisienne inaugurée la semaine dernière, le groupe Studialis (ESG, Web School Factory, etc.) a justement préféré des salles modulables et largement remplacé les bonnes vieilles chaises par des chaises à roulette avec repose cahier. Ainsi la salle peut se moduler au gré des besoins des profs : cours puis petits groupes de travail peuvent se succéder. Des matériels comme celui-là on peut en voir beaucoup sur le salon Educatec-Educatice cette semaine à Paris. Plus que jamais la modulation de l’espace est au cœur des nouvelles pédagogies.
Des campus « nouvelle génération »
Face à ceux qui prédisent la disparition des campus avec l’apparition des MOOCs, la communauté universitaire entend répondre par une nouvelle utilisation d’un espace qui reste indispensable pour les étudiants. « Il n’y a pas de doute que l’enseignement se transforme ; le travail à distance va se développer mais j’imagine difficilement des jeunes rester isolés, chacun chez soi, tout au long de leurs études », écrit Yves Epelboin, ancien directeur du service des TICE de l’UPMC, sur son blog. Bref, selon lui, le campus doit « être pensé pour ceux qui le fréquentent » avec la « mise à disposition d’un bureau pour chaque enseignant » et des « lieux de sociabilité ».
L’université Toulouse 3 Paul-Sabatier, la grande université scientifique de Toulouse, va ainsi construire entre 2017 et 2019 un nouveau campus qu’elle veut exemplaire tant sur le plan énergétique que pédagogique. Son IUT de Montauban travaille ainsi sur ce que devrait être la « salle de cours du futur ». « Cette évolution n’est pas liée à l’accroissement des effectifs, explique son président Bertrand Monthubert (lire l’entretien complet cette semaine). Si nous changeons les pédagogies, c’est pour répondre aux besoins d’étudiants qui ont un rapport différent au savoir, dans une société où les besoins en compétences évoluent. Nous voulons familiariser très vite nos étudiants aux pratiques collaboratives et au travail scientifique. »
Des cours de plus en plus interactifs
« Les 1000 étudiants de première année du domaine des sciences fondamentales et appliquées de Toulouse 3 vont peu à bénéficier de pratiques innovantes, explique encore Bertrand Monthubert : pédagogie inversée, cours dynamiques avec l’utilisation de boitiers interactifs ou de smartphones qui permettent de poser régulièrement des questions aux étudiants pour vérifier s’ils suivent bien les explications de l’enseignant. »
L’Essca (Angers-Paris) a ainsi créé des salles de classe dite intelligentes appelées PECT (Pédagogie en Environnement Collaboratif et Technologique). Quatre salles aménagées et équipées de façon à renforcer l’interactivité entre le professeur et les élèves mais aussi entre les élèves et à vérifier, en temps réel, la bonne acquisition des connaissances. Des vidéo-projecteurs et des écrans blancs installés offrent une vision à 360° pour tous les îlots de travail collaboratif qui sont eux-mêmes de forme ronde. Des « mini-quiz » réguliers envoyés sur tous les ordinateurs des étudiants donnent la possibilité aux professeurs d’obtenir des statistiques anonymes et immédiates. « Ces outils permettent à l’enseignant de passer facilement d’un registre pédagogique à un autre (cours magistral, exercices individuels, mini-travaux de groupe, etc.) et de relancer ainsi l’attention des étudiants », confie Stéphane Justeau, le directeur de valorisation de l’enseignement de l’école.
Des enseignants de plus en plus intéressés
L’Essca constate un réel engouement des professeurs pour ses salles à tel point qu’il est aujourd’hui indispensable pour ses enseignant de réserver à l’avance un créneau pour y avoir accès. « Il y a une véritable dynamique de transformation pédagogique qui dépasse le seul accompagnement des initiatives des enseignants les plus impliqués », se réjouit également Bertrand Monthubert, qui veut aujourd’hui toucher beaucoup d’étudiants et plus seulement mettre en avant quelques « pépites » pédagogiques qui en concerneraient 30 sur 30 000.