Créées en 2004 les Ecoles de la deuxième chance (E2C) ont depuis accompagné 70 000 jeunes « décrocheurs » vers un emploi. « Nous recevons des jeunes qui ont en moyenne 20-21 ans, mais peuvent en avoir 28, qui sont déscolarisés et sans emploi depuis des années et manifestent une vraie volonté de « raccrocher » », explique le président et fondateur du réseau E2C, Alexandre Schajer.
Remise à niveau
Chaque année 15 000 jeunes intègrent un réseau de quelques 51 écoles sur 118 sites dans toute la France. Les première semaines – trois à sept selon les cas – permettent de tester la véritable envie des jeunes à raccrocher. « Attention, nous ne leur donnons pas tout de suite des cours de maths ou de français, ce qu’ils ont toujours détesté et qui les ferait fuir, mais une approche par les compétences avec par exemple la projection d’un film sur lequel ils doivent ensuite réagir par écrit », explique encore le président.
En tout les jeunes passeront au cours des cinq à sept mois de leur formation 60% de leur temps au sein de l’école – « Il leur faut un lieu physique dans lequel ils pourront affirmer avoir étudié comme tout les monde » – pour une remise à niveau des savoirs essentiels (maths, français, informatique) et une meilleure connaissance du monde contemporain. Tout au long de leur parcours ils sont encadrés par des permanents des écoles qui ne suivent chacun pas plus de quinze dossiers.
L’école puis l’entreprise
Leur motivation validée, les jeunes partent ensuite en stage dans plusieurs entreprises consécutives pour valider peu à peu quelles sont leurs compétences et vers quels métiers ils veulent finalement aller. « Nous n’avons pas de mal à trouver des entreprises qui nous connaissent bien maintenant et savent que nos stagiaires sont murs et surs de leur projet », commente le directeur général du réseau, Cyrille Cohas-Bogey. De plus celles-ci apprécient à la fois de jouer un rôle social et de faire éclore des vocations pour des métiers dans lesquels elles ont beaucoup de mal à recruter. Carrefour vient ainsi de signer un partenariat très prometteur avec le réseau E2C car ses besoins de recrutement en personnels d’un faible niveau de qualification – on manque terriblement de bouchers ou de poissonniers par exemple – sont très importants. Le bâtiment, la restauration, la sécurité sont ainsi les secteurs les plus motivés par le dispositif.
En tout les stagiaires passeront 40% de leur temps dans les entreprises. « Tout est individualisé en fonction des besoins spécifiques de chacun et de leur intégration dans les entreprises. S’ils le souhaitent – c’est le cas de 65% d’entre eux – nous les suivons encore pendant 1 an après la fin de leur stage », spécifie Alexandre Schajer.
La concurrence d’autres dispositifs
Stagiaires les élèves touchent 350 € par mois. C’est à dire… 150€ de moins que ceux qui touchent le dispositif lancé en 2016 par le gouvernement de « garantie jeunes », un dispositif proche dans son esprit et surtout plus rémunérateur. « 150 € de plus vous imaginez ce que cela représente pour un jeune en difficulté. Résultat, et pour la première fois depuis le lancement des E2C, nous stagnons dans la croissance de nos effectifs », regrette Alexandre Schajer. La concurrence est d’autant plus rude que les Missions Locales sont à la fois chargées de délivrer la « garantie jeunes » – et jugés sur leur développement – et d’orienter les jeunes vers tel ou tel dispositif. « Il y a trois ans la Cour des Comptes conseillait dans un rapport de simplifier le millefeuilles des aides mais le gouvernement a fait exactement le contraire », constate encore le président.
Tous ces dispositifs sont également en concurrence pour obtenir les financements des Etats et des régions qui contribuent aujourd’hui respectivement à hauteur de 32 et 28% au budget des E2C, les 40% restants étant abondés par les entreprises, les autres collectivités locales et la taxe d’apprentissage. Autant de sujets qui vont sans doute être traités maintenant dans le cadre de réforme de la formation professionnelle que le gouvernement a entrepris et qui devrait aboutir sur un projet de loi début 2018.
- Au terme de leur parcours dans une École de la 2e Chance, d’une durée moyenne de 6,5 mois, 55% des stagiaires trouvent un emploi ou une formation. Les sorties qualifiantes ou diplômantes, incluant les contrats en alternance, représentent 66% des sorties durables. Les emplois de plus de 6 mois ainsi que les contrats aidés représentent 34% des sorties durables.
- Lire la note de la Dares du ministère du Travail : L’École de la 2e chance, la « grande école » des décrocheurs motivés