« La CPU n’a-t-elle pas mieux à faire que de véhiculer des clichés sur les grandes écoles ? », rétorque le président de la CGE, Philippe Jamet au communiqué de la CPU intitulé Non au hold-up sur le master ! dans lequel cette dernière s’opposait frontalement à la CGE et à sa volonté d’ouvrir plus largement le droit à la délivrance du master. Rappelant qu’à son sens « seules les universités remplissent les conditions posées par la loi dans le cadre du monopole de collation des diplômes reconnu à l’État » la CPU dénonçait en effet « derrière ce recours et les arguties juridiques qui l’accompagnent le parti pris d’introduire une logique mercantile ». Depuis Bruno Sire (université Toulouse 1) et Loïck Roche (Grenoble EM et Chapitre des écoles de management) ont également pris la parole.
La CGE engage le fer
D’après la définition précisée par l’arrêté d’avril 2012, » le diplôme national de master est un diplôme national de l’enseignement supérieur conférant à son titulaire le grade de master». Le DNM comprend plusieurs catégories dont les masters internationaux, qui ont servi de point de départ à la contestation de la CGE. Selon des arrêtés de 2002 et 2014 la capacité à délivrer les masters est en effet restreinte aux établissements possédant le statut d’EPSCP (établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel) ou d’EPA (établissement public administratif) c’est à dire essentiellement les universités et 37 écoles d’ingénieurs publiques. Après avoir écrit plusieurs fois au MENESR sans recevoir de réponse, la CGE a demandé le 7 avril 2015 au Conseil d’État de mettre fin aux « discriminations concernant la délivrance du DNM » et l’abrogation des deux arrêtés susnommés (lire le communiqué).
Mais là où le débat est devenu violent c’est, qu’au-delà des masters internationaux, la CGE conteste dans son recours « l’idée même que la délivrance d’un diplôme national de master puisse être conditionnée par un statut » et demande « l’abrogation de l’actuelle législation qui empêche des établissements publics ou privés de premier plan de délivrer ce type de formations ». La CGE souhaite ainsi « mettre fin à une hiérarchisation des établissements privés ou publics, universités ou écoles » et demande que « tout établissement d’enseignement supérieur soit éligible à la délivrance du diplôme national de master, sous réserve de justifier des critères d’accréditation par l’État qui détient le monopole de la collation des grades et titres universitaires ».
Casus belli pour la CPU !
La CPU ne pouvait pas laisser passer la revendication de la CGE sans réagir : le monopole de la délivrance du master fonde sa stratégie. Pour autant la violence de sa réaction (« hold-up », « mercantile ») en a surpris plus d’uns. Après des années de bisbille, les relations entre les deux conférences semblaient en effet apaisées depuis qu’elles faisaient front commun contre le gouvernement. C’était oublier que, passée la question des fonds de roulement, il allait bien falloir passer à la mise en marche effective de Comue dans lesquelles les sujets de friction entre universités et grandes écoles risquent encore d’être nombreux.
Dans cet esprit, le président de l’université Toulouse 1 Capitole et grand pourfendeur devant l’éternel des grandes écoles, Bruno Sire, estimait dans l’AEF que « si les grandes écoles pouvaient demain délivrer le diplôme de master, cela conduirait à sa dévaluation (qualité et réputation) ». Pour lui « il n’y a pas de recherche dans les grandes écoles et des recrutements sans respect de l’exigence nécessaire d’enseignants-chercheurs ». Ce à quoi Loïck Roche, le président du chapitre des écoles de management de la CGE, répond dans une lettre ouverte publiée sur son blog que « toute attaque portée contre les grandes écoles, ou contre l’université, c’est activement détruire l’enseignement supérieur dans son ensemble ». La guerre CGE/CPU semble décidément lancée alors que les élections à la présidence de la CGE auront lieu dans quelques semaines.