ECOLE D’INGÉNIEURS

«L’entrée de Supméca parmi les membres du Groupe ISAE est la reconnaissance de sa qualité»

Il faut maintenant l’appeler ISAE-Supméca. L’école de mécanique située à Saint-Ouen aux portes de Paris vient d’adhérer au groupe ISAE. Directeur de l’école depuis maintenant un an Philippe Girard revient avec nous sur sa stratégie.

Olivier Rollot : Supméca devient aujourd’hui ISAE-Supméca. Pourquoi aller encore plus loin dans votre intégration au sein du groupe ISAE qui, je le rappelle, a « vocation à fédérer en France les écoles du domaine de l’ingénierie aéronautique et spatiale sous une bannière commune » ?

Philippe Girard : Depuis 2018 Supméca faisait partie des écoles partenaires avant de devenir une école associée. Depuis le 24 mars 2021 elle est l’une des trois écoles membres, portant la marque ISAE, avec SupAéro et l’Ensma. Cette entrée dans le cercle des membres du Groupe ISAE est la reconnaissance de la qualité de sa formation, de sa recherche et de ses relations partenariales. Nous sommes également proches de CY Paris-Cergy Université en faisant partie de CY Alliance, ce qui nous inscrit également dans une démarche territoriale.

O. R : Mais ISAE-Supméca ce n’est pas qu’une école d’aéronautique ?

Ph. G : Revenons un peu aux sources. En 1948 l’Institut supérieur des matériaux et de la construction mécanique (ISMCM) comme école d’application de l’Ecole polytechnique. En 1956 est créée une école d’ingénieurs rattachée à l’ISMCM, le Centre d’études supérieures de techniques industrielles (CESTI), plus communément appelée Supméca. Son modèle est à l’époque totalement original en alternant les cours et les stages en entreprise. En 1994 le CESTI s’implante à Toulon. En 2003 l’établissement change de nom et devient l’Institut supérieur de mécanique de Paris.

Aujourd’hui ISAE-Supméca se définit comme une école de référence en ingénierie mécanique et digitale. Nous formons des ingénieurs de conception qui sont également capables de mettre en action des systèmes de production et de logistique. Comme vous le voyez même si 55% de nos diplômés travaillent dans le domaine aéronautique et spatial ce n’est pas leur seule destination.

O. R : ISAE-Supméca est toujours une école parisienne. Ce qui n’est plus si courant aujourd’hui. Pas de déménagement à vous.

Ph. G : Après la fermeture de notre centre de Toulon nous sommes effectivement uniquement présents à la toute proche périphérie de Paris, à Saint-Ouen, dans des locaux historiques que nous comptons bien conserver. D’autant que la moitié de notre campus se situant sur la Zac du futur village olympique Paris 2024 nous y bénéficierons d’une nouvelle résidence étudiante, d’un nouvel espace de restauration et d’accès en transports en commun très performants (Métro ligne 14). C’est une coopération très positive pour nous. Comme avec la mairie de Saint-Ouen qui nous soutient.

O. R : Quel profil d’élèves recrutez-vous ?

Ph. G : Sur le Concours Commun INP nous recrutons essentiellement des élèves issus de classes préparatoires MP, PC et également PSI. Il nous faut des jeunes capables de performer en mathématiques et physique et donc moins en PT ou TSI. Chaque année nous recrutons 150 élèves en classe préparatoires et cinquante en admission sur titre titulaires d’un BTS ou d’un DUT. Ces derniers suivent notre cursus en apprentissage.

Nous allons d’ailleurs élargir ce recrutement en apprentissage avec la nouvelle filière aéronautique commune aux trois écoles du Groupe ISAE qui sort sa première promotion. Les étudiants y suivent deux années de cours communs à toutes les écoles puis une année propre à chacune.

Nous n’avons pas de projet de bachelor. En revanche nous mettons en place avec l’école interne CY Tech un cycle pré-ingénieur dans lequel nous délivrerons le parcours ingénieur mécanique à 35 étudiants dont certains pourront intégrer ensuite notre cycle ingénieur.

O. R : La question est incontournable. Quel bilan tirez-vous de cette année de crise sanitaire ?

Ph. G : Nous pouvons aujourd’hui recevoir 20% de nos élèves, notamment durant les travaux dirigés et les travaux pratiques. Un tiers des enseignements ont lieu par projets et nous avons pu les poursuivre grâce au déploiement du numérique dans l’école. Alors que les outils de simulation que nous utilisons nécessitent beaucoup de puissance de calcul nous avons appris à les proposer à tous nos étudiants à distance. Et par ailleurs nos associations étudiantes ont su conserver le lien avec tous nos étudiants. Cela nous a également amené à réfléchir à comment mieux partager et échanger.

O. R : Vos pédagogies vont évoluer ?

Ph. G : J’ai lancé une refondation de nos formations. Notamment pour répondre aux attentes de générations d’étudiants qui demandent plus de responsabilisation. A devenir acteurs de leur formation. Aujourd’hui un tiers de nos apprentissages se fait par stage et projets. Nous pouvons aller plus loin en construisant des profils de compétences des étudiants qui vont être individualisés. Pour que nous étudiants puissent mieux développer leur projet professionnel tout en acquérant les compétences indispensables, nous allons également généraliser l’emploi de portfolio de compétences. Enfin nous ouvrons un incubateur d’entreprises, ouvert à tous les profils, pas seulement à nos étudiants, à la rentrée 2021.

O. R : Comment intégrez-vous les dimensions environnementales et sociétales dans vos enseignements ?

Ph. G : ISAE-Supméca est labellisée Développement durable et Responsabilité sociétale (DD&RS) depuis 2015. Nous formons des ingénieurs responsables. Notamment pour le secteur aéronautique à un moment où il est crucial d’investir dans la recherche et l’innovation. Des efforts qui tirent tous les secteurs industriels vers le haut, du ferroviaire, de l’automobile à l’énergie. Déjà la consommation énergétique des moteurs d’avion a été réduite de 25%.

O. R : L’heure est de nouveau à l’innovation dans l’aéronautique ?

Ph. G : Nous sommes entrés dans un cycle d’innovation de rupture avec des enjeux très forts de reconception, d’économies d’énergie et d’intégration de nouvelles technologies.

O. R : La crise touche particulièrement la filière aéronautique et spatiale. Comment vos diplômés se sont-ils positionnés sur le marché de l’emploi en 2020 ?

Ph. G : Globalement ils ont trouvé du travail à 90% même si cela a été un peu plus long que les autres années. 10% ont également décidé de poursuivre en thèse. C’est-à-dire quasiment le double que les autres années. Nous n’avons pas non plus eu de problèmes pour fournir des stages, même si cela s’est révélé un peu plus compliqué pour les stages ouvriers avec beaucoup d’entreprises en télétravail. Enfin les entreprises ont globalement toujours recours à l’apprentissage. Les entreprises du Gifas (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales) nous ont particulièrement soutenu.

O. R : Parlez-nous un peu de vous. Il y a maintenant un an que vous dirigez ISAE-Supméca après une carrière universitaire.

Ph. G : Après l’ENS Cachan, une agrégation, un doctorat et une habilitation à diriger des recherches en mécanique j’ai effectivement été professeur à l’université de Bordeaux depuis 2005. Mais j’ai également été détaché de 2016 à 2020 auprès de l’École de l’air en tant que directeur général de l’enseignement et de la recherche. Au côté du général dirigeant l’école nous avons fait de l’École de l’Air un EPSCP (établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel) de type grand établissement.

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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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