Université généraliste, Versailles Saint Quentin en Yvelines (UVSQ) propose aussi bien des cursus en médecine qu’en histoire, en biologie ou en DUT à ses 19 000 étudiants. Elu à sa tête en 2012 Jean-Luc Vayssière est un président communicant, que ce soit sur son blog ou sur Twitter (@JL_Vayssiere), qui trace le portrait d’une université à laquelle on donne de plus en plus de missions sans toujours lui donner les moyens nécessaires.
Olivier Rollot : Comment définiriez-vous le rôle d’une université comme la vôtre, de création récente, pas parisienne mais proche de Paris, généraliste mais ne proposant pas toutes les spécialités ?
Jean-Luc Vayssière: L’UVSQ a développé une offre de formation généraliste de proximité en licence qui répond bien aux besoins des lycéens, des formations professionnalisantes en lien avec le tissu économique (mécatronique, chimie, développement durable, éco-construction), et une offre en master spécialisée sur nos niches de compétences en recherche.
O. R : Même généraliste une université comme la vôtre se doit d’avoir des pôles d’excellence. Quels sont-ils ?
J-L. V : Si nous recevons près de 40% d’étudiants extérieurs à notre université en master c’est effectivement parce qu’ils viennent chercher chez nous certains enseignements sur lesquels nous nous sommes particulièrement bien positionnés. Je citerai par exemple les sciences de l’environnement, l’arbitrage international en droit, la chimie cosmétique (avec l’Isipca), la cryptologie, l’algèbre appliqué en mathématiques, etc. Pour autant nous ne pouvons pas conduire à tous les domaines et devons plutôt nous concentrer sur des créneaux où ne sommes pas en concurrence frontale avec les grandes universités parisiennes.
O. R : Justement, avez-vous bien toujours les moyens de vos ambitions ?
J-L. V : Nous sommes au contraire sous dotés : le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche estime à 200 le nombre de poste qu’il nous manque. La répartition des moyens des universités répond à une seule logique : plus elles sont anciennes, mieux elles sont dotées. Nous avons été créées en 1991 et nous sommes donc une des plus récentes… Au final, les taux d’encadrement peuvent varier du simple au double entre les universités récentes et les plus anciennes. La LRU (loi sur la responsabilité des universités) n’a fait qu’entériner cet état de fait.
O. R : Moins de moyens mais des objectifs toujours plus élevés, notamment en termes de réussite des étudiants ?
J-L. V : On nous en demande effectivement toujours plus sans nous en donner les moyens. Comment gérer les attentes sociales de réussite quand on doit accueillir les étudiants les moins armés avec des dotations deux fois inférieures à des classes préparatoires qui sélectionnent leurs élèves ? Donnez-nous les moyens des écoles et nous ferons aussi bien qu’elles. Le problème est que les classes dirigeantes ne sont jamais allées à l’université, du moins en premier cycle, et ne sont donc pas sensibilisées à ses enjeux.
O. R : Justement, comment leur expliquer, expliquer à tous, la plus-value de l’université ?
J-L. V : La plus-value des universités c’est clairement la recherche, l’innovation et la qualité des enseignants. Il ne s’agit pas juste pour nous de transmettre des connaissances, mais que la création de nouvelles connaissances par la recherche enrichisse les contenus pédagogiques délivrés, et ce, dès la première année. Aucun enseignant ne choisit d’aller enseigner en classe préparatoire s’il peut entrer à l’université. C’est un paradoxe que les étudiants les mieux sélectionnés n’aient pas face à eux les meilleurs chercheurs.
O. R : Autre sujet qui préoccupe les étudiants après leur licence. Être admis en première année de master (M1) ne donne pas de garantie sur une poursuite en 2e année (M2). Ne faudrait-il pas sélectionner les candidats dès le M1 pour leur éviter de se retrouver sans M2 comme c’est parfois le cas ?
J-L. V : Pratiquement aucun de nos étudiants de M1 ne se retrouve jamais sans affectation en M2. Pour autant, ils ne sont pas forcément admis dans la spécialisation qu’ils demandent. Prenons l’exemple de l’histoire : nous avons 80 étudiants en M1 mais n’en admettons que 20 dans notre M2 « archives », dont certains viennent d’un M1 hors UVSQ. En admettre plus ne permettrait plus que ce master conduise à 100 % d’embauche dans les trois mois après la sortie. Nos masters 1 conduisent donc à une large palette de M2.
O. R : Vous possédez deux IUT. Comment jugez-vous le débat actuel sur la question de la place que devraient s’y voir réservée les bacheliers technologiques ?
J-L. V : Dans certains DUT, notamment scientifiques, nous manquons plutôt de candidats. Mais est-il logique d’envoyer des bacheliers technologiques en licence générale, où ils ont souvent du mal à réussir, quand certains IUT sont eux devenus des sortes de « classes préparatoires bis » qui ne reçoivent que des bacheliers généraux ?
O. R : L’échec en première année d’études de santé (PACES) reste l’un des points noirs de l’université. La loi en préparation actuellement sur l’enseignement supérieur devrait vous permettre d’expérimenter de nouvelles manières de juguler ces échecs. Avez-vous déjà des idées ?
J-L. V : Nous recevons pour notre part 880 étudiants en première année d’études de santé pour seulement 120 places en deuxième. Il existe heureusement des passerelles, vers les études de kinésithérapie par exemple, mais nous voudrions inverser la problématique : faire entrer certains étudiants d’abord dans une licence scientifique avant de les orienter ensuite en médecine.