Au cœur de la loi à venir sur l’enseignement supérieur et la recherche se trouvent les « communautés d’universités » (devenues « scientifiques » dans la dernière mouture en date de l’avant-projet de loi et pouvant prendre le nom de communauté d’universités « si elle comprend parmi ses membres au moins une université »). Geneviève Fioraso entend en effet faire « éclore une trentaine de sites signataires pour leur territoire d’un contrat de site avec le Ministère ». Trente communautés dont les pouvoirs et la gouvernance sont aujourd’hui au centre de toutes les attentions.
« Rien ne PRES » semble dire la CGE
La remise en cause des pôles de recherche et d’enseignement supérieur, ces fameux PRES qui réunissent aujourd’hui l’ensemble des universités et la plupart des grandes écoles dans des structures communes, provoque bien des inquiétudes. « Cela a été un travail gigantesque de nous réunir. Pourquoi faudrait-il déjà casser tout ce qui a été fait pour repartir dans de nouvelles négociations? », demande Pierre Tapie, le président de la Conférence des Grandes écoles, peu enclin à voir supprimer les EPCS (établissement public de coopération scientifique) et les FCS (fondations de coopération scientifique), créés en 2006, pour intégrer de nouvelles structures dans l’année à venir, le délai fixé par la loi : « Il faut nous laisser encore trois ou quatre ans pour voir comment ils évoluent ». Une position que rejoint la Cdefi (Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs) qui « demande que la transition ne soit pas automatique et qu’il soit proposé des modalités pour les PRES n’ayant pas modifié leurs statuts dans le délai d’un an comme prévu par la loi ».
Une gouvernance trop faible ?
Si la CGE n’est guère pressée de changer de structure c’est aussi parce qu’elle ne se retrouve pas dans leur gouvernance. « Bien sûr qu’il faut qu’il y ait des personnalités extérieures aux établissements dans la direction des futures communautés, mais il faut aussi que leur fonctionnement ne soit pas marqué par l’instabilité qu’on trouve parfois dans les universités », reprend Pierre Tapie, qui demande donc que les directions des établissements membres soient majoritaires dans les conseils d’administration des communautés, alors que la loi prévoit aujourd’hui qu’ils seront minoritaires (40%). « Sinon les établissements hésiteront beaucoup à déléguer des responsabilités à une communauté qui pourra tout changer et le dispositif prévu aura l’effet inverse de ses intentions », fait encore remarquer Pierre Tapie. Néanmoins satisfait d’avoir appris que les communautés ne géreront que ce qu’on leur déléguera quand une mouture précédente du texte de loi semblait dire le contraire et leur donner des prérogatives beaucoup plus large. Comme la Cdefi, qui se réjouit du « maintien des règles de gouvernance actuelle pour les écoles d’ingénieurs publiques du Ministère qui le souhaiteront ».
Le sujet des prépas
Les prépas. Le mot qui pourrait bien fâcher tout le monde est lâché. « Reconnaître leur participation pleine et entière à l’enseignement supérieur c’est leur faire justice, leur demander de signer des conventions avec les établissements d’enseignement supérieur, on peut l’entendre, mais avec tous les types d’établissement, pas seulement les universités », réclame Pierre Tapie, constatant par exemple que la moitié des enseignants-chercheurs en économie-gestion sont dans les écoles de management et qu’il « serait donc logique que ce soit en leur sein que les élèves de prépas soient inscrits ».
Les semaines à venir donc d’être fertiles en rebondissement et le jeune (45 ans) rapporteur du futur projet de loi relatif à l’Enseignement supérieur et la Recherche, Vincent Feltesse, député de la Gironde et Président de la Communauté urbaine de Bordeaux, aura à faire preuve de l’habileté qu’on lui reconnaît généralement – lorsqu’il était professeur à l’IEP de Bordeaux il y enseignait la communication publique et politique – pour faire adopter un texte qui ne mécontente pas (trop) tout le monde.