- Tout l’été nous vous proposons de retrouver des grands entretiens publiés sur ce blog en 2014-2015 et qui présentaient des stratégies d’établissements.
Présents sur tout le territoire, les instituts d’administration des entreprises (IAE) sont un acteur majeur de la formation des professionnels de la gestion en France, en formation initiale tout autant qu’en formation continue. Directeur de l’IAE Lyon et président d’IAE France, qui regroupe 32 IAE, Jérôme Rive revient sur les missions des IAE.
Jérôme Rive : Nous avons créé une dynamique que nous nous appliquons à renforcer. Par exemple en ce moment avec un concours quizz « Avez-vous l’esprit IAE » permettant de gagner un voyage à Montréal. L’esprit IAE auquel nous tenons se crée aussi avec la montée en puissance du programme IAExchange, qui permet à un étudiant d’avoir une mobilité nationale d’un IAE à l’autre lors de son cursus de master. Nous sommes également présents ensemble dans les salons internationaux. Enfin nous organisons bientôt un séminaire doctoral pour accompagner les doctorants des IAE dans une approche transdisciplinaire de leurs recherches.
O. R : Parce qu’on manque de doctorants qui deviendront les futurs enseignants en gestion. Une situation tout à fait unique quand on voit les autres disciplines universitaires descendre dans la rue pour demander plus de postes d’enseignants.
J. R : Les sciences de gestion se sont développées dans les années 70 et 80 avec notamment le soutien dles bourses Fnege. Résultat, la pyramide des âges des enseignants-chercheurs des sciences de gestion est aujourd’hui marquée par de nombreux départs à la retraite que nous devons compenser. Mais pour cela il faut convaincre des jeunes d’aller vers le doctorat alors que les rémunérations restent faibles ds les carrières d’enseignement et de recherche pour les juniors.Pour cela nous voulons agir dès avant la thèse pour que le travail réalisé, notamment dans le cadre d’un contrat Cifre, soit mieux valorisé. Certains docteurs sont encore en décalage avec le marché du travail réel. C’est aussi la responsabilité sociétale des IAE d’être des « passeurs » d’information.
O. R : Vous vous définissez aussi comme des « passeurs » entre les sciences de gestion et les autres disciplines universitaires.
J. R : Avec notre diplôme « historique » qu’est le master Management et Administration des Entreprises (MAE), c’est dans la vocation des IAE de rapprocher les ingénieurs des sciences de gestion A l’IAE Lyon nous le validons avec nos partenaires ingénieurs de l’Insa, CPE ou encore l’Ecam. Mais il n’y a pas qu’avec les ingénieurs que nous travaillions. Nous avons ainsi créé un master pour les inspecteurs de la santé publique vétérinaire avec l’ENSV et VetAgro Sup. La 5ème année de Sciences Po Lyon peut se dérouler dans l’un de nos masters et nous avons un double diplôme avec la faculté de lettres. Cela crée une véritable mixité dans nos cursus. Le tout dans une volonté de diversité sociale qui est, là aussi, dans nos missions. Comme les Insa, les IAE doivent en effet leur création à Gaston Berger.
O. R : Une autre de vos missions principales est la formation continue. Aujourd’hui tout le monde veut la développer mais, dans les IAE, il y a longtemps que c’est une réalité.
J. R : La formation continue fait effectivement partie de notre ADN : l’autonomie dont nous disposons nécessite de développer nos ressources propres. Si nos diplômes nationaux sont très demandés, nous sommes aujourd’hui plus offensifs dans des offres qui vont au-delà pour attirer des entreprises qui ne pensaient pas forcément à nous. Nous sommes aussi attentifs aux effets de la réforme de la formation continue qui va, entre autres, générer une nouvelle liste de formations agréées pour le financement par les entreprises. La formation continue est un univers de forte concurrence qui demande une réactivité qui demande parfois de faire un grand écart avec notre univers administratif.
O. R : Que représente exactement la formation continue dans la structure du chiffre d’affaires de l’IAE Lyon ?
J. R : Un tiers si on ne prend pas en compte les contrats de professionnalisation mais les trois quart avec eux. Toutes nos dernières formations ont été montées sur ce format car l’alternance offre un taux de transformation directe vers l’emploi de plus de 60%. Mais pour cela notre service emploi-carrières travaille beaucoup à l’adéquation étudiant/entreprise.
O. R : Vous montez des contrats de professionnalisation à quel niveau ?
J. R : D’abord en licence professionnelle mais aussi en master 1 et 2 et dans toutes les formations à l’expertise comptable pour lesquelles il y a une énorme demande.
O. R : Vous trouvez facilement des enseignants pour toutes ces actions de formation continue et d’alternance ?
J. R : Nos enseignants se passionnent pour les formations en alternance. Enseigner à des alternants c’est participer au passage d’un jeune professionnel dans le monde du travail, c’est l’aider à trouver les ressources théoriques nécessaires à son intégration. Nos enseignants apprécient aussi beaucoup de travailler avec des entreprises qui leur donnent l’occasion de rencontrer de vrais cas d’entreprise qui vont nourrir ensuite leur propre réflexion. Ce n’est pas le même métier que la formation initiale, qui n’est pas non plus identique à la formation continue pour adultes.
O. R : Quelles grandes différence y a-t-il ?
En formation continue, il faut être investi dans une pédagogie interactive qui permet à chaque professionnel de débattre. Il faut donc trouver des enseignants très à l’écoute et à l’aise quand on les remet en questions. Ce sont des postures difficiles. Ici, en complément d’expertises d’enseignants chercheurs, l’utilisation des professeurs associés prend tout son sens :ils ont des expertises de premier niveau associées à ce rôle de passeur, de facilitateur entre les univers académiques et socio-économiques. Par ailleurs, nous insistons beaucoup pour que nos enseignants-chercheurs publient un résumé managérial de leur travail dans leurs productions académiques.