« Ce n’est pas le tout de faire des lois, aussi bonnes soient-elles. Encore faut-il s’assurer qu’elles soient applicables sur le terrain », écrit Véronique Soulé dans Libération en constatant que la loi sur les stages était tout simplement inapplicable pour les élèves des filières du travail social. Mais bien d’autres dossiers restent en suspens.
Des Comue en retard
Tous les statuts des Comue devaient être approuvés le 22 juillet et leur fonctionnement démarrer le 1er janvier 2015. On en est aujourd’hui bien loin puisque des projets comme celui de la Comue Bretagne Pays-de-la-Loire ne verront le jour qu’un an plus tard (lire l’entretien avec Guy Cathelineau, président de Rennes 1 plus bas). Mais bien d’autres Comue peinent à voir le jour entre bisbilles internes (Hesam) ou querelles grandes écoles/universités (Bordeaux, Lille, etc.).
Tout cela sans qu’on sache exactement à quoi elles serviront. Dans une tribune des Échos intitulée Il faut aller plus loin dans la réforme des universités, l’ancien conseiller de Nicolas Sarkozy pour l’enseignement supérieur Bernard Belloc les décrit comme « une couche administrative inutile ». Selon lui, « le carcan institutionnel imposé à tous n’ajoutera aucune capacité d’action supplémentaire et ne créera aucune volonté de coopérer là où il n’y en a pas ».
Un HCERES incertain
L’Aeres a été la grande sacrifiée de la loi sur l’enseignement supérieur : cible de toutes les critiques de la part des chercheurs, sa réforme a été présentée comme le gage d’une nouvelle politique de la recherche. Seulement il semble maintenant bien difficile d’accoucher les statuts du Hceres (Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur) censé la remplacer. On les attend d’un jour à l’autre mais on imagine combien le ministère est réticent à mettre sur le tapis un texte qui va forcément mécontenter les chercheurs, peu favorables à l’idée même d’évaluation, comme les présidents d’université qui, au contraire, demandent ces instruments d’évaluation. Pendant ce temps, l’Aeres se fait doucement oublier en publiant des rapports qui ne fâchent plus personne.
Un rapprochement prépas/universités à la peine
S’il y a une mesure qui risque d’être dénoncée devant le Conseil d’État c’est bien celle-là ! Comment pondre des décrets d’application d’une loi qui prévoit des rapprochements entre prépas et universités alors que chaque cas est particulier ? Comment prouver l’utilité du rattachement alors que beaucoup d’élèves de prépas seront fondés à contester l’intérêt même de la convention, étant tout simplement trop loin géographiquement pt en profiter ? Et comment établir à qui reviendront les sommes ainsi collectées ?
Comme l’explique EducPros, lycées et universités ont théoriquement jusqu’à fin décembre pour indiquer avec qui ils ont signé un accord. Un délai qui paraît bien court : du côté des prépas littéraires il y avait bien longtemps que des accords existaient mais tout restait à faire dans les autres.
Une loi sur les stages difficilement applicable
Si les universités sont relativement favorables à la nouvelle loi sur les stages, les grandes écoles restent vent debout face à un texte qui va limiter les possibilités de trouver des stages pour leurs étudiants. Quant à l’année de césure, sa survie même est en jeu même si un groupe de travail tente de la sauver. Mais les universités ne risquent-elles pas d’être finalement les dindons de la farce de la réforme ? Quand les entreprises prendront moins de stagiaires, ne vont-elles pas naturellement favoriser les grandes écoles qu’elles connaissent mieux ? Les décrets d’application de la loi se font en tout cas attendre. La question des start up est particulièrement délicate : leur appliquer les mêmes quotas de stagiaires qu’aux grandes entreprises, c’est tout simplement faire disparaître de très nombreuses d’entre elles alors même qu’on veut lutter contre le chômage des jeunes et promouvoir l’innovation. Décidément, l’enfer est pavé de bonnes intentions.