Le directeur général d’Exatech, Frédéric Dallias
Créé il y a trente ans, Exatech est aujourd’hui le principal organisateur d’examens en France. Après deux années de pandémie qui ont fortement impacté son modèle, son directeur général, Frédéric Dallias, nous explique tout un processus indispensable pour garantir l’égalité de tous devant les concours.
Olivier Rollot : Comment est née Exatech, leader aujourd’hui de l’organisation des examens en France ?
Frédéric Dallias : Il y a trente ans chaque école, chaque université, chaque ministère organisait ses propres concours. Travailler avec Exatech leur a permis d’optimiser leur calendrier et de réduire leurs coûts avec des examens que nous organisons clés en main jusqu’à la correction des copies grâce à nos solutions numériques. Le tout en relations avec les préfectures dans le cadre de Vigipirate et dans le respect des protocoles Covid du MESRI comme de la Direction générale de l’Administration et de la Fonction publique (DGAFP).
O. R : Exatech organise toutes sortes de concours ?
F. D : Nous organisons près de 680 concours par an qui peuvent réunir de 100 à 50 000 candidats. Nous travaillons avec les grandes écoles, les universités, les banques d’épreuves, les Ministères et les administrations publiques. Le Service Interacadémique des Examens et Concours (Créteil, Paris et Versailles) nous sous traite par exemple l’organisation des concours de professeur des écoles (CRPE) ou des BTS, organisés dans des halls à Villepinte pendant toute une semaine. Nous organisons également des concours par exemple pour la Mairie de Paris (une trentaine par an), le Sénat, l’Assemblée nationale, ou la Gendarmerie nationale. Le concours de sous-officier de gendarmerie concerne environ 25 000 candidats chaque année.
Afin d’optimiser le nombre de places par candidats et de diminuer les coûts, nous sommes capables de mettre en place les surbookings grâce à des algorithmes qui nous permettent de prévoir, à 5% près, combien de candidats seront présents. Des concours et des examens ont lieu tout au long de l’année, avec deux périodes majeures : avril-mai-juin puis décembre. Pendant ces périodes nous pouvons organiser jusqu’à huit ou neuf concours par jour.
O. R : Les Grandes écoles ont-elles des exigences particulières ? Notamment en termes de contrôle des candidats.
F. D : Il y a deux enjeux majeurs : la sécurisation des sujets et des copies, et l’équité entre les candidats. Nos solutions numériques (notamment Viatique, la plateforme de dématérialisation des corrections) apportent des garanties et des avancées considérables sur ces points.
Les consignes de chaque concours permettent de faire appliquer l’égalité des chances. Cette exigence de contrôle est très importante pour les Grandes écoles, et les surveillants Exatech sont formés pour faire respecter ces consignes et aux techniques de surveillance. Chaque concours requiert au minimum un surveillant pour 50 candidats, parfois pour 20 candidats comme c’est le cas notamment du concours CentraleSupélec.
Nous travaillons avec 120 Grandes écoles et nous organisons pour la plupart leurs concours d’entrée. Nous organisons par exemple le Concours Mines-Ponts en Ile-de-France. C’est un concours qui a lieu dans 100 centres d’examen, en France et en outre-Mer, qui doivent tous démarrer en simultané. Cette année, pour le concours Mines-Ponts, nous avons mis en place une solution numérique qui permet l’organisation totale du concours.
O. R : Comment passez-vous ensuite à l’étape de correction des copies ?
F. D : Toutes les copies sont dématérialisées sur notre plateforme Viatique. C’est un travail majeur si vous considérez par exemple qu’une copie du concours Centrale Supélec représente dix feuillets recto-verso. Et il y en a en tout 120 000. Ensuite les copies sont disponibles dans le cloud auprès des correcteurs. Les copies originales sont sécurisées et stockées dans un coffre-fort. Cela permet d’éviter la perte des copies comme les frais de déplacements. Et en temps de Covid c’est même mieux d’un point de vue sanitaire.
Chaque correcteur, tous choisis par les écoles, doit corriger de l’ordre de 400 à 500 copies dans le cas des grandes écoles d’ingénieurs. Les « chefs correcteurs » disposent d’outils de docimologie – la discipline scientifique consacrée à l’étude de la façon dont sont attribuées les notes par les correcteurs des examens – pour permettre à l’ensemble des copies d’être corrigées de manière homogène. On peut ainsi vite percevoir si un correcteur est plus sévère qu’un autre.
O. R : La pandémie a mis en avant la possibilité de faire passer des examens à distance. Est-ce possible aujourd’hui dans de bonnes conditions de sécurité ?
F. D : Quelle que soit la solution envisagée il y a aujourd’hui de gros problèmes de triche dès qu’on parle de solutions de passages d’examen à distance. Il y a bien sûr des logiciels de eye tracking pour surveiller ce que font les candidats. Eviter par exemple qu’ils utilisent un deuxième écran avec leur PC. Mais les candidats se sont montrés réticents à l’idée qu’on filme chez eux à travers leur webcam et ces solutions ont été abandonnées.
Sans parler de l’impossibilité de rédiger des copies de mathématiques sur un ordinateur.
O. R : Ce que vous proposez avec votre solution Exatique c’est un examen complétement dématérialisé mais toujours en présentiel.
F. D : Exatique est une solution de passation sur tablette en présentiel complètement déconnectée. En faisant passer des examens sur des tablettes nous pouvons même imaginer des sujets complétement différents d’un sujet papier. Nous pouvons ajouter des images, des vidéos et ce sont d’ailleurs les universités de médecine qui ont été les premières à s’emparer de la solution. C’est une solution totalement sûre qui permet de mettre à disposition les résultats pour analyse aux organisateurs le soir même.
O. R : La pandémie affecte tout particulièrement les concours. Quelles mesures particulières prenez-vous depuis maintenant presque deux ans ?
F. D : Après avoir dû fermer nos portes pendant deux mois en 2020 nous sommes parvenus à organiser les concours en temps et en heure. Il a fallu notamment doubler la surface dont chaque candidat dispose, qui est passée à 4 m2 au lieu de 2m2 avec au moins 1,5 mètre de distanciation avec le candidat le plus proche. Aujourd’hui, le nouveau protocole supprime la jauge dans les salles de concours et d’examens et privilégie l’espace maximal entre les candidats.
De même nous avons dû multiplier le nombre d’entrées pour éviter que trop de candidats se retrouvent ensemble au même endroit au même moment. Évidemment il faut des désinfections permanentes.
Des secouristes sont également présents sur chaque concours et peuvent faire passer des tests dès qu’il y a un doute. Si c’est le cas le candidat à risque est tout de suite isolé dans une « salle Covid » pour pouvoir composer.
Chaque soir nous nébulisons les salles avec des antivirucides qui envoient des particules dans l’air pour désinfecter la salle. Une pratique qu’il faudrait d’ailleurs conserver dans l’avenir.
O. R : Exatech est-elle également présente à l’étranger ?
F. D : Nous organisons les corrections du bac et du brevet pour le compte de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) dans 300 collèges et lycées français répartis dans 132 pays. La dématérialisation des copies permet 80% d’économies. Les copies des candidats d’un lycée au Japon pourront être accessibles pour correction à des correcteurs aux quatre coins de monde. Viatique dématérialise aussi le bac européen pour Schola Europaea. Exatech travaille également avec un réseau de partenaires à l’étranger.
O. R : En France le ministère de l’Education n’a pas fait appel à vous pour dématérialiser les copies du bac en 2021 ?
F. D : Non ils ont préféré développer leur propre système.
O. R : Pour les candidats qui ont des aménagements spécifiques, organise-t-on des tiers temps ?
F. D : C’est de plus en plus courant et très important pour l’égalité des chances. Cela peut aller jusqu’à mettre des secrétaires à disposition, ou des éclairages particuliers. Les équipes et les solutions numériques d’Exatech peuvent répondre à toutes ces demandes.