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L’Edhec veut être la première école de commerce française : entretien avec Olivier Oger son directeur

Constamment classée dans le top 5 des meilleures écoles de management françaises depuis plus de 20 ans, l’EDHEC Business School vient de présenter un plan stratégique qui doit la propulser encore plus haut. Olivier Oger, son directeur général, revient sur le « modèle » Edhec et comment il va évoluer.

Olivier Oger (photo Antoine Belval)

Olivier Rollot : Dans le cadre de votre plan stratégique 2015-2020, vous annoncez vouloir devenir la principale école de management française. Comment allez-vous procéder ?

Olivier Oger : L’EDHEC est, depuis de nombreuses années, sur une dynamique de croissance. La poursuite de ce développement à l’horizon 2020 devrait nous conduire naturellement à un effectif de 7500 étudiants en formation première et à un budget de 150 millions d’euros. Effectivement, ceci pourrait nous positionner en tête. Ces résultats valident le modèle économique développé par l’EDHEC dont la caractéristique principale est la synergie permanente entre la recherche, la formation continue et la formation des étudiants.

Olivier Rollot : La première école par son impact mais pas forcément dans les classements ou le choix des élèves de prépas ?

Olivier Oger : Ceci est faux. Que disent les classements du Financial Times depuis un an : l’EDHEC est passé devant l’EM Lyon pour le Master (programme Grande Ecole). En formation continue, l’EDHEC est apparu systématiquement en numéro 2 français. En Finance, l’EDHEC est 3ème mondial. Ce n’est pas notre obsession mais force est de constater que l’EDHEC fait bouger les lignes dans les classements internationaux. Les Prépas intégreront sans doute plus progressivement ces bouleversements.

O. R : Les écoles de management « consulaires », c’est-à-dire dépendant plus ou moins largement dans leur financement des chambres de commerce et d’industrie, vont être confrontées à de graves problèmes financiers en raison de la diminution des moyens de ces dernières. Cela doit conforter votre modèle indépendant vis-à-vis de toutes les institutions?

Olivier Oger : J’ai toujours pensé que les problèmes de financement que rencontrent aujourd’hui les écoles de management consulaires pouvaient survenir un jour. L’Etat n’a plus d’argent et assez naturellement tout ce qui dépend de l’argent public sera impacté par des baisses de financement. Nous ne pouvons que nous féliciter de notre modèle dans ce contexte…qui devient peut-être le modèle à suivre, en tout cas nous sommes souvent  consultés par nos collègues sur le sujet. Notre budget (87 millions d’euros en 2013-2014) est équilibré avec un financement assuré à 60% par les droits de scolarité, 36% par les entreprises et 4% par les subventions.

Olivier Rollot : Votre recherche est au service des entreprises. C’est votre spécificité ?

Olivier Oger : Nous tenons à développer une recherche utile aux entreprises en évitant de nous focaliser uniquement sur la publication dans les revues les plus étoilées du CNRS. La publication académique est un point de départ à l’EDHEC, pas le point d’arrivée. Le point d’arrivée, c’est la dissémination et l’impact sur les pratiques de management des entreprises. Dès lors celles-ci sont plus enclines à financer la recherche.

C’est une fierté pour nous que les trois quart de notre recherche soient financés par les entreprises. La recherche en finance dans le cadre d’EDHEC-Risk Institute est même devenue la marque de fabrique de l’EDHEC et grand vecteur de la réputation internationale de l’école. La Finance n’est pas notre seul pôle d’excellence, ainsi en Economie, deux de nos professeurs ont été classés parmi les 20 meilleurs économistes en France en 2013 (source : Les Echos). Les deux seuls issus d’écoles de management au milieu de professeurs enseignant tous dans des universités.

Olivier Rollot : Le développement de la formation continue est au cœur de votre modèle ?

Olivier Oger : Comme je l’ai déjà dit, la publication académique n’est pas en soi l’objectif premier de la recherche à l’EDHEC. Ce qui est prioritaire, c’est l’impact de cette recherche sur les entreprises. La meilleure façon de prouver notre potentiel d’impact, c’est de transformer cette recherche en programmes de formation continue. Et nous entrons alors dans un cercle vertueux où la recherche nourrit la formation continue et contribue au financement de l’école là où la recherche est seulement un coût dans les autres institutions.

Olivier Rollot : Vous créez de nouveaux programmes en formation continue cette année ?

Olivier Oger : Oui, nous ouvrons deux nouveaux programmes au printemps prochain. Dans la suite logique de la création en 2013 de l’EDHEC Family Business Centre, nous ouvrons un Global Executive MBA spécialisé en Family Business. Ce programme sera donné sur nos cinq campus (Lille, Paris, Nice, Londres et Singapour).

Par ailleurs, sur la lancée du développement de nos formations continues à Paris, nous allons ouvrir notre Executive MBA sur le campus de Paris, ce programme viendra compléter l’EMBA créé à Lille en 2000.

Olivier Rollot : Autre axe fort de développement aujourd’hui pour l’EDHEC : son école postbac, l’ESPEME, qui vient de devenir le BBA EDHEC.

Olivier Oger : C’était important de franchir un palier car le segment des BBA est aujourd’hui celui qui connait le plus grand dynamisme au sein des formations en management. Certainement sous l’influence internationale, de plus en plus de très bons bacheliers souhaitent faire un « bachelor » qui sera souvent (2/3 des cas environ) suivi d’un Master.

L’ambition du BBA EDHEC est de former ces brillants bacheliers en 4 ans à un métier du management et de permettre aussi à ceux, très nombreux, qui le souhaitent de poursuivre en Master dans les meilleures écoles françaises et internationales dont l’EDHEC bien sûr.

Nous tenons au format en 4 ans qui seul permet une formation complète avec des stages  et des séjours à l’étranger. Le BBA EDHEC se présentera progressivement sous trois formats différents : le format classique sur les campus de Lille et Nice, le format global sur les campus de Londres et Singapour et le format « Blended learning » qui sera un développement du programme en e-learning réservé actuellement aux sportifs de haut niveau.

Olivier Rollot : Comment vous développez-vous à l’international ? Votre modèle ce n’est toujours pas de créer des campus hors de France.

Olivier Oger : Nous avons deux campus hors de France depuis 2010 à Londres et Singapour.  Ces campus se développent et vont accueillir de plus en plus d’étudiants dans le cadre du Business Plan 2020 : MSc Global Business, BBA EDHEC, Global EMBA Family Business, Global MBA….et de nombreuses formations continues. Nous n’avons pas le projet, à ce jour, d’en développer d’autres.

En parallèle, nous poursuivons une politique de partenariats « haut de gamme » aux : USA, Yale, Princeton, MIT, Stanford ; en Europe, Cambridge, Bocconi, Instituto de Empresa, London School of Economics et dans le monde avec le réseau QTEM que nous venons d’intégrer (Waseda-Japon, Monach-Australie…).

Olivier Rollot : Il faut aussi attirer des enseignants de très bon niveau en France. Votre implantation à Nice doit bien vous y aider ?

Olivier Oger : Il est vrai que les premiers professeurs internationaux de bon niveau qui nous ont rejoints ont d’abord été séduits par Nice. Mais aujourd’hui ils se répartissent équitablement car Lille a également de bons atouts, notamment  celui d’être toute proche de Londres, de Paris. L’EDHEC est devenue globale avec du personnel et des professeurs sur quatre pays (France, UK, Singapour et USA).

Olivier Rollot : Tout cela coûte cher. Les écoles peuvent-elles encore augmenter leurs droits de scolarité ?

Olivier Oger : Nous sommes en période de crise en Europe et de ce fait les scolarités touchent certainement une limite. Aux USA où les scolarités sont plus élevées, c’est tendu également. Dans ce contexte, nous devons trouver un nouvel équilibre entre les scolarités, les bourses, le financement de la recherche par les entreprises, comme à l’EHDEC, plutôt que par les étudiants. Nous n’échapperons pas à une optimisation de nos coûts…et bien entendu l’irruption massive du digital pourrait transformer progressivement nos modèles économiques.

Olivier Rollot : On parle beaucoup de nouvelles pédagogies en ce moment. Qu’en est-il à l’Edhec ?

Olivier Oger : Nous voulons étudier toutes les formes de nouvelles pédagogies envisageables et nous avons créé à cet effet une toute nouvelle direction de l’innovation pédagogique. De nouveaux mix pédagogiques peuvent être imaginés, comme par exemple l’utilisation de MOOCs des meilleures universités dans notre enseignement s’ils sont les plus pertinents.

Olivier Rollot : Vous aussi allez produire des cours en ligne gratuits et ouverts à tous, ces fameux MOOCs ?

Olivier Oger : L’EDHEC réalise actuellement deux MOOCs, dont un avec Centrale Lille sur l’entrepreneuriat. Nous avons bien entendu d’autres projets en lien avec nos expertises de recherche. Cela n’étonnera personne si nous commençons par la Finance.

Olivier Rollot : Alors on se dirige vers le tout digital dans l’enseignement supérieur aujourd’hui ?

Olivier Oger : Le très bon enseignant qui remplit l’amphi dès 8h du matin, qui tient en haleine son auditoire jusque 11h sans surcharge de multimédia, a encore, et c’est heureux, de beaux jours devant lui. Pourquoi ? Parce qu’au-delà de son expertise il transmet des valeurs….C’est pour cela que des étudiants ont choisi l’EDHEC, pour cette expérience là et c’est pour cela qu’ils disent « j’ai fait l’EDHEC ».

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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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