Une école, une université, c’est aujourd’hui d’abord une marque ! Cette semaine ESCP Europe a ainsi révélé qu’elle devenait ESCP business school. Et cela a fait couler beaucoup de likes/unlikes. Et pourtant longtemps la notion même de marque a profondément rebuté toute une partie de l’enseignement supérieur : « Une université n’est pas une marque ! » Dans le même temps les écoles de management s’inscrivaient déjà dans une réflexion sur la marque et naissaient Audencia, Skema, Neoma, Kedge, etc.
Puis, depuis les années 2010 les rapprochements au sein des Comue ont permis de faire émerger de véritables marques universitaires : Sorbonne Université, PSL, Université de Bordeaux, Strasbourg, etc. en attendant celles des nouvelles universités qui vont naître en 2020. Enfin dans les écoles d’ingénieurs ce sont souvent des fusions qui ont amené la création de nouvelles marques comme CentraleSupélec ou Sigma Clermont. Illustrations par l’exemple dans l’univers ultra-concurrentiel des écoles de management.
Quelles marques se distinguent ? Une étude menée pour Epoka par Harris Interactive sur « Les entreprises les plus performantes en communication auprès des décideurs » met en avant les marques qui s’imposent auprès des entreprises quand il s’agit du choix d’un prestataire. En l’occurrence d’un organisme de formation. 3 069 décideurs et prescripteurs ont indiqué les marques qu’ils recommandent parmi 279 entreprises et cela en trois temps : leur connaissance de l’entreprise, s’ils la recommandent et comment ils évaluent la performance de sa communication.
En termes de recommandations si ce sont très largement des entreprises du service aux entreprises qui s’imposent (Accor devant Potel et Chabot, Air France et Lenôtre) l’enseignement supérieur tire très bien son épingle. Et tout particulièrement les marques très bien « installées » telle l’Ecole polytechnique (19ème) qui devance HEC Paris (21ème) et l’Insead (33ème).
Pour la performance Apple occupe la première place du podium devant Air France et Accor. Et là il faut aller jusqu’à la 75ème place pour trouver des entreprises dans l’enseignement avec la Cegos quand l’Insead se classe 82ème, HEC 84ème et Sciences Po 86ème.
Réinventer sa signature de marque : « Be passionate. Shape the future » déclare Neoma. « Être passionné. Construire l’avenir », c’est l’ambition de la toute nouvelle signature de Neoma BS. « Nous ne voulions pas parler directement de « passion », un terme qui renvoie à d’autres univers de marque, mais signifier que nous formions des étudiant passionnés pour travailler chez des passionnés », signifie Benoît Anger, directeur général adjoint communication et business développement de Neoma BS. Quant à la mention « shape the future » elle marque notre « volonté de former des jeunes qui ne font pas que subir mais construisent leur futur ».
La nouvelle signature de Neoma est le fruit d’un travail de repositionnement de la marque qui a durée une année puis de sessions de travail avec l’agence Carré Noir. « Ils nous ont proposé un processus d’élaboration qui repose sur des entretiens avec les diplômés et bien sûr notre président, Michel-Ledouard Leclerc, puis sur des groupes de travail réunissant diplômés, étudiants, professeurs et tout notre staff. » La nouvelle signature définie il fallait encore la déposer mais avant bien la tester à l’international. « Il faut bien vérifier ce que les mots signifient dans chaque grand pays. Et en Chine valider que la prononciation même des mots ne prête pas à confusion. »
Tout ce travail a été accompagné d’un relooking du logo. « Quand il a été lancé la marque n’était pas connue et il fallait insister sur le notion de « business school ». Aujourd’hui Neoma est bien installée et nous avons pu minorer cette notion dans la typographie en mettant plus l’accent sur la marque », explique Benoît Anger.
Dans ce nouveau contexte les hémisphères à gauche et à droite vont prendre de plus en plus d’importance et servir de signature pour toute la campagne de communication qui démarre début 2020 dans le monde entier. « L’enseignement supérieur est un univers de marque et nous devons la construire avec des éléments forts pour qu’elle vienne facilement à l’esprit. Et notamment à l’international où ne pouvons pas faire de la publicité partout où être cités régulièrement dans des articles », conclut le directeur général adjoint.
Comment organiser sa communication autour de sa marque : l’exemple d’Audencia. « Il faut que tout le monde participe, que le contenu remonte bien des sachants et que nos étudiants soient les meilleurs ambassadeurs de notre marque », établit Frank Dormont, directeur de la communication et des relations institutionnelles d’Audencia dont l’action a été saluée ces dernières années par plusieurs prix. En septembre dernier l’école s’est notamment vue attribuer le Bronze dans la catégorie « campagne publicitaire de marque / entreprise » du Grand Prix Stratégies de la communication d’entreprise et des collectivités territoriales 2019 pour sa campagne « Never Stop Daring » et le clip qui l’accompagne.
Chaque direction d’Audencia possède ainsi son propre responsable dédié. « Nous devons faire travailler ensemble les services communication, marketing et commercial de manière fluide avec des CRM puissants. D’autre part permettre facilement la diffusion de nos contenus sur nos cent sites mais aussi sur Facebook ou Twitter grâce à une plateforme commune que nous avons créée », reprend le directeur.
Une stratégie qui s’accompagne plus que jamais d’une stratégie de personnalisation – « Nous sommes multiprogrammes. Nous devons envoyer les bons messages aux bonnes personnes au bon moment », souligne Frank Dormont – que facilite l’emploi des nouveaux outils de communication. Dans son étude « Focus sur le marketing » Salesforce établit ainsi toute leur pertinence pour le développement de la marque (premier objectif cité à 92%).
Comment mettre en valeur ses valeurs : HEC à la manœuvre. « Ce que nous voulons d’abord montrer c’est que l’entreprise porte l’homme, le structure. Le public croit en l’efficacité de l’entreprise mais n’adhère à ses valeurs que si elle adopte une conduite écologique et morale. » Diplômée en 1981 d’HEC, un temps présidente de son association des alumni, Mercedes Erra a conçu en 2018 la campagne d’HEC « Tomorrow is Our Business » avec son agence BETC en mettant en avant les valeurs qu’HEC entend aujourd’hui porter auprès de ses élèves et diplômés. Résultat : une vidéo filmée sur le campus d’HEC qui explique comment « apprendre à oser ça peut tout changer » et l’importance donnée dans le choix des alumni à des profils très « RSE » et ouverts sur le monde. Christian Kamayou est ainsi fondateur du site africain d’entrepreneuriat myafricanstartup alors qu’on doit à Aurélie Lavaud et Irène Soulages la plateforme BimBamJob, qui facilite l’insertion professionnelle des personnes en difficulté sur des secteurs en tension.
Et, au-delà de l’engagement social, les neuf personnalités choisies (pour huit affiches) symbolisent également les deux autres axes stratégiques de l’école : l’entrepreneuriat et le digital. Fondateur du slip français Guillaume Gibault parle entrepreneuriat, Fidji Simo, vice-présidente de Facebook, forcément de digital, etc. « Nous avions également demandé que la campagne soit pensée pour être déclinée dans des zones où la notoriété d’HEC n’est pas encore très importante », souligne le directeur de la communication d’HEC, Philippe Oster. Une volonté d’être lisible partout qui a même conduit, pour la première fois, le logo « HEC Paris » à être souligné d’un « business school » utile dans les pays où cela ne relève pas de l’évidence. Eh oui les marques, même les plus établies, continuent constamment à évoluer…
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