Voici un des sujets sur lesquels le nouveau Premier ministre, Michel Barnier, va devoir se pronconcer rapidement. Alors que le gouvernement démissionnaire demande aux différents ministères de réduire leurs dépenses pour le budget 2025 les acteurs de l’enseignement supérieur et de l’emploi s »interrogent sur impact que cela aura sur leurs propres finances ? Le financement de l’apprentissage et de la formation continue interroge particulièrement alors que le gouvernement demande au ministère du Travail près de trois milliards d’euros d’économie.
Les dépenses consacrées au travail et à l’emploi en ligne de mire
Selon Le Monde Gabriel Attal, alors premier ministre démissionnaire, proposait de réduire en priorité les dépenses consacrées au travail et à l’emploi : 2,9 milliards d’euros de moins en 2025 par rapport au budget initial de 2024. Mais si en moyenne les dépenses devraient baisser de 5 à 6%, cela monterait à 11% pour le travail et l’emploi. Seraient particulièrement touchées les aides à l’embauche d’apprentis – 6 000€ aujourd’hui – qui seraient ciblées « sur les contrats pour lesquels le soutien public est le plus efficient». Selon Le Monde « une des pistes consiste à diviser l’aide par deux pour les apprentis de niveau master et plus ». Le financement de la validation des acquis de l’expérience, des « emplois francs » ou du Fonds national de l’emploi – Formation, semblent également menacés.
Les Echos révèlent quant à eux onze mesures proposées par l’Inspection générale des finances publiques, l’IGF, et son alter ego des affaires sociales (IGAS) pour diminuer les dépenses d’apprentissage de 1,1 milliard, celles de formation professionnelle de 396 millions, avec en face un volet recettes de 421 millions. La prime à l’embauche des apprentis est là aussi dans la ligne de mire des experts même si, afin de préserver les apprentis jusqu’à bac+2, seules les aides pour une licence ou un master dans les entreprises de 250 salariés ou plus seraient touchées. L’économie attendue serait de 554 millions d’euros en 2025, à comparer aux 4,8 milliards versés en 2022. Une nouvelle salve de réduction des subventions aux centres de formation d’apprentis « sous réserve de l’analyse de leur situation financière », dégagerait jusqu’à 150 millions de plus.
Décidément peu amènes pour contrats d’apprentissage de niveaux licence et master, l’IGF et l’Igas préconisent également d’imposer aux branches professionnelles de les financer à hauteur de 10 % ou 20 %. 220 à 600 millions d’euros pourraient ainsi être économisés chaque année.
Les apprentis pourraient également être touchés directement au portefeuille, ou du moins leurs parents s’ils y sont rattachés, si leurs salaires n’étaient plus exonérés d’impôt à hauteur d’une fois le SMIC. Selon Les Echos « mettre fin à ce système qualifié d’ « antiredistributif » rapporterait 459 millions, soit 0,6 % du produit de l’impôt sur le revenu, à condition d’accompagner cette suppression d’ajustement des critères de versement de certaines prestations sociales, APL notamment ».
Baisser de 0,79 % à 0,5 % le plafond d’exonération de cotisations des rémunérations des apprentis, couplé à la fin de l’exonération de CRDS, apporterait quant à elle 342 millions. Enfin la fin des dérogations de taxe d’apprentissage, en Alsace-Moselle notamment, apporterait 310 millions de plus aux caisses de l’Etat.
L’éducation touchée également
Du côté du ministère de l’Education des coupes sont également demandées. Et contestées au plus haut niveau. Très critique sur les limites du budget 2025 de son ministère que lui a présenté Bercy, la ministre de l’Education, Nicole Belloubet, considère que c’est une « base technique qui peut évoluer » alors que les plafonds proposés « nous contraindraient à une particulière rigueur en raison notamment de la GVT (glissement vieillissement technicité) » : « Ce budget ne correspond pas à nos besoins et devrait a minima être sanctuarisé ».
Et l’enseignement supérieur ?
« L’exercice 2025 nous inquiète. Ce sera l’année de tous les risques » exprimait en juillet dernier sur Educpros le président de France Universités, Guillaume Gellé. Selon l’AEF le plafond prévisionnel des dépenses pour 2025 de la Mires (Mission interministérielle « recherche et enseignement supérieur ») serait en baisse de 500 millions d’euros par rapport à 2024 alors que c’étaient déjà 900 millions d’euros de crédit qui avaient été amputés sur 2024. De plus 43% des universités, soit une trentaine, sont en déficit en 2023 contre une vingtaine l’année précédente. Sont comme d’habitude dans le collimateur de Bercy les fonds de roulement des universités, dont le montant est jugé excessif. Ce que conteste Guillaume Gellé : « Les fonds de roulement que le ministère de l’Économie et des Finances considère comme de l’argent qui dort… ne dorment pas ! Il s’agit de fonds fléchés pour des investissements car les universités n’ont pas la capacité d’emprunter, sauf cas exceptionnel ». Le feuilleton des économies ne fait que commencer et on peut déjà parier sur de nombreux rebondissements…