À l’issue de la campagne 2021, 94 % des néo-bacheliers ont reçu au moins une proposition et 82 % en ont accepté une, soit une légère progression par rapport à 2020 indique la note Parcoursup 2021 : les propositions d’admission dans l’enseignement supérieur que vient de publier le SIES du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI). Cette campagne est caractérisée par un enrichissement de l’offre de formation proposée sur Parcoursup (+ 2 400 formations y compris en apprentissage) et une diminution du nombre de néo-bacheliers présents sur la plate-forme après une année 2020 qui avait enregistré une réussite au baccalauréat exceptionnelle. De son côté l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) s’interroge sur l’évolution, du processus d’orientation dans son rapport L’orientation de la quatrième au master.
Quels vœux sur Parcoursup ? Sur les 619 000 lycéens, ayant confirmé au moins un vœu en phase principale sur Parcoursup cette année, 597 000 ont obtenu leur baccalauréat. Ce sont 30 000 néo-bacheliers de moins qu’en 2020, année où la hausse avait été très importante (+50 000 bacheliers par rapport à 2019).
94,2 % des candidats néo-bacheliers ont reçu une proposition, soit légèrement plus que l’année dernière (+0,7 point). Une augmentation significative est notable pour les néo-bacheliers professionnels (84,6 %, +2,4 points) et, dans une moindre mesure, pour les néo-bacheliers technologiques (92,5 % soit +0,8 point). La situation reste stable pour les néo-bacheliers généraux : 97,6 % d’entre eux ont reçu une proposition contre 97,5 % en 2020. Au premier jour de la phase d’admission, 54,9 % des futurs bacheliers ont reçu au moins une proposition, soit 2 points de plus qu’en 2020 (52,7 %).
À la fermeture de la plateforme, les candidats sont plus nombreux à avoir accepté une proposition : 81,7 % des néo-bacheliers, soit 0,7 point de plus que l’année dernière et 1 point de plus qu’en 2019. Cette augmentation profite avant tout aux néo-bacheliers de la série professionnelle (+1,0 point), et un peu moins à ceux des séries générales et technologiques (respectivement +0,6 et +0,3 point).
En phase principale (PP), le nombre moyen de propositions reçues par les candidats a augmenté et le temps d’attente avant de recevoir la première d’entre elles a diminué. Le nombre moyen de propositions est passé de 4,5 en 2020 à 5 cette année. Pour les bacheliers technologiques et professionnels, le temps d’attente a diminué de plus d’un jour, quand les bacheliers généraux ont vu leur temps d’attente baissé d’une demie journée.
En 2019, la répartition des vœux des candidats sur Parcoursup, toutes séries confondues, était de 34% de vœux en licence, 31% en BTS, 13% en DUT et 7% en CPGE. Si près de la moitié des vœux formulés par les lycéens généraux vont vers une licence, ils ne sont que 15% dans les séries technologiques et 6% dans la voie professionnelle. De même, les filles sont sensiblement plus nombreuses que les garçons (respectivement 38,7% et 28,2%) à demander une poursuite d’études à l’université. Toutes séries du bac confondues, c’est très largement le droit qui est la licence la plus demandée.
Parcoursup trop complexe ? Selon l’IGESR la plupart des acteurs – élèves, professeurs et personnels d’encadrement – rencontrés par ses correspondants académiques portent un regard positif sur Parcoursup. En dépit de ces appréciations positives, Parcoursup constitue aux yeux de nombreux professeurs « un sujet majeur d’inquiétude, voire d’angoisse chez les lycéens, tant pour ce qui relève de son fonctionnement propre, de son calendrier, qu’en raison de l’enjeu qu’il représente » (complexité des choix, des procédures, crainte de ne pas maîtriser l’outil).
Les équipes de direction et les professeurs pointent de leur côté une complexification croissante du système d’orientation qui engendre « un sentiment de perte de sens et, d’une certaine manière, de désorientation ». Selon eux même les parents appartenant aux catégories socioprofessionnelles supérieures se sentent perdus et concluent que «Parcoursup est très riche, mais [que] c’est un outil extrêmement complexe».
Quels sont les processus d’orientation en Europe ? En Europe, on observe deux approches de l’accès à l’enseignement supérieur note l’IGESR. La première, sélective, est majoritaire. La Royaume-Uni, le Portugal et le Danemark exercent ainsi un contrôle des candidats sur la base de plusieurs critères, comme les résultats aux examens de fin d’études secondaires ou le projet et les motivations des étudiants. La seconde, plus ouverte, permet aux étudiants ayant réussi leurs examens de fin d’études secondaires de s’inscrire dans l’enseignement supérieur dans la filière de leur choix. La France, les Pays-Bas, la Belgique et l’Allemagne font partie des pays qui ont opté pour cette procédure non sélective.
Ensuite la France privilégie des parcours rapides, contrairement par exemple aux pays nordiques. Elle est selon Eurostudent le pays européen où les étudiants sont « les plus jeunes (22,8 ans en moyenne), les moins autonomes vis-à-vis de leur famille et ceux dont le parcours comprend le moins d’expériences personnelles et extra-universitaires ». À l’inverse de la France, la plupart des étudiants anglais suspendent leurs études au niveau licence, avant de reprendre quelques années plus tard un parcours de formation en master. En Allemagne, une sélection précoce est organisée dans le secondaire, qui ne conduit à l’Abitur que la moitié environ (53%) d’une classe d’âge. Pour l’accès aux formations sélectives, la note à l’Abitur est quasiment le seul critère de sélection. Il en résulte une » procédure simple et transparente qui ne laisse aucune place à l’évaluation subjective du mérite individuel ».
L’algorithme : une centralisation égalitaire ? À partir de 2009, le processus d’information et d’admission dans les formations post baccalauréat s’est
appuyé sur un outil, le portail national Admission postbac auquel a succédé Parcoursup à la rentrée 2018-2019. Comme le souligne e rapport de l’IGESR, le recours à une procédure centralisée et automatisée – et donc à un algorithme de classement – pour réguler les inscriptions dans les formations d’enseignement supérieur n’est pas une exception française : de très nombreux pays à travers le monde utilisent – parfois depuis des décennies – des procédures de ce type. En Europe, c’est le cas notamment de l’Allemagne, du Danemark, de l’Espagne, de la Finlande, de la Hongrie, de l’Irlande, de la Norvège, du Royaume-Uni ou encore de la Suède.
A contrario les procédures dites « décentralisées », dans lesquelles les étudiants et les responsables de formations interagissent directement sans qu’il y ait de coordination des décisions d’affectation au moyen d’une plateforme nationale s’avèrent, selon le rapport, le plus souvent « lentes, inefficaces et inéquitables » : du côté des responsables de formation, elles « génèrent de l’incertitude sur les inscriptions effectives à la rentrée ; du côté des étudiants, elles induisent des phénomènes de files d’attente qui les incitent à adopter des stratégies susceptibles de pénaliser in fine ceux d’entre eux qui sont le moins bien informés ».
Des spécialités et des orientés. Bien que les enseignements de spécialité soient officiellement organisés en fonction de la demande des jeunes et des familles, la procédure d’orientation a néanmoins prévu qu’en cas de demande supérieure à l’offre l’arbitre sera le conseil de classe… et « les notes de l’élève », notent les experts de l’IGESR, qui estiment probable un « retour une hiérarchisation des enseignements de spécialités en fonction du profil (niveau scolaire) des publics accueillis ». Si aucune formation du supérieur ne peut faire figurer officiellement parmi ses attendus telle ou telle combinaison de spécialités, il ne fait cependant aucun doute selon l’IGESR que circuleront à brève échéance des messages (implicites ou non) relatifs aux choix les plus « efficaces » dans le cadre de la nouvelle organisation du lycée.
Et justement on note déjà des inflexions à la rentrée 2020, deuxième année de mise en œuvre de la réforme du bac général. Si les quatre matières les plus demandées en 2019 restent les mêmes – 64% des élèves de première générale ont choisi d’étudier les mathématiques, 44% les SES, 43% la physique-chimie et 39 % la SVT – l’ordre de préférence a cependant évolué. Les mathématiques sont un peu moins en 2020 (64% contre 69%). La tendance est inverse pour les SES, demandées en 2020 par 44% des élèves contre 39% en 2019. On observe ainsi un « rééquilibrage » des enseignements de spécialité choisis, les enseignements « scientifiques » (mathématiques, physique-chimie et SVT) connaissant un léger recul en
2020, au profit de SES, HGGSP et LLCER.
Quelle réussite à l’université ? Selon l’IGESR les écarts de réussite entre bacheliers généraux et bacheliers technologiques ou professionnels dans les universités se sont accrus de 2 points par rapport à la session 2017. Si les bacheliers généraux voient leur taux de réussite augmenter (+ 2 points en trois ou quatre ans), celui des bacheliers technologiques et professionnels demeure quasiment stable.
Les taux de réussite en licence en trois ou quatre ans dépendent également de la discipline. Seuls 36 % des étudiants inscrits en L1 en sciences économiques ou administration économique et sociale (AES) sont diplômés de licence en trois ou quatre ans. À l’opposé, 46 % des inscrits en droit ou sciences politiques, obtiennent leur licence quatre ans après leur inscription en licence.
L’ensemble des données disponibles témoigne d’une augmentation continue du nombre de réorientations au cours des dix dernières années. Comme le soulignent les experts de l’IGESR les changements de trajectoires étudiantes, en constante augmentation, « pourraient à terme devenir une voie de réussite d’égale dignité que les parcours linéaires et continus ».
- Photo : Inseec