Plus que jamais l’enseignement supérieur et la recherche ont besoin de financements et sont donc parfois tributaires d’intervenants étrangers pas forcément bien intentionnés dénonce la Délégation parlementaire au renseignement dans son Rapport 2022-2023. Des influences extérieures avec « comme principal levier la dépendance financière qui peut avoir une influence sur le contenu des cours, le matériel pédagogique ou la programmation d’événements ». Réunies au sein de The Guild of European Research Intensive Universities, 21 universités, dont Paris Cité pour la France, soulignent justement dans une note la « nécessité d’une internationalisation responsable ».
En ligne de mire essentiellement les accords avec des universités chinoises mais aussi la présence d’étudiants chinois. Entre avril 2018 et septembre 2021, une étudiante chinoise a ainsi sporadiquement espionné un laboratoire de recherches à Strasbourg et un autre à Metz selon les DNA. L’étudiante se laissait enfermer dans les locaux, la nuit et parfois même le week-end. Repérée par les services de sécurité, elle est repartie dans son pays sans être inquiétée après avoir soutenu sa thèse. Un sujet sur lequel revient plus largement L’Express dans son article Espionnage chinois : de l’ENA à Polytechnique, le réveil douloureux des grandes écoles. « Nos interactions avec les personnels de défense et de sécurité sont de de plus en plus fortes. Il est de plus en plus compliqué de recevoir des doctorants et des étudiants notamment sur des technologies à double usage, c’est-à-dire également exploitables dans le monde de la défense, ce qui nous concerne très largement sur les drones, génie océanique etc. », confie Jean-Baptiste Avrillier, le directeur de Centrale Nantes.
Un sujet qu’on retrouve un peu partout en Europe. Au Royaume-Uni, les universités victimes d’espionnage industriel des Chinois révèle France Info. Plus de 40 universités britanniques sont confrontées à des activités malveillantes du gouvernement chinois. C’est ce que révèle une enquête du quotidien londonien « The Times ». Berlin met en garde contre des risques d’espionnage par des étudiants chinois établit de son côté BFM TV quand en Belgique le journal La Libre titre : Des espions chinois se font passer pour des étudiants dans les universités belges: Ecolo réclame la fermeture des Instituts Confucius. Aux États-Unis, Safety concerns could thwart Chinese students’ return to US s’inquiète même University World News.
Une vulnérabilité à plusieurs facteurs. Comme le souligne la Délégation parlementaire au renseignement, les vulnérabilités du monde académique français résultent de la conjugaison de plusieurs facteurs que sont une « insuffisance de ressources budgétaires, des modalités de gouvernance peu adaptées à la prise en compte du risque d’ingérence – plus précisément dans cette zone grise qui s’étend de l’influence à l’ingérence – et la culture d’une recherche ouverte fondée sur le partage des connaissances et la circulation des idées ».
Certaines puissances étrangères « mènent leurs opérations d’influence directement depuis leurs emprises diplomatiques dans le but de cultiver un réseau d’universitaires qui leur soit favorable, d’autres privilégient l’utilisation de chercheurs et doctorants comme agents d’influence au sein des universités françaises ». Toutefois, le principal vecteur de pénétration demeure les coopérations avec les universités étrangères. En effet, nos institutions académiques se « révèlent de plus en plus dépendantes de financements étrangers, notamment chinois, ce qui emporte des conséquences sur leur liberté académique ».
Pour mettre en garde les acteurs de l’enseignement supérieur, la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), en coordination avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, a donc élaboré à l’été 2021 un plan d’action dédié au renforcement et au suivi des structures et organismes de recherche les plus stratégiques. Décliné en plusieurs actions, ce plan vise principalement à :
- renforcer le travail de sensibilisation effectué auprès de la communauté scientifique, notamment auprès de directeurs d’unités, de chercheurs et d’experts ;
- délivrer un discours efficace auprès du milieu de la recherche et diversifier les points de contacts du Service en s’appuyant sur les outils pédagogiques visant à expliquer l’action du Service au profit du monde de la recherche.
Le dispositif de protection du potentiel scientifique et technique de la nation (PPST) a été créé pour « protéger les savoirs, expertises et technologies les plus « sensibles » des établissements publics et privés (laboratoires de recherches, entreprises, etc.) localisés sur le territoire national, dont le détournement ou la captation pourrait porter atteinte aux intérêts économiques de la Nation, renforcer des arsenaux militaires étrangers ou affaiblir les capacités de défense françaises, contribuer à la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs ou être utilisées à des fins terroristes ». Selon la mission parlementaire il serait aujourd’hui pertinent « d’étendre le dispositif de PPST au patrimoine immatériel ainsi qu’à l’ensemble des disciplines universitaires notamment en l’adaptant aux enjeux et influences spécifiques aux sciences humaines et sociales qui en sont exclues ».
De plus, vu le « manque global de moyens, de coordination et de sensibilisation de la communauté académique à l’émergence de ces nouvelles menaces », les fonctions de fonctionnaire de défense et de sécurité (FSD), quand elles existent, sont généralement occupées par un vice-président de l’Université ou le directeur général de l’établissement. Afin de conforter les fonctions de sûreté et de défense au sein des universités, la Délégation « recommande d’inscrire ce poste dans le référentiel interministériel des métiers de l’État ».
L’influence chinoise au cœur des instituts Confucius
La Délégation parlementaire au renseignement s’inquiète tout particulièrement de l’influences des instituts chinois Confucius. Si leur mission est de promouvoir la langue et la culture chinoises, « ces instituts sont avant tout au service d’une stratégie d’influence et du développement d’un narratif positif pour servir les intérêts du parti ». Leur implantation au sein des universités et autres établissements d’enseignement supérieur hors de Chine peut « leur conférer un effet de levier sur les institutions d’accueil » note-t-elle.
L’Institut Confucius de Lyon, créé en 2009 au sein de l’Université Lyon 3, a ainsi été fermé en 2013 après la nomination d’un directeur chinois qui exigeait de prendre part à la définition des contenus pédagogiques et des enseignements diplômant de l’Université. En 2019, la Belgique a privé de visa le directeur chinois de l’institut associé à la Vrije Universiteit Brussel, qui a également été interdit de séjour pour huit ans dans l’espace Schengen. Dix ans après avoir été la première université en Europe à accueillir un Institut Confucius, l’université de Stockholm arrêtait toute coopération en 2015, suivie par sept municipalités suédoises. Un contexte dans lequel un certain nombre d’instituts ont dû fermer leurs portes, tout particulièrement aux États-Unis. La National Association of Scholars, qui milite pour la liberté intellectuelle dans l’éducation supérieure, recensait ainsi en 2021 seulement 55 instituts Confucius (dont trois devant fermer en 2021) contre… 103 en 2017.
Au final, les actions d’ingérences chinoises « consistent autant à développer un narratif positif sur la Chine qu’à collecter des informations via des universités, l’espionnage, la compromission et l’achat de savoir-faire, tout ceci concourant au programme stratégique « Made in China 2025 », visant notamment au rattrapage technologique du pays ».
L’influence chinoise au cœur des instituts Confucius
La Délégation parlementaire au renseignement s’inquiète tout particulièrement de l’influences des instituts chinois Confucius. Si leur mission est de promouvoir la langue et la culture chinoises, « ces instituts sont avant tout au service d’une stratégie d’influence et du développement d’un narratif positif pour servir les intérêts du parti ». Leur implantation au sein des universités et autres établissements d’enseignement supérieur hors de Chine peut « leur conférer un effet de levier sur les institutions d’accueil » note-t-elle.
L’Institut Confucius de Lyon, créé en 2009 au sein de l’Université Lyon 3, a ainsi été fermé en 2013 après la nomination d’un directeur chinois qui exigeait de prendre part à la définition des contenus pédagogiques et des enseignements diplômant de l’Université. En 2019, la Belgique a privé de visa le directeur chinois de l’institut associé à la Vrije Universiteit Brussel, qui a également été interdit de séjour pour huit ans dans l’espace Schengen. Dix ans après avoir été la première université en Europe à accueillir un Institut Confucius, l’université de Stockholm arrêtait toute coopération en 2015, suivie par sept municipalités suédoises. Un contexte dans lequel un certain nombre d’instituts ont dû fermer leurs portes, tout particulièrement aux États-Unis. La National Association of Scholars, qui milite pour la liberté intellectuelle dans l’éducation supérieure, recensait ainsi en 2021 seulement 55 instituts Confucius (dont trois devant fermer en 2021) contre… 103 en 2017.
Au final, les actions d’ingérences chinoises « consistent autant à développer un narratif positif sur la Chine qu’à collecter des informations via des universités, l’espionnage, la compromission et l’achat de savoir-faire, tout ceci concourant au programme stratégique « Made in China 2025 », visant notamment au rattrapage technologique du pays ».