Marque commune des Ecoles des Mines et Télécom mais aussi d’écoles associées, l’Institut Mines-Télécom (IMT) est aujourd’hui le principal regroupement d’écoles d’ingénieurs – et aussi d’une école de management- en France. Son directeur général, Philippe Jamet, également président d’honneur de la Conférence des Grandes écoles (CGE), nous explique son projet et sa vision d’un enseignement supérieur en pleine mutation.
Olivier Rollot : Tout d’abord une réaction sur les terribles massacres du 13 novembre qui ont particulièrement touché la communauté universitaire ?
Philippe Jamet : Les établissements d’enseignement supérieur sont sur la ligne de front parce que ce qui est attaqué c’est la jeunesse, la liberté, l’intelligence, toutes les causes pour lesquelles nous nous mobilisons. Aujourd’hui, tout le monde connaît quelqu’un qui a été plus ou moins directement touché par les attentats, tout le monde se sent une cible. Dans la nécessaire mobilisation collective, nous sommes à l’avant garde et nous ne baisserons pas les bras.
O. R : Mais comment assurer la sécurité de vos étudiants face à des djihadistes qui, on le sait après les massacres perpétrés en avril dernier au Kenya, sont susceptibles de s’en prendre directement à des campus ?
P. J: Des mesures de contrôle étaient déjà prises depuis janvier, elles vont être renforcées. Les événements vont être plus encadrés. Mais nous devons également être plus vigilants individuellement et collectivement. Ce n’est pas forcément dans la culture française mais c’est nécessaire. Sans dramatiser on peut aussi s’appuyer sur la pédagogie de la vigilance. Montrer qu’on doit être responsable de soi mais aussi de la collectivité. Une pédagogie de l’intérêt collectif qui est d’ailleurs au cœur du projet éducatif de nos écoles. .
O. R : La transition n’est pas facile après de tels événements. Où en est aujourd’hui l’Institut Mines-Télécom ?
P. J: Il avance bien dans deux démarches parallèles. D’un côté le rassemblement de toutes les écoles sous une bannière commune. A ce sujet les conseils d’administration des Ecoles des Mines sont aujourd’hui saisis. Les écoles des Mines d’Alès, d’Albi et de Douai viennent de se prononcer et ont répondu favorablement. Les conseils de Mines Saint-Etienne, Mines, Nantes et Mines ParisTech siègeront d’ici le 8 décembre. Le 9 décembre enfin ce sera au conseil d’administration de l’Institut de se prononcer.
De l’autre côté sur l’ambition collective, dont la valeur a été récemment illustrée par le projet Académie Franco-Allemande pour l’industrie du futur et dont les projets de fusion d’écoles Mines et Télécom sont des illustrations.
O. R : On a quand même le sentiment que les Mines ParisTech ont bien du mal à abandonner leur indépendance. Thierry Coulhon, le président de la Comue dont elles sont membres, Paris Sciences et Lettres (PSL), les soutient d’ailleurs dans ce sens ?
P. J: On a l’espoir que toutes les écoles adhèrent au projet y compris Paris.. Nos écoles ont une forte identité industrielle commune qui se traduit par exemple par nos deux instituts Carnot (Mines et Télécom) qui occupent les deux premiers rangs dans les institutions académiques et ne sont dépassés que par l’institut Carnot du CEA au total. Notre identité commune c’est également notre tropisme vers les entreprises. Nous produisons 25% de la recherche partenariale et formons 25% des docteurs employés par les entreprises pour 7% des étudiants ingénieurs. Nous souhaitons cultiver cette identité pour renforcer la diversité de l’enseignement supérieur et accroître son excellence.
PSL a, par exemple, tout intérêt à que les Mines ParisTech soit conforté dans ses valeurs et les éléments moteurs de son excellence originale. Nos écoles évoluent sur une ligne de crête entre recherche partenariale et recherche fondamentale. Appartenir à l’Institut Mines-Télécom et s’engager dans PSL permettra à Mines ParisTech d’être conforté sur ces deux aspects. Aujourd’hui il faut donner un poids supplémentaire à la recherche partenariale, ce qui ne veut pas dire renoncer à l’excellence académique comme en attestent les résultats de nos écoles en termes ERC (European Research Council) et programmes H2020. Les écoles de l’Institut Mines-Télécom forment un collectif « au-dessus du lot ». Il faut donc voir, dans le projet de l’IMT un élément de valeur dans un système d’enseignement supérieur et de recherche français qui est en train de se géolocaliser.
O. R : Justement, comment allez-vous faire cohabiter l’institut national qu’est l’IMT avec les Comue ?
P. J: Nous sommes parties prenantes de neuf Comue et rassemblements de site et présents dans sept des treize nouvelles régions. Notre projet n’est en rien contradictoire avec des politiques de site, au contraire, nous sommes de ceux qui investissent le plus dans les Comue! Pour autant il y aura forcément des débats dans chaque école sur les priorités. Si c’est le cas, il semble légitime que les écoles placent à un niveau élevé les stratégies de leur ministère de Tutelle (le MEIN dans notre cas) qui leur confère près de 75% de leurs financements. Il ne faut pas tomber dans un affrontement marques / sites qui nous ferait perdre de l’énergie.
Il est également dommage de voir certains établissements d’excellence moins bien traités dans certaines Comue sous prétexte qu’ils sont de statut privés. Notre école Eurecom de Sophia Antipolis est un fleuron de l’enseignement supérieur de statut privé qui possède des enseignants-chercheurs parmi les mieux notés (en termes de h-Index ou de succès aux programmes européens) et qui génère un tiers des ressources H2020 de l’IMT. Eh bien dans l’Initiative d’excellence de l’université de Nice à laquelle nous sommes associés, Eurecom se retrouve présenté dans une rubrique « autres » au motif de son statut de GIE. Le fait est sans doute anecdotique, mais incite à rappeler que l’excellence devrait prévaloir sur le statut ! L’excellence doit être reconnue comme telle dans quelque enveloppe qu’elle se trouve.
O. R : L’IMT fait partie des membres fondateurs de la plus puissante des Comue qu’est Paris-Saclay. Quel regard jetez-vous aujourd’hui sur son développement ?
P. J: Le projet Paris-Saclay a gagné en complexité avec le rapport Attali qui préconise un large rapprochement des grandes écoles d’ingénieurs d’excellence (CentraleSupélec, Mines ParisTech, Télécom ParisTech, etc.) autour de l’Ecole polytechnique. Quelle compatibilité existe-t-il entre les deux projets ? Aujourd’hui nous avons une obligation de résultat pourfaire en sorte que l’Université Paris-Saclay devienne une réalité. Dans cette mesure la nouvelle Alliance autour de l’X et des écoles d’ingénieurs peut constituer un accélérateur de ce projet en capitalisant sur l’excellence particulière de ce collectif. C’est ainsi que nous défendons aujourd’hui l’idée de la création d’’une « School of engineering » tout en réaffirmant nos liens avec l’Ecole polytechnique, qui se sont quelque peu distendus, dans la formation de leurs étudiants de 3ème et 4ème année. Mais il ne faudrait pas compromettre l’avenir de l’Université Paris Saclay en créant un Etat dans l’Etat.
O. R : Tout cela ressemble furieusement à ParisTech qui, justement, est en voie de disparaître !
P. J: On essaye depuis quelques années de rapprocher des identités d’écoles très cloisonnées, certaines par des siècles d’existence. Or les progrès se mesurent sur des décennies. Si, pour accélérer ces progrès, on a besoin d’investir en image en créant un sous-ensemble, cela me convient, qu’il s’appelle ParisTech ou autre. Sous réserve de ne pas contrarier le projet d’ensemble.
Aujourd’hui, après que la loi Fioraso l’ait condamné à disparaître, ParisTech reste une marque qui porte des projets phares comme son campus de Jiaotong en Chine. A l’international les grandes écoles parisiennes restent très attractives comme l’est Paris-Saclay.
O. R : Vous tenez absolument à continuer à travailler avec les universités dans Paris-Saclay ?
P. J: La mauvaise lecture du rapport Attali serait de vouloir « bunkeriser » les grandes écoles alors que l’université Paris Sud est le seul établissement du plateau à figurer dans les 100 premiers du Classement de Shanghai. Mais il faut afficher une identité des écoles d’ingénieurs qui soit un accélérateur du projet. Dans ce cadre, dans le cadre d’une excellence à la française fondée sur les classes prépas, l’Ecole polytechnique a une responsabilité particulière. Quand l’X éternue, l’ensemble des grandes écoles tousse ! Aujourd’hui il faut reformuler un pacte entre les écoles, fondé sur leurs histoires, et valoriser une identité commune. Sinon ParisSaclay sera uniquement une grande université de recherche dans laquelle les écoles risquent d’éroder leurs identités.
O. R : Mais que répondez-vous à ceux qui pensent qu’on dénature le projet d’excellence de Paris Saclay en y faisant entrer des universités qu’ils considèrent de moindre valeur comme l’UVSQ et surtout l’université d’Evry ?
P. J: Il y a une telle densité d’excellence dans Paris Saclay qu’y embarquer des établissements réputés moins prestigieux me semble absolument sans risque. Y associer des universités moins prestigieuses est un pari gagnant si on veut faire monter tout le monde en gamme et se renforcer. Je fais exactement le même pari pour l’Institut Mines-Télécom.
O. R : Justement il semble que, jusqu’ici, HEC ait été très réticent à laisser votre école de management, Télécom EM, entrer dans Paris Saclay.
P. J: Nous nous sommes battus pour faire entrer dans Télécom SudParis dans l’Université ParisSaclay et nous nous battons pour que Télécom École de Management y figure également. Cette école a beaucoup à y apporter, sans risquer de concurrencer HEC, du fait notamment de sa visibilité sur les technologies numériques et de son recrutement, avec 50% de boursiers.
O. R : La deuxième démarche que vous évoquiez c’est celle de fusions entre plusieurs de vos écoles. Là aussi où en êtes-vous ?
P. J: Ces fusions d’écoles vont faire exister notre marque dans des grandes régions en mélangeant le numérique et les technologies de l’ingénieur plus traditionnelles. Dans cet esprit deux fusions sont en cours : dans l’Ouest entre les Mines de Nantes et Télécom Bretagne, dans le Nord entre les Mines de Douai et Télécom Lille. Cette dernière est un peu plus complexe à mettre en œuvre car l’université Lille 1 est également partenaire (à 50%) et doit bien entendu le rester. Dans les deux cas il nous reste à trouver des appellations qui respectent leurs ancrages géographiques. D’autres projets sont en cours notamment autour des Mines de Saint-Etienne mais là il s’agira de se rapprocher de partenaires extérieurs à l’Institut.
Nous poursuivons ainsi deux objectifs. Le premier est de « métropoliser » davantage nos écoles qui sont situées sur des territoires à forte typicité industrielle, mais parfois en périphérie des grands ensembles métropolitains. Pour des écoles françaises ou internationales, afficher son ancrage dans une grande métropole est important. En termes d’attractivité étudiante, mieux vaut s’appeler Lyon que Saint-Etienne, Montpellier qu’Alès sans pour autant avoir à déménager. Les Mines de Douai n’ont que des intérêts à se rapprocher de Lille. Ensuite nous répondons à des enjeux de marque. Au début l’Institut n’était pas fait pour abriter une marque mais le devient peu à peu en incarnant une offre d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation sur les grandes transitions socio-économiques : digitale, environnementale, industrielle. Les écoles Mines-Télécom s’affichent d’emblée comme les écoles de l’industrie du futur.
O. R : La nécessité d’atteindre une « taille critique » en termes d’effectifs n’entre-t-elle pas aussi dans vos objectifs quand vous effectuez ces fusions ?
P. J: Les écoles sont des PME de l’enseignement supérieur qui ont aussi besoin de mieux industrialiser leurs process. Il faut aujourd’hui pour cela plutôt se situer dans une gamme de 1000 à 2000 étudiants qui est bien dans l’esprit du dernier rapport du Cgefi (Contrôle général économique et financier) consacré aux écoles d’ingénieurs.
O. R : Vous êtes en totale adéquation avec les préconisations de ce rapport qui est issu du ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie et donc de la même tutelle que celle de l’IMT ?
P. J: Globalement oui, mais nous avons encore des efforts à faire notamment sur notre coût apparent par étudiant. Pour le reste nous travaillons dans trois volets stratégiques : l’efficience collective, le portage de grands programmes (notamment sur les trois grandes transitions, numérique, énergétique et écologique, industrielle), l’influence dans les réseaux ou sur les questions politiques nationales comme l’apprentissage ;
O. R : Mais l’IMT ce ne sont pas que des écoles des Mines et Télécom. D’autres écoles d’ingénieurs y sont également associées. Pourquoi ?
P. J: Nous avons plusieurs cercles. Le premier est constitué des écoles du ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. Ensuite nous avons des écoles associées qui nous permettent de nous renforcer dans des thématiques existantes ou de « combler des trous dans la raquette » en termes de présence territoriale ou de partenariats industriels. Ainsi nous sommes à l’écoute de ce qui se passe partout en France. Pour des écoles qui sont un peu à l’écart des regroupements de site et qui se reconnaissent dans notre identité, nous pouvons également être un port d’attache.
Encore une fois la biodiversité est un élément de force. Les regroupements de site ne doivent pas conduire à une standardisation et à un projet centré plus sur la recherche que vers l’innovation et la formation.
O. R : A la rentrée 2014 vos neuf écoles ont significativement augmenté le montant de leurs droits d’inscription, qui sont passés de 850 à 1850€, est-ce un montant que vous ne dépasserez plus dans les années à venir ou de nouvelles augmentations sont-elles possibles ?
P. J: Je ne vous dirai pas que nous n’augmenterons plus jamais ces droits. Mais si c’est le cas ce sera avec finesse alors que toutes nos écoles concurrentes sous tutelle du ministère de l’Education nationale, de l’enseignement supérieur et de la Recherche, à l’exception de CentraleSupélec, en restent aux droits universitaires. En tout état de cause, s’il y a augmentation, ce ne sera pas dans les proportions de la rentrée 2014.
L’enjeu aujourd’hui pour les écoles est de savoir si, oui ou non, on va prendre conscience qu’il est raisonnable de faire contribuer plus significativement les étudiants étrangers non communautaires. Dans les écoles de l’IMT ils payent aujourd’hui 3850€ par an avec des dérogations pour les élèves issus de classes prépas à l’étranger, notamment marocaines.
O. R : Vous n’avez jamais songé à faire payer des tarifs plus élevés dans vos écoles les plus réputées, Mines ParisTech ou Télécom ParisTech pour ne pas les citer ?
P. J: Mon projet est de tirer toutes les écoles vers le haut et ce serait un très mauvais signal que d’afficher des tarifs différents.
O. R : Mais vous n’imaginez pas non plus un cursus unique avec des campus un peu partout comme Sciences Po ?
P. J: Nous ne sommes ni Sciences Po ni les Arts et Métiers. L’IMT est un institut collégial qui n’a pas pour objet d’avoir des campus « fonctionnalisés ». Nous sommes seulement 85 personnes au siège et nous envisageons plutôt de donner davantage de délégations à chaque école que le contraire.
O. R : Que peut faire exactement la structure principale de l’IMT aujourd’hui ?
P. J: En tant qu’EPSCP nous co-accréditons effectivement des masters et nous réfléchissons aujourd’hui, comme toute la communauté, à développer des diplômes de niveau bachelor. Nous sommes également le principal producteur de MOOCs en France et sommes l’un des neuf établissements d’enseignement supérieur présents sur la plateforme Coursera. Nous prenons également en charge des recrutements collectifs dans des pays cibles. Dans l’apprentissage nous réfléchissons à mutualiser des opérations couteuses comme le recrutement et le tutorat. Pourquoi un étudiant de Télécom Bretagne parti à Montpellier ne serait-il pas suivi par un tuteur des Mines d’Alès plutôt que d’en faire venir de Brest?
O. R : L’apprentissage est particulièrement important dans vos écoles. Vous ne craignez pas d’avoir des problèmes de financement avec la réforme de la taxe d’apprentissage qui vient d’avoir lieu ?
P. J: Nos effectifs d’étudiants en apprentissage sont en progression de 3% en rythme annuel et représentent 15% de nos effectifs globaux et jusqu’à la moitié aux Mines de Saint-Etienne. Sur la partie « barème » (que peuvent affecter librement les entreprises et pas seulement aux formations en apprentissage) nous constatons une chute importante de nos financements. Certaines de écoles sont fortement impactées, certains grands groupes ayant décidé de concentrer leurs efforts sur quelques établissements.
O. R : Vous êtes régional et national. Comment conjuguez-vous ces deux dimensions ?
P. J: Etant présents dans sept régions, nous sommes un lieu de consolidation d’initiatives locales, et sommes en mesure de leur donner une valeur ajoutée supplémentaire et de porter une vision nationale. Aujourd’hui, nous craignons des arbitrages régionaux uniquement mus par des considérations régionales. Pour prendre une image un peu forte, si la région Midi-Pyrénées décidait de diminuer son soutien à l’aéronautique, elle porterait un coup sévère à une filière stratégique pour la France. Il faut donc s’efforcer de garder une vision nationale et l’IMT peut par exemple alerter la puissance publique sur la nécessité de conserver telle ou telle formation en région au motif de sa valeur nationale. Tout le problème est que les acteurs locaux veulent des retours sur investissement rapides et privilégient des retours localisés alors que l’enseignement supérieur travaille généralement sur un temps long et que l’Institut Mines-Télécom, par sa dimension nationale, a pour objectif de soutenir des développements de compétence qui ont un sens à cette échelle.
Nous sommes dans l’anticipation tout en devant nous positionner sur un plan national et international. On ne peut pas être excessivement utilitaristes et prétendre former des ingénieurs opérationnels tout de suite. Nous formons avant tout des ingénieurs adaptables. On attend des acteurs économiques un soutien pour des actions dont le retour n’est pas immédiat.
O. R : Vous avez présidé pendant deux ans la Conférence des grandes écoles. Cela ne vous manque pas trop aujourd’hui ?
P. J: Cela a été une expérience formidable, deux années très denses avec beaucoup de réformes, mais il faut savoir laisser la place à la relève. Anne-Lucie Wack, qui m’a succédé, est une femme qui a participé à tous les grands débats, sur les Assises de l’enseignement supérieur comme sur sa Stratégie nationale, et sait porter la parole des grandes écoles. C’est la personne qu’il fallait dans le contexte actuel.
O. R : Mais que pensez-vous de l’objectif le plus ambitieux de la Stratégie nationale de l’enseignement supérieur (Stranes) qui est de diplômer 60% d’une classe d’âge dans l’enseignement supérieur ?
P. J: C’est un objectif présenté de manière ambiguë, voire maladroite, mais atteignable pour autant que ce soit une ambition à long terme. Chacun doit pouvoir monter en compétence à son rythme. Est-ce le bon pari que d’acquérir tout de suite le diplôme le plus élevé possible ou faut-il mieux permettre d’y accéder en favorisant la formation tout au long de la vie ? Aujourd’hui il faut réhabiliter les diplômes courts, qui sont d’ailleurs ceux qui permettent le mieux de s’insérer sur le marché du travail et permettent la construction progressive, dans le temps, de compétences qui, aujourd’hui, évoluent à un rythme accéléré. C’est une anomalie française de diplômer plus d’étudiants dans les filières professionnalisantes à bac+5 qu’à bac+3. Mais aujourd’hui les jeunes comprennent que s’ils n’obtiennent pas le diplôme le plus élevé en formation initiale, ils compromettent leur employabilité et leur avenir. Cette vision est non seulement erronée, mais elle ne correspond pas non plus aux tendances observées dans l’évolution des compétences.