ECOLE D’INGÉNIEURS

Réforme de l’apprentissage : les écoles d’ingénieurs se veulent optimistes

« Confiants mais vigilants » c’est ainsi que le président de la Cdefi (Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieur), Marc Renner, et le directeur du Cesi, Jean-Louis Allard présentent la position de leur conférence à quelques semaines de la présentations d’une réforme qui provoque bien des tensions dans l’enseignement supérieur. « L’inquiétude est forte dans les écoles parce que l’enjeu est critique et qu’il est très difficile de savoir dans quel sens va tourner le vent », rappelait ainsi la semaine dernière la présidente de la Conférence des grandes écoles, Anne-Lucie Wack (lire aussi ci-contre).

Marc Renner

Les effets de la réforme de 2014… En 2014 la réforme précédente réforme de l’apprentissage a « fragilisé un système dont le fonctionnement administratif demeure complexe » explique Marc Renner qui rappelle que « 45 % des écoles d’ingénieurs sont financées à moins de 80 % de leur coût de revient pour les formations en alternance » et demande un « financement à 100% tenant compte de tous leurs coûts ». De plus la baisse du « barème » a été importante pour les établissements : – 33 % entre 2014 et 2015, soit 25 millions d’euros. « Il ne faudrait même pas le rattacher à la taxe d’apprentissage alors qu’il a été créé en 1925 pour favoriser les formations technologiques dans leur ensemble », demande Jean-Louis Allard quand Marc Renner souligne qu’il représente une « part significative du modèle économique des écoles d’ingénieurs, et notamment des écoles privées. »

Une nouvelle organisation. S’ils ne veulent pas se prononcer sur la gestion du système par les régions ou les branches professionnelles, les responsables de la Cdefi soulignent « l’importance de la prise en compte des formations interprofessionnelles ». On se souvient par exemple comment la fin du contrat de qualification avait été synonyme d’abandon pour beaucoup de formations non directement rattachées aux branches professionnelles. Mais les écoles d’ingénieurs veulent surtout profiter de l’occasion pour intégrer la gestion de l’ensemble des centres de formation d’apprentis (CFA). « Les écoles d’ingénieurs ne sont présentes dans la gestion que de la moitié des CFA et peuvent ainsi en valider les comptes. Ailleurs les relations sont parfois plus difficiles », confie Jean-Louis Allard. De la même façon un pilotage national de l’apprentissage permettrait d’éviter une trop grande disparité de traitement entre les régions dont certaines ne financent pas du tout l’apprentissage dans le supérieur.

Bientôt l’apprentissage également en deux ans ? La progression du nombre de diplômés pourrait encore s’accroître si la possibilité de former des ingénieurs en seulement deux ans se généralisait. D’autant que leur coût baisserait ainsi pour les financeurs. C’est une demande ancienne des écoles d’ingénieurs : pouvoir proposer des périodes d’apprentissage en deux ans au lieu des trois préconisés par la Commission des titres d’ingénieurs (CTI). Dans les faits beaucoup d’écoles y recouraient déjà mais les expérimentations actuelles, dans une dizaine d’écoles volontaires, que présente EducPros ont le mérite d’être plus officielles. Et encadrées comme l’explique Jean-Marc Théret, vice-président de la CTI : « Nous avons fixé d’emblée un cadre précis : les écoles candidates doivent déjà proposer l’apprentissage, cette formation doit être nouvelle et non une conversion d’un cursus de trois ans en deux ans. Enfin, les établissements doivent justifier d’un recrutement diversifié ».

Les écoles candidates seront sélectionnées en 2018 et la formation test pourrait démarrer dès la rentrée 2019. Il s’agirait notamment pour elles de proposer la formule aux élèves issus des prépas quand elle est aujourd’hui quasiment réservée aux admis sur titre. « Il n’est pas question que cette nouvelle formule en deux ans remplace celle en trois ans. Elle lui sera complémentaire », n’en prévient pas moins Jean-Marc Théret.

15% des diplômes d’ingénieur. En 2016-2017, ce sont pas moins de 20 901 apprentis qui préparaient un diplôme d’école d’ingénieurs parmi les 152 454 inscrits dans des formations du supérieur en apprentissage, soit une hausse de 6,5% comparativement à 2015 (+5,9 % pour l’ensemble) selon les données publiées par la CDEFI. 5 352 diplômes d’ingénieur ont ainsi été délivrés par la voie de l’apprentissage en 2016, ce qui correspond à 15% des 35 707 diplômes d’ingénieur délivrés en formation initiale en 2016-2017 (hors année de spécialisation).

Le nombre d’apprentis préparant un diplôme d’ingénieur a augmenté de 32% en cinq ans et a été multiplié par 2,3 en 10 ans. Les formations d’ingénieurs accueillent ainsi 42% des apprentis inscrits dans des formations de niveau I, qui préparent à un diplôme de niveau égal ou supérieur à bac+5 alors que l’apprentissage est la voie choisie pour 14,9% des élèves-ingénieurs en formation initiale recensés en 2016-2017. Cette proportion augmente de façon continue depuis 2006, où ce dispositif concernait 7,8% de la population d’élèves-ingénieurs.

Il faut néanmoins noter que la féminisation des effectifs dans les écoles d’ingénieurs reste plus lente dans les formations par apprentissage que dans les formations sous statut d’étudiant. Au 31 décembre 2016, on recensait ainsi 3 747 femmes dans l’effectif d’apprentis préparant un diplôme d’ingénieur soit un taux de 17,9 % alors qu’il est de 28% sur l’ensemble des élèves-ingénieurs pour la même période.

On recensait en tout 8 104 nouveaux apprentis inscrits en 2016-2017 préparant un diplôme d’ingénieur pour 7 335 un an auparavant. Il s’agit d’une croissance annuelle du nombre de nouveaux entrants de 10,5 %, très proche de celle mesurée pour les nouveaux entrants en apprentissage dans les formations de niveau I (10,2 %) et largement supérieure à la croissance annuelle de l’ensemble des nouveaux entrants en apprentissage dans le supérieur (+ 7,4%).

Parmi les nouveaux entrants en apprentissage en 2015-2016, 31,9% étaient titulaires d’un DUT obtenu dans le cadre d’une formation hors apprentissage (31,1 % en 2014-2015) et 10,8% possédaient un BTS délivré sous statut d’étudiant (12,2 % en 2014-2015). Les nouveaux apprentis avec un autre diplôme du supérieur en poche obtenu sous statut d’étudiant représentaient 22,4 % (24,2 % en 2014-2015) des primo-entrants en écoles d’ingénieurs par la voie de l’apprentissage.

 

 

Previous ArticleNext Article
Avatar photo
Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Send this to a friend