Le Sigem n’a pas répondu ses attentes cet été. Pas de quoi décourager le directeur de Burgundy School of Business (BSB), Stéphan Bourcieu, concentré sur une année 2020-21 qui verra son école ouvrir un deuxième campus à Lyon. Il nous livre son analyse des résultats du Sigem et sa vision de l’avenir.
Olivier Rollot : Avec la crise du Covid-19 qui n’en finit pas, la rentrée 2020 est forcément très particulière dans l’enseignement supérieur. Comment se déroule-t-elle à BSB ?
Stéphan Bourcieu : La rentrée se fait en plusieurs temps cette année, avec d’abord les élèves de troisième année du Master Grande Ecole le 1er septembre puis le 7 septembre les nouveaux entrants. Dans le contexte sanitaire que vous rappelez, nos cours vont être délivrés à 90% en présentiel et à 100% pour les étudiants de première année. Seuls les étudiants internationaux qui n’ont pas pu nous rejoindre, ou français « cas contact » pendant un temps de quarantaine, suivront tous leurs cours à distance. J’ajoute que tous nos cours sont aujourd’hui disponibles simultanément en présentiel et en distanciel grâce à nos investissements dans le distance learning.
O. R : Que se passerait-il si vous constatiez des cas de Covid sur vos campus ?
S. B : Nous avons plusieurs plans prévus. Le plan A appliqué aujourd’hui avec des masques obligatoires dont nous avons fait des stocks, les règles de distance sociale et mesures barrières. Le plan B dans lequel les cours se feront par tiers de classe : un tiers des élèves en présentiel et deux tiers en distanciel, avec une rotation hebdomadaire. Et le plan C de retour au tout distanciel comme après le 11 mars. Des fermetures ponctuelles de classes et même d’établissements sont probables. On le constate déjà dans l’enseignement primaire et secondaire et il faut se préparer à toutes les situations.
O. R : Votre actualité de l’été, c’est d’abord de ne pas avoir rempli toutes les places que vous proposiez aux élèves de classes préparatoires dans le cadre du Sigem (il en reste 62 sur les 250 ouvertes). Comment l’expliquez-vous ?
S. B : Tous canaux de recrutement confondus, BSB fait cette année la meilleure rentrée de son histoire. En bachelor, dans un contexte où il semble que beaucoup d’écoles aient eu des difficultés de remplissage avec Parcours Sup, nous augmentons significativement nos effectifs en passant en un an de 130 à 176 étudiants à Dijon. A Lyon la progression est plus modérée – de 46 à 53 étudiants. Nous serons en mesure d’accueillir plus d’élèves en 2021 une fois notre nouveau campus lyonnais inauguré. Sur Lyon, nous passons déjà de 230 à 340 étudiants avec la montée en puissance du Master Grande école. Un Master Grande école pour lequel les recrutements en admission sur titre ont également progressé : de 170 nous sommes passés à 180 étudiants à bac+2 et de 140 à 180 à bac+3. Enfin nos effectifs d’étudiants internationaux ont également un peu progressé avec des étudiants présents sur le campus et d’autres qui vont d’abord suivre leurs cours à distance et attendent leur visa ou de faire leur rentrée en janvier prochain. Au global, même avec cet incident sur le recrutement en classes préparatoires, nous connaissons toujours une croissance significative et le même équilibre économique.
O. R : Depuis 2013, la progression de vos effectifs issus de classes préparatoires a été remarquable, passant de 106 à 255 en 2019. Comment analysez-vous le coup d’arrêt brutal intervenu cette année ?
S. B : Passer de 250 à 188 étudiants, c’est une déception que nous expliquons par trois raisons. La première, c’est la fixation d’une barre d’admission un peu haute. Nous avons en effet voulu maintenir la barre, passée de 7,6 à 7,67. Ce n’était pas une bonne idée de le faire cette année mais nous ne voulions pas remettre en cause une hausse régulière de notre barre depuis 7 ans. C’est un indicateur important de la valeur d’une école. Nous n’avions d’ailleurs pas voulu augmenter le nombre de places cette année avec la volonté de monter cette barre.
L’absence d’oraux est le facteur principal. Il démontre par l’absurde la pertinence de notre modèle fondé sur l’accompagnement et la proximité, qui doit se vivre au travers de l’expérience BSB d’accueil des admissibles. Major Prépa nous a d’ailleurs toujours placé à la 1ère ou 2ème place pour la qualité de cet accueil qui donne envie à beaucoup d’étudiants de nous rejoindre. Il faut comprendre qu’ils n’ont pour la plupart aucun avis sur Dijon et qu’ils découvrent une très belle ville qui est aussi une métropole dynamique, agréable, avec notre campus en plein centre. Autant d’éléments que le digital ne permet pas de montrer. C’est grâce à cette expérience que vivent les candidats que nous avons réussi à atteindre la 15ème dans le Sigem en 2018 et 2019, quand les classeurs nous voient en moyenne à la 21ème place. BSB est une école expérientielle qu’il faut venir vivre. Élément de confirmation : nous avons obtenus cette année de très bons résultats dans les lycées dont les élèves étaient venus nous visiter avant la crise du Covid. A contrario, nous ne recevons par exemple aucun élève cette année du Lycée Bellepierre de La Réunion. Depuis cinq ans, cinq à huit candidats de cette prépa nous rejoignaient chaque année après des oraux à l’issue desquels ils nous exprimaient combien ils s’étaient « sentis chez eux ».
Enfin, nos classements dans la presse un peu décevants cette année ont pu d’autant plus jouer un rôle qu’ils n’étaient pas contrebalancés par les oraux.
O. R : Comment se caractérisent les 188 élèves qui ont rejoint votre Master Grande école cette année ?
S. B : Ce sont des élèves qui nous connaissent et apprécient notre dynamique et les valeurs de notre école. Comme les autres années, un certain nombre aurait également pu intégrer des écoles mieux classées. Mais ce qui caractérise le plus cette promotion, c’est la proportion de filles : 71% quand elles étaient 56% l’année dernière. Nous recevons ainsi le même nombre de filles qu’en 2019. Pourquoi ? Sont-elles mieux informées ? Les oraux ont-ils moins d’impact sur elles que sur les garçons ? Nous avons en tout le cas la conviction que nous aurions affecté toutes nos places si le contexte avait été normal.
O. R : Comment allez-vous recruter en 2021 ?
S. B : Si par malheur il n’y avait toujours pas d’accueil des admissibles il est clair qu’il faudrait revoir la dimension expérientielle de notre recrutement. Par ailleurs nous travaillons sur des évolutions de notre Master Grande Ecole, que nous présenterons les 16 et 17 octobre lors de l’assemblée générale de l’APHEC (Association des professeurs des classes préparatoires économiques et commerciales) qui se tient dans nos murs.
O. R : Tous les indicateurs prévoient que les jeunes diplômés vont avoir du mal à trouver un emploi cette année. Avez-vous déjà des indications en ce sens ?
S. B : Il est trop tôt pour faire le point mais c’est un risque, alors que nous sortions d’une année exceptionnelle en termes de recrutement. Jamais nos diplômés ne s’étaient aussi bien placés qu’en 2019. Comment vont-ils réagir ? Ils avaient déjà la culture de prendre une année « off » pour faire autre chose. Cela sera peut-être une option pour certains ? C’est bien évidemment plus délicat pour ceux qui ont des prêts à rembourser.
D’autres vont poursuivre leurs études. Nous constatons déjà un afflux d’étudiants en alternance dans notre troisième année de bachelor. Beaucoup seraient sans doute entrés sur le marché du travail après leur DUT ou leur BTS sinon.
Par ailleurs, nous constatons que les contrats d’alternance connaissent un vrai rebond en cette rentrée. Cet été, et alors que nous avons doublé leur nombre pour passer à 200 par an, le démarrage avait été plus difficile. D’autant que les aides gouvernementales ne devaient initialement pas concerner les étudiants au-delà de bac+3.
Dans tous les cas de figure, nous devrons donner le maximum pour les accompagner.
O. R : Plus largement, comment les Grandes écoles vont-elles se comporter dans les années à venir si la crise économique s’avère aussi dure qu’on le craint ?
S. B : En temps de crise il faut d’autant plus investir dans l’avenir de ses enfants. Or les Grandes écoles font depuis longtemps la preuve de leur efficacité en la matière.
O. R : Dans ce contexte, allez-vous suspendre les augmentations jusqu’ici assez régulières de vos frais de scolarité ?
S. B : C’est une décision que nous avons effectivement prise alors que nous touchons 0 euro d’argent public depuis 2018.
O. R : Après Lyon, avez-vous d’autres projets d’implantation ?
S. B : Nous avons été sollicités pour nous implanter dans d’autres villes de Bourgogne Franche-Comté mais cela ne nous paraît pas pertinent. Notamment en raison de la difficulté de maintenir le taux de couverture des cours par des professeurs permanents que requiert la Commission d’évaluation des formations et diplômes de gestion (CEFDG).
A Lyon, nous allons vraiment passer la surmultipliée en passant dans les années à venir à 700 et 800 étudiants, pour créer ainsi un deuxième vrai campus BSB. Dans le 8ème arrondissement de Lyon, à proximité du siège Europe de Panzani et du siège France de Merck, nous allons nous installer au sein de l’ancien centre de formation de cette dernière. Un formidable outil de 3000 m2 avec un amphi de 200 places.