ECOLES DE MANAGEMENT

«BSB souhaite rester une école généraliste en management tout en développant des points forts»

Il est le « directeur d’école de management 2021 » de « l’Essentiel Prépas » dans lequel cet entretien est paru pour la première fois en décembre 2021. Après quinze années passées à la direction de BSB, Stéphan Bourcieu peut se pencher sur son bilan avec fierté. Après avoir triplé ses effectifs son école est partie à la conquête de Lyon et pense à de nouvelles implantations. Le « moins bien » de 2020, quand l’école n’a pas fait le plein d’élèves de classes préparatoires après des années continues d’expansion, est bien derrière BSB.

Olivier Rollot : Il y a maintenant quinze ans que vous dirigez BSB. Cela ne fait pas de vous le plus ancien directeur d’une école de management française mais vous vous classez quand même au troisième rang. Si vous faisiez un rapide bilan de ces quinze ans qu’en retiendriez-vous en priorité ?

Stéphan Bourcieu : Nous avons multiplié par trois le nombre de nos étudiants qui sont passés de 1 000 à 3 000. Et si nous restons ainsi « la plus petite des Grandes écoles » (accréditées EQUIS) c’est un choix stratégique. Un autre choix crucial a été celui de notre implantation à Lyon en plus de Dijon. Et demain peut-être dans d’autres destinations.

Pendant ces quinze ans nous avons également profondément fait évoluer notre modèle de gouvernance. Nous sommes une institution sous statut d’EESC (établissement d’enseignement supérieur consulaire) qui a ouvert son capital. Notre chambre de commerce et d’industrie reste ultra-majoritaire mais accepte de partager la gouvernance avec seulement quatre représentants sur les 14 membres de notre conseil de surveillance. De même notre président n’est pas un élu consulaire. Cette évolution de la gouvernance nous offre une formidable autonomie stratégique et des moyens financiers importants pour assurer notre développement futur.

Plus largement ces quinze années ont été marquées par le renforcement de l’exigence académique au travers des accréditations et des classements. Le tout dans un contexte de concurrence exacerbée. Le changement le plus marquant aura d’ailleurs été la concentration du nombre d’acteurs avec des fusions et des disparitions d’écoles.

De PME les écoles sont devenues des entreprise de taille intermédiaire (ETI). Leurs échelles financières ne sont plus les mêmes alors qu’elles doivent plus que jamais investir dans le digital et à l’international.

Dans le même temps l’attractivité des formations en management a connu un essor exponentiel. D’une discipline mineure elle est devenue la deuxième la plus enseignée dans l’enseignement supérieur.

Mais, en dépit de toutes ces modifications, qu’il faut accepter, le plus important demeure pour nous de mettre l’étudiant au cœur du système. Il faut le rappeler en permanence : dans des ETI qui doivent constamment raisonner en matière de développements, d’implantations ou encore d’investissements, il ne faut jamais oublier que ce sont les étudiants qui sont le cœur du système.

O. R : Cette dynamique de 15 ans a été entravée en 2020 quand vous n’avez pas fait le plein d’élèves issus des classes préparatoires. Mais ça y est, tout est reparti sur de bons rails en 2021.

S. B : Nous avons effectivement connu un coup d’arrêt en 2020. Nous nous sommes demandé s’il s’agissait de la fin d’un cycle ou d’un accident de parcours. En 2021 nous avons pu conclure qu’il s’agissait bien d’un accident de parcours en reprenant notre progression : nous avons recruté les 255 élèves de prépa attendus et avec un rang du dernier intégré très élevé. Cela a confirmé la force de notre modèle de proximité avec les candidats. Il est essentiel pour nous de pouvoir accueillir les candidats pendant leurs oraux, d’échanger avec eux et qu’ils puissent goûter concrètement à l’expérience BSB. Ce que nous n’avions bien sûr pas pu faire en 2020 en raison du Covid.

Cette année nous nous classons à la 14ème place au Sigem, soit une place de gagnée par rapport au précédent classement. Et nous n’avons jamais été aussi proches des écoles classées entre la 11ème et 13ème place. Mais je n’oublie jamais un chiffre : en 2012 les dix premières écoles recrutaient 56% des élèves de classes préparatoires, en 2021 elles en recrutent 71%. Nous sommes face à une marée montante avec des écoles qui ouvrent de plus en plus de places aux élèves de classes préparatoires. Pour rester au sec nous devons courir plus vite que la marée ! C’est ce que nous faisons année après année avec succès.

O. R : Ce bon résultat est-il un effet de l’implantation de votre programme Grande école à Lyon ?

S. B : A priori pas spécialement : nous n’avions pas communiqué sur l’ouverture du campus lyonnais aux prépas, ou très tardivement, et nous n’avions de toute façon pas accueilli d’étudiants à Lyon pour les oraux en raison du protocole Covid.

O. R : L’ouverture de votre nouveau campus de Lyon a été le grand événement de 2021 pour BSB. Qu’en attendez-vous ?

S. B : Nous voulons recevoir 1 000 à 1 200 étudiants à Lyon en 2025 contre 370 en 2020. Ce nouveau campus doit en effet permettre à BSB de recruter plus largement sur toute la France. Aujourd’hui la plupart de nos étudiants viennent de la partie Nord et de l’Est de la France. A Lyon nous pouvons attirer beaucoup plus facilement des étudiants du grand Sud dans une ville très bien desservie par les transports. Pour les étudiants de Marseille ou de Montpellier, Lyon est une sorte de frontière Nord, pour les transports comme pour la météo.

De plus être à Lyon cela nous permet d’organiser de nouvelles modalités pour nos formations en apprentissage grâce à l’écosystème lyonnais. Au lieu de proposer dans le PGE des alternances de six mois / six mois, qui ne conviennent pas à toutes les entreprises, il est possible d’avoir un rythme de trois semaines en entreprise suivies d’une à l’école.

Nous sommes installés dans le 8e arrondissement lyonnais, au cœur du secteur Monplaisir, dans un quartier très dynamique qui compte deux grandes universités, Lyon 1 et Lyon 3. Nous y avons trouvé un bâtiment très fonctionnel de 3 000 m2 répartis sur 4 niveaux dans lequel était auparavant installée l’entreprise pharmaceutique Merck.

O. R : Quels programmes dispensez-vous sur chaque campus ?

S. B : Les deux programmes majeurs de BSB sont dispensés sur le campus de Lyon (Bachelor in Management et Master Grande École). Depuis la rentrée 2021 les étudiants du Master Grande Ecole peuvent indifféremment se positionner sur l’un ou l’autre campus.

D’autres programmes sont réservés à chaque campus. Le nouveau campus lyonnais dispose ainsi d’un pôle d’excellence en Digital Business & Artificial Intelligence avec le MSc Artificial Intelligence & Digital Technology Management, le MSc Green Tech & Sustainable Societies (nouveauté à la rentrée 2021) et une spécialisation de Bachelor en Digital Management. Le bachelor propose également une nouvelle spécialisation en Sustainable Business Management.

O. R : Pourquoi avez-vous décidé de vous installer à Lyon et pas à Paris, comme l’ont fait la plupart dans autres écoles de régions ?

S. B : Quand nous avons pris la décision de développer un deuxième campus, c’était en 2012, nous avons jugé que Paris était très embouteillée alors que Lyon et sa région sont la deuxième région française avec un grand potentiel que j’évoquais précédemment. De plus à l’époque aucune Grande école accréditée AACSB ou EQUIS n’y dispensait de bachelor. Depuis nous avons été rejoints par l’Essca et l’Esdes a ouvert son propre bachelor. Et emlyon a implanté son BBA à Saint Etienne.

Aujourd’hui nous pourrions envisager de nous installer à Paris. Ou ailleurs, en France mais aussi à l’international, sur un troisième voire un quatrième campus. Sur chacun d’entre eux l’important est de conserver une taille humaine. Nous recevons aujourd’hui 2500 étudiants à Dijon, c’est le plafond à ne pas dépasser pour conserver notre ADN.

O. R : Vous envisagez d’ouvrir un campus à l’étranger ?

S. B : Pour former des étudiants locaux ou proches pourquoi pas. Pour envoyer nos propres étudiants y passer un semestre certainement pas. A l’international notre préférence va pour l’envoi de d’étudiants en petits effectifs dans nos 200 universités partenaires.

O. R : L’image de BSB c’est aussi celle d’une business school dans laquelle la dimension vins et spiritueux est très forte. Votre School of Wine & Spirits Business est une référence en la matière. Allez-vous encore la développer ?

S. B : Nous avons une vraie réflexion en cours sur son extension sur notre campus lyonnais pour des formations qui pourraient être en alternance. Il y a d’excellents crus dans les Côtes du Rhône et le Beaujolais et surtout d’excellentes connexions ferroviaires et aéroportuaires à Lyon.

Mais nous souhaitons rester une école généraliste en management tout en développant des points forts dans le vin mais aussi dans le management des arts et la culture.

O. R : Votre programme Grande école est-il appelé à évoluer prochainement ?

S. B : Une réforme est en cours de finalisation et sera présentée au printemps 2022. Au-delà des fondamentaux du management nous mettrons l’accent sur quatre piliers : la transformation digitale et l’Intelligence artificielle (IA), une globalisation qui continue à accélérer et se transforme, la transformation écologique et l’enseignement des humanités qui permettent de maîtriser tous ces enjeux.

A la rentrée 2022 la maquette du PGE sera revue avec deux grandes évolutions autour des quatre piliers que je viens de citer :

  • un fonctionnement quasi exclusif sur un modèle d’électifs pour construire son parcours ;
  • un enseignement toujours en présentiel avec plus de place donnée à la pédagogie active et aux bootcamps.

Un plan stratégique 2022-2027 sera présenté dans le même temps que le nouveau PGE qui en fait partie. Nous réfléchissons d’abord sur nos relais de croissance.

O. R : Les questions de diversité sociale sont très importantes aujourd’hui et certaines « très grandes écoles » vont jusqu’à réformer leurs concours pour favoriser les boursiers. Qu’en pensez-vous ?

S. B : Donner des points bonus ne fera que redistribuer différemment les boursiers dans les écoles au profit des « très Grandes écoles » que vous évoquez. Cela répond sans doute à la volonté de l’Etat et du grand public, médiatiquement on résout le problème mais il reste surtout à accentuer l’attractivité des Grandes écoles auprès des bacheliers boursiers. C’est là le véritable enjeu.

O. R : Mais les frais de scolarité dans les écoles n’ont-ils pas trop augmenté ces dernières années ?

S. B : C’est un faux débat que de le présenter ainsi. Les étudiants qui en ont besoin obtiennent des bourses, des prêts d’honneur ou encore du financement par l’apprentissage. Le vrai débat est de parvenir à accueillir plus de boursiers. Nous devons toujours plus aller dans les lycées pour y dire que les classes préparatoires et les Grandes écoles sont ouvertes à toutes et tous quels que soient leurs revenus. Nous devons nous adresser collectivement aux lycéens en allant sur le terrain.

Si nous voulons recevoir plus d’étudiants boursiers il faut aussi préserver le financement actuel de l’apprentissage. Au sein de notre Master Grande école le nombre d’apprentis est par exemple passé de 200 il y a trois ans à 560 aujourd’hui. L’action menée par France Compétences est une formidable réussite. Pendant dix ans on a parlé de l’objectif de 500 000 apprentis sans jamais y arriver et nous sommes cette année à plus de 560 000 !

Ce serait une vraie erreur de la part de France Compétences de réduire de façon drastique ces financements alors que le financement mutualisé qui a été mis en œuvre permet aujourd’hui aux PME de recevoir des apprentis. C’est beaucoup plus efficace pour la société que de voir des jeunes aller chez Pôle Emploi.

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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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