Le campus de l’université Paris Ouest Nanterre
« Être étudiant-e en 2023 : entre incertitudes et fragilités » c’est sous ce titre plein de sous-entendus que l’Observatoire de la vie étudiante (OVE) a présenté cette semaine les premiers résultats de sa 10ème enquête triennale Conditions de vie des étudiants consacrée à l’année 2023. Plus de 260 000 étudiants ont été sollicités par une questionnaire en ligne et plus de 80 000 ont répondu représentant 81% de la population étudiante. « Les principaux constats de nos premières analyses montrent la satisfaction des étudiants vis-à-vis de leur formation même si c’est avec de forts contrastes. En revanche les étudiants se sentent peu intégrés dans la vie de leur établissement, avec un faible sentiment d’appartenance. Il faut vraiment penser à comment les rattacher à leur établissement et à leur territoire », stipule la présidente de l’OVE, Monique Ronzeau. Par ailleurs un quart des étudiants se déclare en état de précarité avec une grande difficulté à trouver un logement. « Enfin si les étudiants se sentent en bonne santé leur détresse psychologique n’a pas baissé, au contraire, depuis la fin de la crise sanitaire », alerte la présidente.
Satisfaits mais…
Comme en 2020, 64% des étudiants se disent satisfaits ou très satisfaits de leurs études avec jusqu’à 78% en CPGE, 74% en écoles d’ingénieurs mais seulement 59% en lettres SHS et 53% dans les Inspé (Institut national supérieur du professorat et de l’éducation). Logiquement ils sont d’autant moins satisfaits que leur orientation est contrariée. 28% des étudiants de première année disent de pas être inscrits dans leur choix de formation favori : 35% en STS pour 15% en CPGE.
Pour autant seulement 33% des étudiants se disent intégrés ou tout à fait intégrés à leur établissement, les plus intégrés étant dans des école d’ingénieurs (50%) et les CPGE (42%) quand les moins intégrés sont inscrits en lettres-SHS (23%).
Et s’ils utilisent les ressources de leur établissement ce sont avant tout les bibliothèques qui sont plébiscitées (71%) devant les restaurants universitaires, loin devant les équipements sportifs (23%) et les activités culturelles (15%).
Les activités rémunérées
44% des étudiants exercent une activité rémunérée dont 7% qui la disent « concurrente » ou « très concurrente » à leurs études. En termes de statut, 24 % disposent d’un contrat à durée déterminée, 21 % d’un contrat à durée indéterminée et 20 % d’un contrat d’alternance.
Si environ trois étudiants sur quatre considèrent que leur activité rémunérée « permet une amélioration de leur niveau de vie », un peu plus de la moitié des étudiants (59 %) estime également que l’activité rémunérée qu’ils exercent leur est « indispensable pour vivre ».
Parmi les activités rémunérées non liées aux études exercées par les étudiants, les plus fréquentes sont vendeur ou caissier dans le commerce ou la distribution, serveur, cuisinier, réceptionniste, ou concierge (respectivement 21 % et 19 %), ainsi que le baby-sitting et la garde d’enfants (18 %).
Une précarité stable
Le pourcentage d’étudiants se déclarant en précarité économique est relativement stable : il a cru de 23% à 26% depuis 2016. Les étudiants étrangers sont 2,5 fois plus exposés que ceux de nationalité française. Si en 2022-2023 un étudiant sur 10 a eu recours à une aide alimentaire le chiffre monte à un sur quatre chez les étudiants étrangers. Un tiers des étudiants a été en découvert ou en situation d’impayés. Habitant moins chez leurs parents les plus de 24 ans sont deux fois plus précaires que les étudiants âgés de 20 à 23 ans.
1 129 euros par mois
Les ressources mensuelles moyennes des étudiants sont de 1 129 euros. Trois sources principales de revenus composent ensemble 93 % des ressources : les aides de la famille, qui constituent en moyenne 41 % des ressources des étudiants, les revenus d’activités (27 %) et les aides publiques (25 %).
Ce sont les revenus d’activités qui fournissent les revenus les plus importants, puisqu’ils s’élèvent en moyenne à 835 euros par mois contre 640 euros pour les aides familiales et 436 euros pour les aides publiques.
Une offre de logement réduite
Avec en moyenne 413€ par mois le logement est de loin la première dépense des étudiants. En moyenne 29% déclarent que le coût de logement est très élevé (27% dans les Crous pour 45% en location). Si les Crous jouent leur rôle ce sont aussi là que les problèmes d’insalubrité sont les plus importants (19%). Seulement 10% des étudiants partis du domicile familial vivent dans un logement spécialement dédié aux étudiants (5% à Paris et dans la petite couronne).
Bonne santé mais détresse psychologique
Si 72% des étudiants se disent en bonne santé ils sont 36% à montrer des signes de détresse psychologique (44% des femmes pour 26% des hommes). Les étudiants étrangers sont également plus touchés :
42 % contre 35 % des étudiants de nationalité française. Enfin, les étudiants d’origine sociale populaire apparaissent également fragilisés, 41 % d’entre eux présentant les signes d’une détresse psychologique alors que les étudiants d’origine sociale supérieure ne sont que 30 %.
VSS en hausse. 10% des étudiants (14% des femmes pour 5% des hommes) se disent avoir été victimes de violences sexistes et sexuelles (VSS) et 6 % des étudiantes et 2 % des étudiants de rapport sexuel forcé. À l’issue de ces faits, plus d’une victime sur cinq n’en a parlé à personne ; près de trois victimes sur cinq en ont parlé à leur entourage et un peu plus d’une victime sur cinq au sein de l’institution (syndicat étudiant, personnel administratif, cellule de prévention). Ces violences sexistes et sexuelles sont plus fréquentes au fur et à mesure de l’avancée dans le cursus.
Au total un passionnant coup de projecteur sur la vie des étudiants français dont l’OVE ne publie que les premiers chiffres et qui donnera lieu à d’autres projections dans les mois et les années à venir.