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« Audencia est une très belle marque dans une très belle école avant-gardiste sur les questions de transition »

Sébastien Tran, directeur général d’Audencia BS

Directeur d’Audencia depuis la mi-janvier 2024, Sébastien Tran est un fin connaisseur de l’enseignement supérieur pour avoir déjà occupé des postes de direction au sein du Pôle Léonard de Vinci, de l’EMLV, l’ISC Paris, l’EM Normandie et Excelia. Il prend aujourd’hui la direction d’une école aux excellents fondamentaux mais qui n’en a pas moins connu des turbulences ces dernières années.

Olivier Rollot : Qu’est-ce qui vous a poussé à prendre la direction d’Audencia ? Quelles caractéristiques de l’école vous ont séduit ?

Sébastien Tran : Après six années passées au Pôle Léonard de Vinci j’avais bien fait avancer le plan stratégique. Il était temps pour moi de me consacrer à une nouvelle aventure professionnelle. Or je suis depuis longtemps l’actualité d’Audencia. Depuis mon premier poste à La Rochelle, je sais que c’est une école modèle en matière de responsabilité sociale et environnementale (RSE) comme de développement durable. Je me retrouvais donc bien dans son projet stratégique Ecos 2025 avec également son positionnement très axé sur l’hybridation des compétences.

L’Alliance qui lie Audencia à Centrale Nantes et à l’Ecole nationale supérieure d’architecture de Nantes (ensa Nantes) en fait une école précurseur. Audencia a d’ailleurs d’autres doubles diplômes hybrides que ce soit en design, avec l’Ecole de design Nantes Atlantique, en architecture, dans les arts, etc. et cela en France mais aussi à l’international.

En résumé Audencia est une très belle marque dans une très belle école avant-gardiste sur les questions de transition. Une logique proche de mes propres fondamentaux. C’est assez naturellement que j’ai accepté d’en prendre la direction.

O. R : La vie d’Audencia n’a pas été qu’un long fleuve tranquille ces dernières années. Plusieurs directeurs se sont succédé rapidement et la presse locale s’est emparée de problèmes de gestion des ressources humaines. Qu’allez-vous faire pour ramener la sérénité dans les murs ?

S. T : Audencia a vécu une crise de croissance qui a amené quelques dysfonctionnements sur lesquels les équipes ont travaillé avant mon arrivée. Un audit a été réalisé et un chantier est en cours. Ma feuille de route est de construire un modèle d’organisation plus en phase avec la mise en œuvre d’un plan stratégique Ecos 2025 très ambitieux qui a conduit à des goulets d’étranglement.

Je suis là pour travailler sur un mode d’organisation plus en mode projet. Je vais pour cela m’appuyer sur de nouveaux responsables : un nouveau directeur général adjoint en charge des questions administratives, une nouvelle directrice administratif et financier, etc. Ensemble nous allons déclencher une nouvelle dynamique avec des équipes qui sont tout à fait dans cet état d’esprit.

Un campus totalement rénové en 2022 à Nantes

O. R : Vous allez produire un nouveau plan stratégique ?

S. T : Nous allons achever le plan Ecos 2025 puis commencer à réfléchir sur le plan 2025-2030 qui sera présenté au second semestre 2025. Nous y travaillerons avec la forte implication des parties prenantes, étudiants, entreprises, corps professoral.

Ecos 2025 a eu beaucoup d’impact dans quatre à cinq axes. C’était sans doute trop et nous avons par exemple décidé d’arrêter l’opération Token for Goods. Nous aurons moins de projets dans les futurs plans pour être plus en phase avec nos moyens.

O. R : Quelles sont vos ambitions immédiates ?

S. T : D’abord de développer toute l’offre de programmes Paris sur notre campus de Saint-Ouen, du bachelor au MSc et au PGE en passant par l’Executive Education, en nous appuyant sur les 10 000 diplômés que nous comptons en Ile-de-France. L’école des transitions Gaïa doit se positionner plus au sein de l’Executive Education. Nous allons également repositionner notre école SciencesCom qui est aujourd’hui confrontée à la concurrence de beaucoup d’acteurs privés avec un recrutement à bac+2/3. Sans doute faut-il passer en postbac tout en développant l’alternance.

Audencia est une marque forte qui doit se décliner avec plusieurs écoles comme SciencesCom et Gaïa. Il y a une vraie transversalité entre elles : SciencesCom apporte un contenu qui irrigue la business school, Gaïa pourrait traiter de questions géopolitiques qui sont si importantes pour les transitions. Il s’agit ainsi de créer de l’hybridation au cœur même d’Audencia.

Nous ne devons pas seulement former des managers responsables et innovants mais aussi des citoyens éclairés, possédant les dimensions culturelles et géopolitiques nécessaires.

O. R : Vous évoquez votre campus de Saint-Ouen mais il n’est toujours pas ouvert ?

S. T : Aujourd’hui nous sommes toujours à Saint-Ouen mais dans des locaux provisoires. Les locaux que nous visons répondent tout à fait à nos besoins mais nous devons encore résoudre des questions administratives pour que le bâtiment soit aux normes ERP (Établissement recevant du public). La rentrée 2024-2025 aura encore lieu dans les bâtiments de Samsung. Nous espérons démarrer les travaux bientôt pour entrer dans nos locaux à la rentrée 2025.

Nous souhaitons rester à Saint-Ouen, une ville avec laquelle nous partageons beaucoup d’éléments communs, que ce soit dans le sport ou dans l’ouverture sociale.

O. R : Audencia est l’une des écoles qui recrute le plus en classes préparatoires. Seront-elles toujours aussi prioritaires dans les années à venir ?

S. T : Le programme Grande Ecole reste le flagship avec 550 places offertes chaque année, toutes prépas confondues, pour 45 en admissions sur titre (AST). Nous assistons cette année à un rebond des inscriptions en classes préparatoires. Est-il durable ? Je vois en tout cas deux éléments favorables : le meilleur rapport qualité / coût qui soit – peut-être au monde ! – pour une formation d’excellence. Dans un contexte inflationniste on sait que les familles y sont sensibles.

Un apprentissage intensif sur des temps longs apporte aux élèves de prépas des fondamentaux solides qui leur permettent de conserver leur capacité à évoluer toute leur vie.

O. R : La qualité du recrutement en prépa est actée par ce qu’on appelle le « Classement Sigem ». Audencia est de plus en plus challengée pour sa 7ème place. Comment comptez-vous résister cette année ?

S. T : La bataille est très serrée avec Neoma mais nous comptons bien conserver notre place. Notamment en communicant mieux sur nous-même, alors qu’Audencia a longtemps été assez timide sur ses points forts : l’international, les classements dans lesquels nous progressons tous (2 places de mieux dans Le Figaro, 1 place dans l’Etudiant et Le Point et même 29 places pour notre Master in Management dans The Financial Times cette année), nos parcours d’excellence à la carte, etc. Sans oublier notre deuxième place en termes de satisfaction des étudiants dans le classement Happy At School 2023.

O. R : Audencia propose plusieurs bachelors, dont deux hybrides. Quel bilan faites-vous de leur développement ?

S. T : Notre bachelor historique, le Bachelor in Management a un fort potentiel de développement en Ile-de-France. Le BBA Big Data & Management que nous délivrons avec Centrale Nantes demande des fondamentaux importants en mathématiques et concerne un public plus resserré : 30 étudiants par promotion chaque année. Quant au Bachelor Politiques publiques et management des organisations, que nous délivrons avec Sciences Po Saint-Germain, ses effectifs sont volontairement limités à 25/30 places chaque année alors que nous recevons beaucoup de demandes. De même pour le Bachelor Management de projet en design et communication que nous proposons avec l’Ecole de design de Nantes.

O. R : Vous venez de le démontrer : l’hybridation des compétences est au cœur du projet d’Audencia. Avez-vous de nouveaux projets en la matière ?

S. T : Nous réfléchissons effectivement à de nouveaux programmes. Nous sommes déjà partenaires de Centrale Nantes et de l’Ecole supérieure du bois dans les sciences et c’est plutôt vers le volet SHS (sciences humaines et sociales) que nous souhaiterions proposer de nouvelles offres alors que, jusqu’ici, nous avons assez peu travaillé avec Nantes Université.

A l’international également nous avons signé des accords avec des partenaires académiques qui ne se situent pas dans le champ des sciences de gestion : aux Etats-Unis avec la New York Film Academy, en Italie avec l’Istituto Lorenzo de Medici de Florence, etc.

O. R : A l’international Audencia est principalement implantée en Chine, à Shenzhen, en partenariat avec l’université de la ville, depuis 2016. Comment voyez-vous l’avenir de ce campus et avez-vous d’autres projets d’implantations ?

S. T : Nous avons même aujourd’hui quatre campus en Chine, à Shenzhen mais également à Shanghai, où nous délivrons des Bachelors, des BBA et des MBA à des étudiants chinois. Nous sommes également présents au Brésil et proposons des programmes en Afrique du Nord. Nous devons encore nous développer dans d’autres pays pour diversifier nos sources de revenu et passer de 1 700 à 2 000 étudiants formés à l’international chaque année.

O. R : Vous avez évoqué Gaïa, l’Ecole de la transition écologique et sociale qu’a créé Audencia. Quelles missions lui donnez-vous et bénéficiera-t-elle d’un bâtiment dédié comme il en a été question par le passé?

S. T : La sensibilité des équipes aux questions de transition est encore plus forte que je ne l’imaginais. C’est un formidable atout pour le développement de Gaïa. Qui se fera sans doute essentiellement à Paris et en Executive Education en proposant des certificats, des MOOC et des SPOOC. Le lancement d’un MBA est d’ailleurs en réflexion comme d’une chaire « Comment vivre en 2050 ? ». Avec les soucis que nous allons avoir sur nos ressources c’est tout un nouveau modèle de société qu’il faut inventer. Pour autant Gaïa n’aura pas de bâtiment dédié.

O. R : L’apprentissage est devenu le nouvel alpha et oméga de beaucoup d’écoles. Qu’en est-il à Audencia?

S. T : Nous avons aujourd’hui seulement 517 élèves du programme Grande Ecole en apprentissage, 950 tous programmes confondus. Nous voudrions maintenant développer l’apprentissage de manière raisonnée. L’apprentissage doit correspondre à des profils d’étudiants sans être prédominant.

O. R : L’expérience étudiante est également une dimension de plus en plus importante dans les écoles. Que représente-t-elle pour Audencia?

S. T : L’encadrement et les services aux étudiants sont parmi nos points forts avec une forte offre de services qui vont jusqu’à des cours de sophrologie par exemple. Notre service carrière est également très actif. Notamment pour aider les étudiants à bien choisir leurs programmes à la carte.

O. R : La place de la recherche dans les écoles de management fait toujours débat. Quelle est votre position à ce sujet?

S. T : La recherche amène beaucoup aux écoles de management. Audencia est bien également une « research school » avec des chercheurs qui ont de l’impact sur les la société et les organisations. Nous avons d’ailleurs réalisé récemment un document sur neuf projets emblématiques de nos enseignants-chercheurs qui vont d’une étude avec les femmes masaïs sur l’entreprenariat et l’agriculture régénérative à comment lutter contre la corruption au Bhoutan en passant par la recherche de solutions pour améliorer les normes de gouvernance et de reporting. Les chercheurs en gestion doivent être plus visibles !

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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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