ECOLE D’INGÉNIEURS, POLITIQUE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR

« Être soi-même en entreprise et dans l’enseignement supérieur » : l’ESIEA affirme son engagement pour la communauté LGBT+

A l’occasion du mois des fiertés, l’école d’ingénieurs ESIEA organisait le 11 mai une table-ronde intitulée « L’inclusion des personnes LGBT+ : être soi-même en entreprise et dans l’enseignement supérieur », sur son campus d’Ivry-sur-Seine. L’occasion pour Sophie Poirier, responsable vie associative et étudiante, de rappeler l’engagement de l’école pour « un environnement durable et inclusif », alors qu’à la rentrée prochaine, elle s’apprête à signer la « Charte d’engagement LGBT+ de l’enseignement supérieur », de l’association L’Autre Cercle.

Être visible ou invisible ?

Des témoignages touchants ont ponctué cette après-midi, les intervenants s’étant pour certains livrés sur la difficulté à se rendre « visibles » dans l’entreprise. Être visible, c’est faire savoir son homosexualité à son environnement professionnel, c’est être « out ». Pour Nicolas Le Ray Pelletier, responsable RH chez Capgemini, être « out » n’a pas été une tâche facile. Pourtant, celui qui considérait dans son entreprise précédente, que « ce n’était même pas un sujet », a bien changé d’avis depuis. A travers l’exemple de la machine à café du lundi matin, où les récits du week-end passé deviennent révélateurs d’une vie privée qu’il n’avait pas envie de dévoiler, il décrit « la démarche de mensonge par omission » dans laquelle il s’est engouffré année après année, allant jusqu’à prétendre être hétérosexuel et inventer le prénom d’une petite amie tout à fait imaginaire. Mais il n’est pas le seul. 14% des homosexuels invisibles font croire qu’ils sont hétérosexuels. C’est ce que pointe le dernier baromètre LGBT de l’association « L’Autre Cercle » en 2017.

Ne pas être visible c’est aussi ne pas pouvoir bénéficier de certains avantages dont peuvent bénéficier les couples. Par exemple le congé paternité ou la mutuelle par exemple comme le souligne Maouèle Bouhraoua, responsable chez LGBT Talents, initiative lancée par l’association ESCAPE de l’ESCP Business School, spécialisée dans l’inclusion de la communauté LGBT dans le monde professionnel. Celle qui travaillait auparavant dans l’éducation nationale, assume ne pas avoir souhaité être visible auprès de ses élèves, décrivant un phénomène systémique, où « 26% des personnes LGBT indiquent avoir vécu des actes de discrimination par leur direction, 50% préfèrent rester invisibles dans leur organisation, et 18% des managers sont mal à l’aise vis-à-vis des coming out des employés », selon le baromètre de l’Autre Cercle.

L’importance des alliés

Nicolas le Got, président de l’association LGBT+ « Mobilisnoo » chez Orange, a, comme il le dit, « clarifié tout ça au fur et à mesure ». Ni « out » auprès de sa famille, ni auprès de ses amis, ni auprès de son entreprise pendant des années, il mesure aujourd’hui la sérénité de pouvoir en raconter un peu plus sur sa vie, sans devoir se cacher ou mentir. Le coming out se fait fréquemment à partir d’un cercle de confiance au départ, qu’ils qualifient eux d’« alliés ». Ces alliés revêtent une importance capitale. Ils peuvent déterminer le bien-être dans l’entreprise, voire la poursuite d’une carrière, comme ce fût le cas pour Nicolas le Ray Pelletier, qui estime que l’ « on perd 25% de productivité […] en faisant gaffe à tout ». Nicolas le Got a quant à lui, pu compter sur une collègue, présente pendant le parcours de transition, comme après, pour dénoncer des comportements qu’il n’oserait peut-être pas relever de lui-même. Mais si se rendre visible sonne comme une délivrance pour les quatre intervenants, ils insistent sur la nécessité de laisser le choix, avant tout.

Passage à l’action

Face à ces récits, ils œuvrent chacun au sein de leur organisation en faveur d’une inclusion toujours plus prégnante, qui prenne en compte les différents enjeux liés à l’appartenance à la communauté LGBT. Valérie Berjamin, directrice RSE chez Prophecy, entreprise spécialisée en cybersécurité, raconte qu’avec la croissante forte que connait l’entreprise, on relève par la même une croissance forte des prises de conscience des enjeux sociétaux. Il faut pouvoir « exprimer sa singularité sans avoir à craindre quoi que ce soit », décrit l’intervenante. Mais pour pouvoir exprimer sa singularité en entreprise, il s’agirait d’opérer une sensibilisation préalable tant des managers que des étudiants qui se dirigent vers le marché du travail.  Chez LGBT Talents, des intervenants viennent exposer leurs réflexions dans des collèges et lycées par exemple. Chez Orange, un guide LGBT+ est distribué aux managers et salariés, pour savoir comment « accompagner dans le parcours de transition » comme l’a par exemple fait Nicolas le Got, aux côtés d’une alternante, dans l’entreprise, comme dans son école.

La question du passage de la vie étudiante à la vie active est pointée du doigt par Valérie Berjamin de Prophecy. Il ne s’agirait pas de créer une évolution à deux vitesses, où la prise de conscience étudiante serait plus avancée que celle du monde de l’entreprise, et où l’entrée en carrière serait synonyme d’un pas en arrière. Chez Prophecy, la responsable RSE explique différentes étapes de sa stratégie : l’adhésion à des chartes (charte de la diversité, charte de l’Autre Cercle), la création d’un dispositif qui promeut l’inclusion (règlement intérieur qui réaffirme la lutte contre les discriminations, code de bonne conduite, dispositif d’alerte permettant de signaler des comportements inappropriés, groupes de travail, création d’un réseau d’alliés…). Un ensemble d’outils dont elle garantit le « très bon accueil de la part des managers comme des collaborateurs ». Chez Capgemini, on opte pour une heure de présentation des engagements RSE dès le premier jour d’onboarding, informant des réseaux et associations existants au sein de l’entreprise… Une entreprise « LGBT friendly » attire désormais de plus en plus de profils, jusqu’à devenir un critère de sélection pour certains diplômés. L’ESIEA, dont la directrice qualité et RSE fait partie du conseil d’administration, souhaite inscrire la lutte contre les discriminations au cœur de son projet. En signant la Charte d’engagement LGBT+, elle deviendra alors une des premières écoles d’ingénieurs à se mobiliser sur le sujet.

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