ORIENTATION / CONCOURS

Parcoursup : 5 ans, toujours autant de questions

Le 18 janvier 2018 ouvrait pour la première fois le site Parcoursup, qui venait prendre le relais du très contesté Admissionpostbac. Cinq ans après, alors qu’a ouvert le 17 janvier 2024 son étape de formulation des vœux qui court jusqu’au 14 mars prochain, Parcoursup rencontre les mêmes critiques que son prédécesseur : compliqué, opaque, long, etc. à tel point que nombre de formations mettent en avant dans leur communication qu’elles sont « hors Parcoursup ». Cette année quelques nouveautés apparaissent comme la possibilité de comparer les établissements.

La question des critères permettant d’intégrer telle ou telle formation est centrale à tel point que, dans rapport d’information publié en juin 2023, une mission sénatoriale proposait que soit élaborée une « méthodologie commune de présentation et d’évaluation par type de formation ». C’est sur cette angoisse que surfent coachs scolaires et nouveaux sites comme Suptracker ou Supeasy venant concurrencer les sites d’orientation classiques et toute une myriade de nouveaux acteurs. l’Etudiant s’est justement associé au spécialiste du recueil d’avis Custplace pour proposer une plate-forme d’avis étudiants 100% authentifiés qui regroupe 65 000 avis d’étudiants scolarisés dans 8 600 établissements.

 Développé par HEADway Advisory le site Monbacetmoi permet aux lycéens d’estimer leurs chances d’intégrer telle ou telle filière en fonction de leurs choix de spécialités.

Comment les établissements sélectionnent. Si les candidats sont aussi circonspects sur la façon dont on les recrute c’est aussi parce que les établissements s’arrachent les cheveux pour distinguer un candidat d’un autre. En 2023 les spécialités avaient enfin été évaluées mais avec souvent une telle mansuétude de la part des lycées qu’elles n’apportaient pas grand-chose de plus qu’un contrôle continu très laxiste pendant les années Covid. Certains viennent même à se demander si certaines spécialités ne seraient pas particulièrement généreuses pour attirer le plus d’élèves… Ne pas pouvoir utiliser les notes de spécialité en 2024 ne va finalement pas manquer tant que ça aux établissements.

En revanche les professeurs risquent de voir de plus en plus leurs notations de plus en plus contestées. « Une ambiance dégradée où le « consumérisme » parental s’est accentué » raconte Le Monde.  Chaque note est devenue un enjeu, avec des parents qui ont acquis la conviction que la moindre évaluation peut venir décider du destin entier de leur enfant et de sa poursuite d’études », s’exclame Claire Guéville, secrétaire nationale responsable du lycée au SNES-FSU et professeure d’histoire-géographie près de Rouen. Un sujet déjà ancien que la réforme du bac vient exacerber au point que de plus en plus de parents vont jusqu’à saisir la médiatrice de l’éducation nationale. Son dernier Rapport établit que si 16 % des saisines sont des contestations portent sur l’évaluation et la notation en cours d’année, ce domaine a été multiplié par 7 en cinq ans (108 saisines en 2017 et 744 en 2022).

Et comme du côté des établissements d’enseignement supérieur on ne sait pas quelle est la moyenne nationale de notation des spécialités on regarde avec circonspection les notes. Mais comment dire aux candidats – excellents d’apparence – qu’ils sont en fait tous excellents quand leur dossier est refusé ? Si les appréciations des professeurs sont souvent plus signifiantes que les notes les formations qui proposent en plus en concours se félicitent en tout cas de l’avoir conservé.

Le recrutement est particulièrement délicat pour les professeurs de classes préparatoires qui n’ont à disposition que des notes, des appréciations et, pour le moment encore, le nom du lycée du candidat. La nature ayant horreur du vide des professeurs de classe préparatoires de Sainte-Geneviève ont créé un test national, le TeSciaA, qui a pour objectif de « mieux repérer les talents en mathématiques, mesurant à la fois les compétences acquises et la qualité de réaction à des situations nouvelles ». Test dont les résultats peuvent être mentionnés dans le dossier Parcoursup pour aider les professeurs de classes préparatoires scientifiques à recruter. Autre idée du côté de Rocket School, une école du numérique depuis 5 ans qui possède 10 campus en France et intègre cette année Parcoursup. Après avoir sélectionné Rocket School sur Parcoursup les candidats ont accès au test de personnalité AssessFirst qui leur donne une évaluation sur 100 de leur potentiel sur les métiers que préparent la formation.

Comment les élèves choisissent. Selon une enquête réalisé par OpinionWay pour l’École des Mines de Saint-Etienne (lire plus bas) les principaux critères de choix des élèves dans leur orientation postbac sont : l’intérêt de la formation (69%), sa localisation géographique (62%), le coût de la formation (42%) et le prestige de l’établissement (41%)

Mais voilà, selon une autre enquête, menée par l’association Article 1, 70% de ces mêmes élèves se disent stressés et paniqués. Un taux en hausse puisqu’ils étaient 66% en 2023. Comme en 2023, ils sont 47% à être encore hésitants sur leurs choix d’orientation. Logique puisque 58% d’entre eux déclarent n’avoir pas été suffisamment accompagnés dans leurs choix d’orientation depuis la rentrée.

Pour s’informer 72% des répondants déclarent utiliser les réseaux sociaux pour s’informer sur leur orientation avec TikTok en tête (73%), suivi d’Instagram (62%), YouTube (43%) et Snapchat (5%). Pour autant, les canaux les plus utiles selon les répondants pour faire leur choix d’orientation sont :

  • à 43% les échanges avec des étudiants (41% en 2023) ;
  • à 30% les visites de salons physiques ou virtuels (29% en 2023) ;
  • à 29% l’information sur les sites web dédiés à l’orientation (43% en 2023) ;
  • à 27% les échanges avec la famille ou les amis (32% en 2023).

L’échange avec le professeur principal reste à la même place qu’en 2023 pour les lycéens avec 26 % alors que le conseiller d’orientation est en revanche en augmentation : 23% en 2024 contre 17% en 2023

 Information, choix et catégories sociale. Ces dernières années Parcoursup a délivré chaque année plus d’informations sur les formations pour aider les élèves à faire leur choix. Cette année il est par exemple possible de comparer des formations et les taux d’insertion professionnelle des étudiants. Pour autant nombre d’informations restent cachées. Le site Suptracker va ainsi à leur recherche et permet par exemple de connaitre la proportion d’élèves titulaires de mentions au bac pour chaque formation. Ce que se refuse à donner Parcoursup, semble-t-il pour ne pas décourager les candidats.

Mais justement n’est-ce pas ce manque d’information qui conduit les plus défavorisés à s’autocensurer s’interrogent les experts de l’Institut des politiques publiques (IPP) dans leur note Confiance en soi et choix d’orientation sur Parcoursup : Enseignements d’une intervention randomisée. Leur constat, bien connu : « Parmi les meilleurs élèves, les filles et les élèves d’origine sociale défavorisée ont nettement moins confiance en eux que les garçons et les élèves d’origine sociale favorisée ». Mais un constat auquel ne s’arrête par l’IPP qui propose une solution : informer les élèves sur leur position dans la distribution nationale des moyennes générales de terminale des notes « annule entièrement le rôle joué par la confiance dans les choix d’orientation ». Cette information comblerait « 95 % de l’écart initial dans la probabilité d’admission en CPGE entre élèves d’origine sociale favorisée et défavorisée, et 72 % de l’écart entre filles et garçons ». En résumé les élèves qui connaissent leur rang réel dans la distribution formulent des vœux d’affectation qui correspondent davantage à leur niveau réel – les « bons » élèves continuent à formuler des vœux plus ambitieux que les « moins bons » élèves, mais leurs vœux ne sont plus influencés par la perception de ce rang, contrairement aux élèves du groupe « témoin » auxquels cette information n’a pas été fournie.

L’impact de l’information est particulièrement fort sur les formations sélectives et, au premier chef, les CPGE (classes préparatoires aux grandes écoles) : l’intervention augmente fortement la probabilité que les très bons élèves d’origine sociale défavorisée se portent candidats à une CPGE et, plus généralement, le niveau de sélectivité des formations qu’ils incluent dans leurs liste de vœux. Cet effet plus marqué chez les élèves défavorisés permet de combler entièrement l’écart initial dans leur taux de candidature à une CPGE par rapport aux élèves socialement favorisé, qui est de l’ordre de 30 points de pourcentage dans l’échantillon de l’IPP qui conclut : « Les élèves défavorisés n’ont pas seulement une plus forte propension à se porter candidat pour ces formations : leurs chances d’admission en CPGE augmentent également lorsqu’ils sont informés sur leur rang. L’intervention comble en effet 95 % de leur sous-représentation parmi les admis dans ces filières par rapport aux élèves favorisés ». Plus vous donnez d’information, plus vous permettez à ceux qui n’en bénéficient pas naturellement de faire des choix raisonnés…

Parcoursup 2024 mode d’emploi. Un mois après l’ouverture de Parcoursup.gouv.fr permettant aux candidats de consulter l’offre de formation disponible, la phase d’inscription et de formulation des vœux de Parcoursup a débuté ce mercredi 17 janvier 2024 en début d’après-midi. La plateforme propose comme l’an passé environ 23 000 formations reconnues par l’État.

Plusieurs nouvelles fonctionnalités ont été implémentées :

  • « Favoris » : les candidats peuvent désormais conserver la mémoire de leur recherche de formations et apporter pour eux-mêmes des appréciations qu’ils pourront conserver et retrouver au moment de formuler leurs vœux (fonction « favoris ») ;
  • Rappel journées portes ouvertes : pour ces formations conservées en favori, les candidats peuvent recevoir un rappel calendrier des journées portes ouvertes ;
  • Comparateur : les candidats peuvent comparer les formations en les sélectionnant
  • Calendrier :  un module calendrier  permet de visualiser sur une agenda en ligne les dates clés de Parcoursup

Les candidats ont jusqu’au jeudi 14 mars 2024 inclus pour formuler 10 vœux maximum, non hiérarchisés, puis jusqu’au mercredi 3 avril 2024 inclus pour finaliser leur dossier et confirmer leurs vœux.

Après l’analyse des dossiers par les enseignants des formations supérieures, les candidats recevront une réponse pour chacun de leurs vœux le 30 mai 2024 et les propositions d’admission seront envoyées tout au long de la phase d’admission principale, qui sera close le 12 juillet 2024, à l’issue des résultats du baccalauréat.

Comme chaque année, les lycéens bénéficieront d’un accompagnement par les équipes éducatives de leur établissement. Parallèlement, plus d’une vingtaine de sessions de tchats et Lives ainsi qu’une page Nos conseils pour formuler vos vœux avec des  vidéos tutorielles sont également proposées aux candidats et aux familles.

Enfin, les services d’assistance des ministères chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur seront disponibles à partir du 17 janvier pour accompagner les candidats et répondre à leurs questions :

  • le numéro vert 0 800 400 070 (accessible aux personnes sourdes ou malentendantes) ;
  • la messagerie « contact » depuis le dossier Parcoursup ;
  • les réseaux sociaux de Parcoursup (Twitter, Facebook, Instagram).

 Pour compléter l’information les résultats complets de la campagne Parcoursup 2023 sont disponibles en open data  avec un outil de datavisualisation accompagné de sa carte interactive sur l’adresse data.enseignementsup-recherche.gouv.fr.

 

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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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