ECOLES DE MANAGEMENT, PORTRAIT / ENTRETIENS

« Nous voulons sécuriser la place de TBS Education parmi les 10 meilleures écoles françaises et les 50 meilleures européennes »

TBS Education est en plein développement. Après Barcelone en 2022 c’est à Paris qu’elle a ouvert un nouveau campus en 2023 alors les fondations d’un nouveau bâtiment à Casablanca ont également été posées. Mais son actualité n’est pas qu’immobilière : des actions ont notamment été entreprises pour mieux accueillir les élèves issus de classes préparatoires nous explique sa directrice générale, Stéphanie Lavigne, élue directeur/trice d’une école de management de l’année 2023 par l’Association des professeurs de classes préparatoires économiques et commerciales (APHEC) et HEADway Advisory.

Olivier Rollot : Les élèves de classes préparatoires sont très importants pour TBS Education. Cette année votre école a été particulièrement active envers eux. Pouvez-vous nous rappeler les actions que vous avez mises en place ?

Stéphanie Lavigne : En juillet 2023 nous avons organisé sur notre campus de Barcelone un séminaire destiné à des élèves de première année de classes préparatoires économiques et commerciales générales (ECG). Accompagnés de membres du conseil d’administration de l’Aphec ils sont un peu plus d’une cinquantaine, issus de toute la France, à être venus découvrir une école de management vue de l’intérieur, un environnement qu’ils aspirent à intégrer avec un campus tout neuf.

A Toulouse nous avons également entrepris de recevoir des élèves des lycées toulousains tout au long d’un « Start up week-end ». Plus d’une centaine nous ont rejoint pour travailler avec des entreprises à des projets innovants et recevoir des prix. Nous avons d’autres partenariats avec les lycées pour faire découvrir nos cours et l’école.

O. R : Comment mettez-vous en musique le « continuum » classes préparatoires / Grandes écoles?

S. L : C’est toute une dynamique que nous avons mise en place pour faire entrer les classes préparatoires dans les murs de l’école. Nous avons par exemple créé une « Semaine des humanités » avec des cours et des conférences obligatoires pour les élèves de L3 du Programme Grande Ecole. Des cours de géopolitique, SHS (sciences humaines et sociales), sociologie ou encore sciences du vivant pour des élèves qui souhaitent de la continuité avec les programmes de classe préparatoire.

O. R : 2023 a été une année importante pour TBS Education qui fêtait ses 120 ans et l’ouverture de son nouveau campus parisien !

S. L : Célébrer nos 120 ans a été génial ! Cela nous a permis de nous interroger sur sa création et l’utilité de l’école aujourd’hui. Nous avons également envoyé une vidéo à toutes les entreprises de notre territoire pour réactiver leur fierté envers l’école et cela nous a amené beaucoup de contacts.

Avec les étudiants nous avons posé une grande boite en bois de captation vidéo dans l’école pour leur permettre d’enregistrer des messages d’apprenants imaginant leur futur, le futur de l’école. Nous les encapsulons pour les libérer dans dix, vingt ou trente ans.

A Paris, après le très bon accueil initial des étudiants, nous allons continuer des travaux pendant deux ans pour finaliser le campus. J’ajoute qu’à Barcelone nous sommes installés depuis un an dans un immeuble tout neuf. Enfin les fondations de notre nouveau campus de Casablanca ont été posées.

O. R : Du moins bon côté des choses vous avez dû abandonner le projet de construction du nouveau campus toulousain. Où en êtes-vous aujourd’hui ?

S. L : C’était devenu impossible de le financer. Il valait mieux arrêter. Pour rappel, le projet avait démarré en 2019 avec l’objectif de réunir toutes nos formations dans le même bâtiment.

Mais ensuite nous avons dû affronter la crise Covid, le report des élections municipales, la guerre en Ukraine, l’inflation. Au total le surplus de coûts atteignait 85 M€ pour un budget initial de 94 M€. Rien que l’augmentation des taux d’intérêt de 0,4% à 4,9% nous coutait 42 M€ de plus ! 30 M€ de plus sur les matières premières et les devis des entreprises. Sans oublier des études de sol.

Pour autant nous sommes bien conscients que l’immobilier est devenu un facteur de différenciation majeur entre les écoles de management en proposant de nouveaux usages et en ouvrant des résidences étudiantes. Heureusement nos bâtiments principaux actuels, qui datent de 1985, ont bien vieilli mais nous n’en oublions pas pour autant le projet. Fin janvier 2024 nous déciderons s’il faut nous lancer dans un nouveau projet ou conserver l’existant. Dans tous les cas nous ne voulons pas dépasser les 100 M€ d’investissement pour un budget annuel de l’école de 65 M€.

Il faudra aussi bien mesurer ce que la centralité de notre campus actuel nous apporte avec la proximité de la fac d’économie et du centre-ville de Toulouse. Et ce que nos 6 000 étudiants apportent au quartier. Après notre passage au statut d’EESC nous avons reçu la pleine possession un autre bâtiment de 10 800 m2, à seulement 15 minutes en bus du centre-ville, avec un hectare de terrain sur lequel il est possible de bâtir.

O. R : Ce possible nouveau campus ressemblera-t-il au projet initial ?

S. L : Nous testons de nouveaux usages régulièrement et projetons les réussites sur nos futurs projets immobiliers. Aujourd’hui nous expérimentons par exemple l’absence de bureau fixe ce qui n’était pas du tout prévu en 2019.

De même nous avons aujourd’hui 30 professeurs qui travaillent sur le développement de l’Intelligence artificielle (IA) et les questions éthiques que cela impose. Depuis deux ans nous avons adopté le statut de société à mission. Nous travaillons en permanence à comment contribuer à la société.

O. R : A quel niveau situez-vous TBS Education au sein de la communauté des Grandes écoles de management ?

S. L : Nous voulons sécuriser notre place parmi les 10 meilleures écoles françaises et les 50 meilleures européennes. A l’international TBS Education se classe cette année au 37ème rang des meilleurs masters en management du Financial Times en progression de 13 places. Nous gagnons également 12 places dans le classement des Executive-MBA. Pour autant nous considérons que les classements sont un peu comme un cours de bourse : ils ne reflètent pas forcément la valeur réelle d’une école. Une école c’est bien plus qu’un classement !

Nous avions d’ailleurs créé initialement notre direction « data » afin de répondre aux questions des classements. Aujourd’hui elle s’est professionnalisée pour répondre également aux questions des accréditeurs.

O. R : Quels sont les points forts de TBS Education pour attirer les élèves ?

S. L : Nous entendons faire la différence auprès des élèves de classes préparatoires avec le soutien de professeurs qui connaissent la qualité de nos formations. Pour analyser notre attractivité, nous faisons des focus groupe auprès de tous nos élèves qui ont choisi de nous rejoindre alors qu’ils pouvaient intégrer une école mieux classée. Ce qu’il en ressort c’est qu’ils nous ont choisi pour notre centralité, notre engagement en faveur du développement durable, notre capacité à les faire étudier sur nos quatre campus et l’attention particulière que nous portons à nos étudiants avec une vraie personnalisation de leur suivi. Il faut savoir que nous professeurs sont présents tous les jours sur le campus, constituant ainsi une véritable culture propre à TBS Education. C’est sans doute aussi pour cela que nous sommes à la troisième place du classement 2023 HappyAtSchool des écoles où il fait bon étudier.

Être triple accrédités (AACSB, Amba, Equis) a par ailleurs un impact international très fort pour signer des accords de partenariat et faire venir des étudiants internationaux.

O. R : TBS Education, TSM qui vient d’obtenir l’accréditation Equis, TSE, la concurrence n’est-elle pas de plus en plus rude à Toulouse ?

S. L : Nous ne sommes absolument pas en concurrence avec la Toulouse School of Economics. Ni d’ailleurs avec TSM avec laquelle nous partageons d’ailleurs une école doctorale.

O. R : Que représente aujourd’hui l’apprentissage pour TBS Education ?

S. L : Depuis 2019 nous sommes passés de 20% d’élèves en apprentissage en M2 à 85% (l’alternance est possible en M1 et M2 mais pas en L3). De plus en plus d’étudiants de l’université nous rejoignent d’ailleurs grâce à cela en admission sur titre (AST). Nos 30% de boursiers sont particulièrement nombreux à choisir de suivre leur cursus en apprentissage. Cela donne à nos diplômés une employabilité renforcée qui fait encore plus la différence avec l’université.

En revanche l’apprentissage est encore très peu développé dans notre bachelor où il n’est accessible qu’en troisième année et alors que nous recevons beaucoup de demandes des entreprises et des étudiants.

Ce développement de l’apprentissage est spectaculaire mais nous devons bien prendre garde à ne pas basculer dans un modèle « tout apprentissage » alors que les financements de l’État pourraient, et sont déjà pour certains, moins élevés.

O. R : Cette montée en puissance de l’apprentissage a-t-elle changé votre modèle pédagogique ?

S. L : Il a fallu revoir toutes les maquettes de cours et nous développer à Paris où sont signés le plus de contrats avec les entreprises. Nous avons même développé l’alternance en mastères spécialisés avec deux MS qui fonctionnent très bien.

O. R : TBS Education est l’une des toutes premières écoles à pratiquer des frais de scolarité modulés selon les revenus des familles. Comment cela fonctionne-t-il ?

S. L : Depuis la rentrée 2021, tous les étudiants qui entrent en première année du PGE voient effectivement leurs frais de scolarité modulés en fonction de cinq tranches de réduction allant de 5 à 50% des frais de scolarité.

O. R : TBS Education a adopté le statut de société à mission. Qu’est-ce que cela change dans votre pédagogie ?

S. L : Tous nos cours ont intégré les objectifs de développement durable de l’Onu après une révision de leurs maquettes pédagogiques. De même 40% de nos publications de recherche intègrent le sujet et un centre d’excellence réunit les professeurs concernés. Nous sommes pionniers dans cette dimension DD&RS depuis quinze ans. Ce sont par exemple nos associations étudiantes qui organisent chaque année les Assises nationales étudiantes du développement durable (ANEDD).

Pour aller plus loin nous avons créé une direction de la transition sociétale qui prend en charge toutes les questions d’inclusion, de transition environnementale, de vivre ensemble ou encore de lutte contre les stéréotypes.

Nous avons développé un projet pour accompagner les jeunes filles dans leur recherche d’emploi et les aguerrir sur les questions salariales. Pourquoi les filles pensent-elles gagner moins que les garçons ? Quand on leur dit qu’aujourd’hui la rémunération moyenne de nos diplômés est de 40 k€ par an, elles se placent à 36 k€ quand les garçons se voient à 45 k€ ! Depuis cette année nous informons également les garçons sur ces questions d’égalité. Un étudiant passé par TBS Education doit développer de bons comportements ! Nous même avons autant de professeurs femmes qu’hommes.

O. R : Vos campus sont-ils exemplaires en matière environnementale ?

S. L : Nous développons un campus éco-responsable et avons déjà signé une charte sur la mobilité qui prévoit le versement d’indemnités kilométriques pour ceux de nos personnels qui choisissent de venir sur nos campus à vélo. Les transports en commun sont gratuits pour tous nos étudiants. Quant à leur mobilité internationale elle se régule bien avec moins d’allers-retours et un repli sur les pays européens.

O. R : Comment qualifieriez-vous la génération actuelle de vos étudiants ?

S. L : C’est une génération positive qui interpelle beaucoup les générations précédentes tout en étant force de proposition. Ils sont hyperconnectés avec le risque de passer trop vite d’un sujet à l’autre.

O. R : Une question plus personnelle : comment concevez-vous votre poste de Directrice générale après maintenant plus de quatre années passées à la direction de TBS Education ?

S. L : Un bon directeur d’école de management regarde droit devant et développe son école pour cadrer au mieux les besoins des entreprises. Voici la théorie. Dans la pratique nous passons surtout du temps à nous justifier auprès des accréditeurs internationaux comme français. Nous nous justifions en permanence de notre niveau de qualité. Nous nous justifions dans les classements. Nos écoles sont devenues des machines à produire des chiffres et des explications. A peine avons-nous rendu un rapport que nous passons à un autre. En tant que Directrice générale, je reste toutefois convaincue que notre mission se situe au niveau de la bonne adéquation entre les besoins actuels et futurs du monde économique et les compétences des apprenants. Nous pouvons ainsi assurer une bonne employabilité et aider à concevoir des trajectoires professionnelles nouvelles pour chacune et chacun.

Les précédents directeurs/trices de l’année

Avant Stéphanie Lavigne ont été élus directeurs/trices d’une école de management de l’année :

  • 2017 : Alice Guilhon (Skema BS)
  • 2018 : Frank Bournois (ESCP)
  • 2019 : Delphine Manceau (Neoma BS)
  • 2020 : Emmanuel Métais (Edhec BS)
  • 2021 : Stéphan Bourcieu (BSB)
  • 2022 : Alexandre de Navailles (Kedge BS)
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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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