ECOLE D’INGÉNIEURS, PORTRAIT / ENTRETIENS

«Une école comme CPE Lyon est un modèle économique efficace»: entretien avec Gérard Pignault

Etablissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général (EESPIG), CPE Lyon défend un modèle intermédiaire entreprenariat enseignement supérieur public et privé. A l’heure où les effectifs des écoles d’ingénieurs se doivent de suivre le cours de la réindustrialisation du pays son directeur, Gérard Pignault, trace avec nous le portrait d’une école en plein développement.

Olivier Rollot : Le ministre de l’Économie, Bruno Lemaire, pousse les écoles d’ingénieurs – et notamment celles qui dépendent de son ministère – à augmenter leurs promotions. Est-ce qu’une école comme CPE Lyon peut s’engager dans la même voie ?

Gérard Pignault : Une école comme CPE Lyon, c’est-à-dire un établissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général (EESPIG), est un modèle économique efficace qui coute beaucoup moins cher à l’État qu’une formation publique. C’est donc d’abord dans les EESPIG qu’il faut créer des places.

Notre modèle économique est stable avec des coûts de scolarité de 3 000 € en classe préparatoire puis 8 000 € pour les trois années suivantes. C’est-à-dire aux alentours de 30 000€ pour les cinq années de scolarité. Ce qui est rendu possible parce que nous n’avons pas à rémunérer d’actionnaire.

O. R : Vous venez de rénover vos locaux et d’en aménager de tout nouveaux. Quel investissement cela représente-t-il ?

G. P : Nous avons pu bénéficier de 50 millions d’euros d’investissements avec le concours de la Région, de la Métropole et de l’État. Nous avons ainsi pu rénover 4 000 m2 de nos locaux qui sont mieux agencés. Nos laboratoires d’enseignement en chimie, biotechnologie sont aujourd’hui les plus modernes de France. Côté numérique, nos salles d’informatique se présentent sous la forme d’ilots de quatre ou cinq élèves qui entoureront les professeurs. C’est beaucoup plus efficace – pas d’élèves en fond de classe ! – tout en se rapprochant du fonctionnement des entreprises. En robotique, électronique, les conditions sont aussi optimales.

Nous bénéficions également pour ce domaine de formation de 3 000 m2 dans un tout nouveau bâtiment, le bâtiment Irène Joliot-Curie. Nous y partageons les locaux avec le Laboratoire Institut des nanotechnologies de Lyon, Unité Mixte de Recherche 5270, grande unité d’électronique partagée avec le CNRS, Lyon 1, Centrale Lyon et l’INSA de Lyon, qui opère une salle blanche de 600 m².

Ces nouveaux locaux nous permettent de lancer à la rentrée prochaine un tout nouveau diplôme d’ingénieur en Physique et Systèmes Microélectroniques, en alternance.

O. R : Mais y a-t-il assez de vivier aujourd’hui pour former les ingénieurs dont la France a besoin ?

G. P : Il faut aussi élargir notre offre, pour atteindre de nouveaux viviers d’élèves. Nous avons travaillé avec l’État à la création d’une nouvelle filière en informatique et cybersécurité destinée à des élèves titulaires de BTS. Nous lançons en septembre 2023 un nouveau diplôme en électronique, Physique et Systèmes Microélectroniques, et dans le futur, avons un projet de diplôme en biotechnologie binational pour attirer plus d’élèves étrangers. Enfin nous devons attirer plus de filles. Nous sommes en quelque sorte en train d’arriver au bout du vivier de garçons !

O. R : CPE est une école internationale ?

G. P : Oui et depuis longtemps. Nos élèves ont des opportunités incroyables en durées et destinations à l’étranger. Nous devons maintenant passer à la création de véritables diplômes européens, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Italie…

O. R : Quelle place occupe la recherche à CPE Lyon ?

G. P : Elle est essentielle. Elle est dans l’ADN de l’école. Au sein du nouveau bâtiment que j’évoquais nous avons par exemple accès à une salle blanche de 600 m2. Nous sommes également partenaires d’établissements publics, du CNRS et Lyon 1 en particulier, qui nous permettent de conduire de véritables synergies pour former des doctorants. C’est un vrai souci aujourd’hui : les taux de vacance des doctorants augmentent alors que la compétition pour les recruter est internationale. Or cela intéresse énormément les laboratoires de recruter des ingénieurs de haut niveau.

O. R : Beaucoup d’écoles sont maintenant multi-implantées. Avez-vous des projets de nouvelles implantations ?

G. P : Non. Nous nous situons dans le cœur industriel français avec des liens très forts avec les universités et le CNRS. Lyon est à la fois la limite nord et sud de la France, accessible de partout, au sein d’un écosystème en plein essor avec Grenoble et Saint-Etienne. La Région est attractive, avec par exemple l’implantation récente de l’Ensam à Saint-Etienne.

O. R : Comment définiriez-vous l’identité de CPE Lyon dans cet environnement de plus en plus concurrentiel ?

G. P : CPE Lyon est une école hybride entre la chimie et les sciences du numérique qui développe également les biotechnologies. Une école des sciences de la transformation au sens large – matière, information, vivant. Bientôt nous dispenserons sept diplômes d’ingénieur et un mastère spécialisé. Nous sommes aussi la plus importante école de chimie française en nombre d’élèves, une spécialité qui reçoit 50% de filles ce qui nous permet au total de diplômer 35% de filles chaque année, bien au-delà de la moyenne des école d’ingénieurs. Notre comité exécutif est d’ailleurs à parité hommes-femmes.

Je viens de l’évoquer : nous sommes placés au cœur d’un écosystème industriel de premier plan. Et j’insiste : être un EESPIG c’est réinvestir tous ses moyens dans son école.

CPE Lyon est aussi une école qui peut être fière de compter trois prix Nobel parmi ses diplômés et directeur, et d’avoir diplômé l’actuel P-DG de Cap Gemini et du groupe SNFWater Science .

Autre point fort : nous accordons une attention particulière à la formation des élèves. Notre jury peut passer 50 minutes à discuter du cas d’un élève en difficulté pour être certain que nous avons tous les éléments pour statuer sur son cas. C’est notre cœur de métier de bien former nos élèves et de les amener à un emploi.

Enfin nous sommes une école entrepreneuriale avec un président qui a été le numéro 2 du groupe SEB, et la présence de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon Métropole dans nos instances proches.

O. R : Comment recrutez-vous vos élèves ?

G. P : A 30% au niveau postbac sur Parcoursup, dans le cadre du concours Puissance Alpha avec des classes préparatoires associées, et à 70% à bac+2 via d’autres voies d’accès : le Concours Commun INP ou admissions sur titre sur dossier et entretiens après BUT ou licence et BTS pour la filière Informatique et cybersécurité

Le concours Puissance Alpha réunit 18 écoles non lucratives et propose un écrit commun suivi d’une étude des dossiers. Chaque école possède ses propres coefficients.

O. R : N’est-ce pas de plus en plus difficile de recruter sur dossier quand tous les lycées semblent s’accorder à donner d’excellentes notes ?

G. P : Il y a effectivement une dérive des notations des lycées vers le haut pour ne pas pénaliser leurs élèves. Il est donc plus que jamais nécessaire de conserver des épreuves écrites des concours. Pour autant nous connaissons également la valeur des lycées et où se trouvent les bons élèves. Je préfère d’ailleurs parfois recruter un élève pas forcément excellent au lycée mais qui peut se révéler en classe préparatoire, parce qu’il a de la marge d’implication au travail.

O. R : La formation continue fait aussi partie de vos points forts !

G. P : Nous avons vécu des années difficiles avec le Covid mais l’activité formation continue représente de nouveau aujourd’hui un quart de notre budget, trois millions sur douze, avec des points forts historiques dans la chimie et les procédés mais aussi aujourd’hui les sciences du numérique.

O. R : CPE Lyon est une école indépendante. Quelle est la structure de gouvernance ?

G. P : Nous avons trois fondateurs : la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon Métropole (CCILM), la Fondation pour l’Université de Lyon (maintenant Fondation Innovations et Transitions) et l’Université Catholique de Lyon (UCLy). Nous sommes également associés par décret national à l’Université Claude Bernard Lyon1, et par convention partenariale à la COMUE de Lyon.

 

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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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