Sciences Po a inauguré son nouveau campus « 1 Saint-Thomas » le 28 janvier 2022
Après des confinements qui ont mis en avant leur pouvoir d’attraction auprès des étudiants, 2022 est placée sous le signe des nouveaux campus. Inaugurés, comme celui de l’EM Normandie à Paris la semaine dernière ou de Sciences Po le 28 janvier, en construction, en projet, les bâtiments sortent de terre ou s’apprêtent à le faire. L’enseignement supérieur profite ainsi d’un environnement financier particulièrement favorable, avec des taux d’intérêt très bas qui permettent de financer les projets. A tel point que la surchauffe guette et que les coûts explosent, sans parler d’une pénurie générale de main d’œuvre et de matériels de construction qui génère de nombreux retards.
Construire un campus, un exercice qui est de plus en plus complexe selon Alain Goudey, le directeur de la transformation numérique de Neoma, qui intervenait lors d’un colloque organisé par HEAdway Advisory sur la question du « Campus innovant » : « Nous avons engagé nos transformations numérique et architecturale en même temps. Il s’agit pour nous de créer des complémentarité entre la pédagogie, la recherche et les entreprises. Le campus idéal doit permettre ces rencontres et s’adapter à l’objectif qu’il porte (travail de petit groupe, événement chercheur…). D’où un travail important sur le confort acoustique qui permet une meilleure concentration ».
La ruée sur Paris. L’Ile-de-France est particulièrement dynamique en matière d’immobilier universitaire. Elle attire en effet les étudiants internationaux tout en permettant aux étudiants français en apprentissage de suivre plus facilement leur cursus à proximité d’entreprises très largement installées dans la région. EM Normandie vient ainsi de s’installer dans ses nouveaux locaux de Clichy aux portes de Paris. Toujours aux portes de Paris c’est à Suresnes que Skema s’est implantée il y a maintenant un an. Dans les deux cas ce sont près de 15 000 m2 de locaux qui reçoivent les étudiants, Skema construisant en plus la même superficie de logements pour créer un véritable campus.
De son côté le groupe OMNES Education va installer à la rentrée 2022 trois de ses écoles – ESCE, HEIP et l’IFG Executive Education -, à La Défense sur 13 500 m². L’immeuble Cœur 2 Défense y accueillera 3 500 élèves avec des espaces de travail « connectés, modulables et conviviaux ». Quant à PSB, elle rejoindra un nouveau campus à la rentrée 2024 avec les autres écoles du groupe Galiléo. « Installé au cœur du quartier étudiant historique de Paris, rue Claude-Bernard dans les locaux qui étaient occupés par Agro ParisTech, ce campus de 20 000m2 sera conçu comme une véritable plateforme d’hybridation et de créativité. Nous y occuperons environs un tiers des locaux », explique le directeur de PSB, Philippe Jamet.
Et c’est loin d’être fini : dans les années à venir Paris va encore accueillir les nouveaux campus de Grenoble EM (à Pantin), Audencia (dans le Grand Paris), TBS Education et peut-être BSB. En 2021 ce sont déjà Neoma, Rennes SB et l’EDC qui ont inauguré de nouveaux locaux alors que ESCP s’apprête à rénover les siens.
Les écoles d’ingénieurs ne sont pas en reste. L’Ecole normale supérieure (ENS) l’avait délaissé pour se rendre à Saclay. Quelques mois après Aivancity c’est au tour, en février 2022, de l’EPF d’inaugurer ses nouveaux locaux sur un campus de près de 18 000 m² pouvant accueillir à terme 1600 élèves. « L’environnement offrira les atouts d’un pôle d’enseignement supérieur de dimension internationale avec les logements et la restauration du Crous, une vie associative en liens avec d’autres écoles (ESTP, AIVANCITY, ECAM-EPMI, ESITC Paris, IUT de CACHAN, lycées) », commente le directeur général de l’EPF, Jean-Michel Nicolle, qui insiste sur le caractère « résolument disruptif d’un campus qui place la technologie au cœur du bâtiment, a été conçu pour faciliter la large diffusion des nouvelles pratiques pédagogiques et assurer une forte interaction entre la formation et la recherche ». Il permettra aussi l’accueil d’entreprises et disposera d’un incubateur de 3 000m².
CentraleSupélec va ouvrir un « campus urbain d’exception » à Paris dans les années à venir dans un très bel hôtel particulier, le Campus Scipion. Et c’est tout près de Paris, à Saint-Quentin-en-Yvelines, que l’École supérieure d’agriculture d’Angers (Esa) va installer à la rentrée son premier campus hors d’Angers, tout près d’Agro ParisTech qui s’installe elle-même sur le campus de Paris-Saclay. « D’ici 2024, au moins 300 étudiants y seront formés avec les trois premières années de l’école d’ingénieur en Agronomie et le Bachelor Agroécologie et systèmes alimentaires », détaille le directeur de l’ESA, René Siret.
Comment maîtriser les coûts ? Dans ce contexte très porteur, il est de plus en plus difficile de maîtriser les coûts en Ile-de-France. Si la directrice de Neoma, Delphine Manceau pouvait se féliciter de n’avoir « eu aucun dépassement de coût, ce qui est semble-t-il assez exceptionnel » lors de l’inauguration de son nouveau bâtiment dans le 13ème arrondissement de Paris à l’automne 2021, c’est une exception que ne vient pas confirmer une règle. Dans un Grand Paris en plein boom immobilier, dans l’attente des jeux Olympiques de 2024, les coûts ont tendance à exploser. Témoin le président de Dauphine-PSL, El Mouhoub Moudhoud, apprenant, quelques jours avant son élection en tant que président, un surcoût budgétaire de dizaines de millions d’euros : « A mon arrivée à la présidence de l’université ce fut même ma première tâche de combler ce surcoût de 40 millions d’euros. Paris Dauphine – PSL a finalement contribué à hauteur de 20% des sommes en jeu et l’Etat a apporté les 80% restant, comme pour tout le projet ».
Mêmes soucis de dépassements de coûts pour l’Espci, qui construit quasiment tout un pâté de maisons au cœur de Paris dont un tout nouveau bâtiment destiné à la recherche. L’école planifie maintenant la phase 2 de la construction avec une ambition un peu moindre (mais une surface qui reste augmentée) pour réduire les coûts. « Au final, nous aurons réalisé un chantier emblématique avec des retards qu’on peut finalement entièrement imputer au Covid. Et cela alors que nous respectons des normes très strictes – notamment de nuisances sonores – de par notre situation dans le 5ème arrondissement de Paris, de l’autre de la nécessité de ne faire que très peu de vibrations pour que les chercheurs puissent valider leurs travaux », commente son directeur, Vincent Croquette.
En régions aussi. Il n’y a pas que dans le Grand Paris que les investissements s’emballent. TBS Education s’apprête ainsi à faire 130 millions d’euros d’investissements dans l’immobilier dans les cinq ans à venir pour renouveler l’ensemble de son parc immobilier. Le nouveau vaisseau amiral de Toulouse devrait ainsi ouvrir ses portes en 2026. « Ce campus, véritable marqueur de territoire, se devait d’être très différenciant, rapidement identifiable. C’est le cas avec le projet porté par Fontès Architecture-Tourre Sanchis. Au-delà du design proposé, l’utilisation de matériaux locaux, en circuits courts, a fait la différence. Le jury a retenu un projet fort », établit André Deljarry, le président de TBS Education. A Paris de nouveaux locaux devraient être quant à eux inaugurés dès 2024 sans qu’une implantation précise ait encore été révélée. Dès juin 2022 l’école s’installera à Barcelone dans de nouveaux locaux au sein de l’ex-quartier industriel de Poblenou. Enfin un nouveau campus sera également ouvert à Casablanca.
Les écoles d’ingénieurs ne sont pas en reste. L’Esilv ouvre ainsi ses portes pour la première fois un campus en régions, à Nantes, en 2022. « Il sera en tous points identique à celui proposé actuellement Paris. D’ici 2024 tout le cursus licence y sera dispensé dans un bâtiment de 1500 m2 situé sur le pôle technologique de La Chantrerie à proximité de plusieurs autres écoles d’ingénieurs dans un environnement propice au développement d’une nouvelle école d’ingénieurs », détaille son directeur, Pascal Pinot. Après s’être installée à Bordeaux, l’Estaca débute quant à elle dès mars prochain les travaux d’extension de son campus de Laval.
emlyon a quant à elle lancé en octobre 2021 la construction de son nouveau campus au cœur de Lyon. Depuis les premiers plans, le projet a évolué, avec notamment l’installation de la bibliothèque à l’entrée du bâtiment pour en faire la vitrine de l’école. « Ce campus est d’abord un lieu propice à la production de connaissances partagées, de compétences hybrides, à l’innovation durable, au dynamisme des rencontres. Il connecte les différentes parties prenantes de l’école, qu’elles soient internes ou externes », relève la présidente du directoire et directrice générale de l’école, Isabelle Huault. Inauguré en 2023, ce nouveau campus sera aussi en lien avec les institutions d’enseignement supérieur qui se trouvent à proximité, comme l’Ecole Normale Supérieure de Lyon, Sciences Po Lyon et les universités. « emlyon sera ainsi au cœur d’un écosystème académique extrêmement dynamique dans le 7ème arrondissement, un quartier en pleine mutation. Vecteur de rayonnement, le campus jouera un rôle clé dans l’accueil d’étudiantes et d’étudiants de qualité, d’enseignants-chercheurs du meilleur niveau, issus du monde entier », promet la directrice.
Un intérêt politique. Dans beaucoup de villes, l’accueil d’écoles et d’universités est également un objectif politique. Dijon, Laval, Orléans, la liste des villes qui favorisent financièrement la venue d’établissements d’enseignement supérieur, notamment en leur mettant à disposition des locaux, est longue. Orléans Métropole avait ainsi lancé fin 2017 un appel à manifestation d’intérêt dans l’objectif « d’intéresser et d’accueillir de nouveaux établissements d’enseignement supérieur sur son territoire ». En compagnie de l’ESTP et d’Agro ParisTech, l’ISC a répondu à l’appel et y a implanté à la rentrée 2019 des bachelors.
Présentant le nouveau campus qu’il va ouvrir à Tours en 2024, Bruno Neil, le directeur général d’Excelia se réjouit quant à lui de son « installation dans le quartier en plein essor des 2 Lions et sa cohérence avec la stratégie du groupe Excelia de s’impliquer dans les dynamiques des territoires où il s’implante ». Après avoir racheté l’Escem en 2021, c’est sur une surface de 5300 m2 que s’étendra le nouveau campus. Il sera doté d’un amphithéâtre de 200 places, d’espaces de coworking et de salles de cours connectées et en comodalité.
De nouveaux usages. Tous ces campus sont loin de ressembler à leurs ainés. Ultra-connectés ils privilégient le travail en petits groupes, les rencontres informelles tout en permettant l’usage de l’enseignement à distance dans un environnement qui reste marqué par l’impact de la pandémie comme le note El Mouhoub Mouhoud : « Il nous a fallu repenser certains aspects incrémentaux du projet pour tenir compte des effets et de l’expérience de la crise sanitaire. Pas seulement en termes techniques mais aussi pédagogiques avec une vice-présidente nommée en charge du projet. Nos salles sont déjà équipées pour permettre un enseignement hybride, présentiel et distanciel mais le campus deviendra encore davantage performant au plan numérique ».
Architecte d’une des réalisations architecturales les plus emblématiques des dernières année, le campus de Lisbonne de la Nova School of Business, Vítor Carvalho Araújo insiste quant à lui sur la « nécessité de transparence » : « Les étudiants doivent pouvoir travailler ensemble dans de petits groupes de travail dans une ambiance transparente, à la fois physique et sociologique. Un campus idéal c’est tout simplement un campus sur lequel les étudiants sont contents de venir ». Pour bénéficier d’un espace idéal, il a construit des amphithéâtres dont la plupart – il y en a en tout 25 pour les 3 500 étudiant – ne dépassent pas les 80 places. « Nous nous sommes inspirés d’un prototype pensé à la Harvard Business School School. Les amphis de petite taille permettent de créer une classe multidirectionnelle. Des petits groupes peuvent se former de manière informelle ».
Une transparence, une ouverture que revendique également Isabelle Huault : « Nous voulons faire de notre nouveau campus un lieu ouvert, c’est-à-dire respectant bien sûr les normes en matière de sécurité, tout en étant un lieu convivial, de rencontres, de riches interactions, de confluences et d’hybridation des talents et des métiers, avec les entreprises, les associations, les partenaires académiques. Toutes celles et ceux intéressés par nos activités – incubateur, accélérateur, maker’slab, conférences scientifiques…– seront les bienvenus ».
Faire vivre les espaces. « Je vous promets le campus le plus innovant de France », assurait Tawhid Chtioui, président d’Aivancity, School for Technology Business en présentant son campus à Cachan. 4500 m² qui sont l’incarnation du campus intelligent : tableau collaboratif multi-écrans SmartBoard dans toutes les salles, espace modulable, lumière auto adaptable en fonction de la luminosité extérieure, accueil réalisé par le robot Pepper.
Dans un contexte forcément évolutif, la modularité des espaces doit être privilégiée. « La salle de classe sera de plus en plus un espace d’apprentissage en mode projet ou de prototypage. Notre campus sera tout sauf figé avec un space planning très évolutif. Et nous voulons également qu’il constitue un continuum avec la ville, un trait d’union vers la cité », établit le directeur général de l’EM Normandie, Elian Pilvin, qui vient d’ouvrir les portes de son nouveau campus parisien et en a déjà ouvert un autre au Havre en 2021. Après avoir lancé un appel à expérimentations (AAE) pour « équiper, déployer et expérimenter des solutions numériques innovantes », l’EM Normandie et le pôle de compétitivité Pôle TES ont justement sélectionné 6 projets innovants pour concevoir le « campus du futur ». Cette évolution du « Smart Campus se doit d’être un « bâtiment intelligent, piloté au moyen des nouvelles technologies et objets connectés assurant une expérience de vie dans le bâtiment plus sûre, modulaire, flexible prenant en compte les exigences de développement durable en termes énergétiques et sanitaires ».
Construire des campus adaptatifs. « On ne peut pas imaginer tous les usages au quotidien d’un campus dès le début. Il faut que les personnes puissent s’engager en s’appropriant l’espace. Il faut assurer une flexibilité pour faire évoluer les espaces. Une flexibilité qui va plus loin que la modularité. Cela va beaucoup plus loin , signifie ainsi le fondateur du De Vinci Innovation Center (DVIC), Clément Duhart, Y compris en prévoyant une dotation financière pour que les étudiants fassent évoluer le lieu ». Pour monter son espace d’innovation au sein du Pôle Léonard de Vinci, Clément Duhart s’est inspiré du Media Lab du MIT (Massachusetts Institute of Technology) dans lequel il a longtemps travaillé. Son conseil très pragmatique à ceux qui veulent ouvrir aujourd’hui un campus : « Faire passer les câbles dans les plafonds pour permettre des recompositions rapides des espaces ». Mais aussi recréer ce qu’on appelle souvent « l’effet cafétéria » : « La zone café ne doit pas être dans une zone conviviale, où on peut s’asseoir, mais dans une zone de travail où on peut se rencontrer et travailler ensuite en buvant son café », surprend Clément Duhart qui a également fait installer un billard sur « lequel personne ne joue mais autour duquel on travaille .
Ces nouveaux campus sont également des lieux de vie dans lesquels les interactions peuvent se multiplier. Depuis la rentrée universitaire 2021, l’Université Grenoble Alpes (UGA) propose ainsi à ses étudiants de profiter d’un nouveau tiers-lieu : l’espace Parenthèse(s). Que ce soit dans le jardin, la « cuisine », le salon ou encore dans la zone « ensemble », les étudiants peuvent travailler individuellement ou en groupe, lire la presse, et s’accorder une parenthèse « ressourçante » dans un cadre confortable et avec du mobilier adapté : des coussins ou encore un hamac. Ils y trouvent également matière à échanger au sein d’une petite agora créée pour le partage d’idées. Tous les espaces sont ainsi exploités. « Les toits sont également très utiles. Il faut les végétaliser, y installer des panneaux solaires et des espaces pédagogiques », insiste Olivier Tribondeau, responsable de la filière ferroviaire à l’Estaca, lors du colloque organisé par HEAdway Advisory.
Hybrider les compétences. Ces nouveaux campus doivent également produire une hybridation des compétences. En passant d’un campus de de 12 à 18 hectares et 65 000 m2 de bâtiments à exactement la même surface mais construits sur seulement trois hectares, le nouveau bâtiment de l’ENS Paris-Saclay permet ainsi à la fois d’imbriquer les espaces de recherche et de formation et les liens entre les départements d’enseignement et les unités de recherche ont ainsi pu être réorganisées. « Nous avons demandé aux différentes entités comment elles voulaient se situer les unes par rapport aux autres dans le bâtiment. Quand on a projeté ces réponses cela nous a conduit à une réorganisation dans laquelle toutes les disciplines sont proches les unes des autres et se fédèrent par notre grand atrium. L’organisation spatiale qui en découle permet de faire exploser les silos disciplinaires », confie son directeur, Pierre-Paul Zalio.
Inauguré en 2019 à Aubervilliers le Campus Condorcet a également été bâti pour rapprocher les équipes des chercheurs en SHS (sciences humaines et sociales) de l’ensemble des universités parisiennes. « Maintenant commencent à émerger des projets qui impliquent plusieurs équipes réunies sur le campus, souligne ainsi son président, Jean-François Balaudé. Nous avons confiance dans les effets induits progressivement par ces rapprochements, qu’ils soient programmés ou imprévisibles. Quand un géographe échange avec un historien, un politiste, un américaniste, etc., ces voisinages et ces échanges conduisent à des perspectives de nouvelles recherches communes, et créent les meilleures conditions heuristiques et de sérendipité. Appuyées également par des appels à projets incitatifs, la pluri- et l’interdisciplinarité se développent par effet boule de neige ».
Ce rapprochement des compétences est plus qu’une nécessité aujourd’hui avec une transition écologique qui repose sur l’interdisciplinarité. « Le campus idéal doit permettre de croiser les enseignements entre des étudiants de disciplines très différentes », souligne Olivier Tribondeau : « Les locaux doivent traduire le fait que l’innovation est la bienvenue en mettant à disposition des espaces qui permettent de sortir du cadre ».
Connectés au monde entier. Le Covid en a souligné la nécessité mais les campus, notamment ceux des business schools, avaient déjà bien pris le pli de la diffusion des cours dans le monde entier. « C’était une évidence pour Nova, qui possède des implantations en Angola, en Afrique du Sud comme au Brésil, chaque classe devait être un studio », reprend l’architecte portugais.
Également très internationale, Rennes SB développe des salles de cours qui deviennent de vrais plateaux de diffusion avec tout ce que cela signifie en termes de qualité sonore ou de lumière. « Des caméras suivent le professeur, d’autres se déplacent pour filmer ceux qui posent des questions. On entre dans un autre univers, celui du théâtre, de la télévision, du spectacle. Et ensuite l’étudiant peut choisir l’angle qu’il préfère », assure le directeur de l’école, Thomas Froehlicher, enthousiaste : « Que d’opportunités s’ouvrent quand il devient possible de travailler avec des professeurs qui peuvent rester à 10 000 km de leurs étudiants tout en délivrant d’excellents cours. Le tout est de se réveiller à des heures inhabituelles si on veut suivre les cours en synchrone. Et pour le professeur de ne pas oublier qu’il ne délivre pas son cours qu’aux étudiants qui sont en face de lui. En quelque sorte nous créons un « global campus ». »
A Tours le nouveau campus d’Excelia sera lui aussi élaboré selon le principe des « smart campus » avec une approche « totalement phygitale ». Un budget d’environ 2 M€ sera en effet mobilisé pour doter le campus d’équipements audio/vidéo, d’infrastructures informatiques et de mobilier adapté aux espaces d’apprentissage et de vie étudiante.
Conformes aux normes environnementales. Alors que les étudiants sont particulièrement mobilisés autour de la transition environnementale, le Plan France Relance 2020-2022 apporte des fonds pour rénover les campus et améliorer leurs performances environnementales et énergétiques. L’Université Côté d’Azur va ainsi pouvoir mettre en en place des équipements photovoltaïques, des bornes de recharges pour véhicules électriques, des panneaux solaires installés en toitures et surtout une solution hydrogène qui permettra d’améliorer l’autoconsommation du site en stockant les surplus d’électricité solaire sous forme d’hydrogène. « Université Côte d’Azur sera la première université dotée d’un démonstrateur complet de la chaîne hydrogène. Nous envisageons même d’utiliser cette filière énergétique pour alimenter un nouveau data-center et le rendre ainsi plus vertueux tout en sécurisant son alimentation », souligne Olivier Canin, le directeur du patrimoine de l’université.
C’est aussi avec les fonds de France Relance que l’Isae SupAero entame d’importants travaux de rénovation sur son campus toulousain de 19 hectares. Ils doivent à terme apporter un gain de consommation énergétique de 67% pour « rendre le campus plus durable et responsable » va par exemple permettre le changement des appareils de régulation (chauffage, électricité…), l’utilisation d’éclairages LED et la pose de VMC double flux. Les chaudières à gaz du site seront remplacées par des pompes à chaleur.
Même volonté d’être « exemplaire dans le domaine environnemental » sur le nouveau campus d’emlyon business school.« Notre campus sera connecté et durable, dans le respect des normes environnementales les plus exigeantes. Nous incitons aussi aux mobilités douces, aucun parking pour les voitures n’étant prévu », insiste ainsi Isabelle Huault. Un parc paysager de 9 000 m² permettra de réintégrer la nature et la biodiversité sur le site qui était jusqu’à présent une friche industrielle. La conception de l’immeuble est bioclimatique, permettant d’optimiser la consommation énergétique du bâtiment. Le bâtiment vise les certifications HQE Excellent et BREEAM Very Good.
De même les nouveaux bâtiments que va construire Excelia à Tours répondront aux exigences de la certification BEE (Bâtiment Energie Environnement) avec une architecture bioclimatique (ossature et menuiseries en bois, isolation paille). Elle intégrera plusieurs espaces végétalisés et arborés. Une dimension qui a été également particulièrement importante pour Nova comme l’indique Vítor Carvalho Araújo : « Comment donner l’exemple aux étudiants si on ne respecte pas toutes les normes ? Sur notre campus de neuf hectares aucune voiture n’est autorisée et les déplacements se font en trottinette ou navette électrique. C’est même une navette autonome qui relie la gare au campus ».
Et il n’y a pas que les bâtiments qui doivent être irréprochable. Leur environnement aussi. L’UTT a ainsi planté 1300 arbres cette année sur une parcelle de 500 m2 au cœur de son campus, avec le concours d’Urban Forests, suivant la méthode Miyawaki. Cette méthode de « forêt urbaine participative » préconise de planter, sur un sol fortement amendé, et de façon très dense (3 arbres en moyenne par mètre carré), une grande diversité d’espèces locales, afin de « maximiser la biodiversité qui pourra s’y installer ». Il est ainsi possible d’obtenir en zone tempérée une forêt restaurée, dont le faciès et la structure ressemblent fortement à la forêt indigène, en 20 à 30 ans, soit 10 fois plus rapidement que dans une forêt classique. Une initiative qui pourrait être reproduite sur de nombreux campus.
- Dans le monde entier. Cette volonté de construire de nouveaux bâtiments est un mouvement mondial dans les business schools comme le souligne le site Find MBA dans son article Business Schools are Building Ever More Luxurious Facilities où il explique que « les demandes croissantes des étudiants en MBA nécessitent de nouveaux campus qui mettent l’accent sur la durabilité, la collaboration et la numérisation ». En septembre 2021, IE Business School à Madrid a par exemple inauguré la IE Tower, son nouveau siège vertical, technologique et durable au nord de Madrid. À 180 mètres de haut, avec 35 étages couvrant 50 000 mètres carrés et 7 000 mètres carrés d’espaces verts, IE Tower a une capacité de 6 000 étudiants.
Bravo pour cet article intéressant qui montre bien le dynamisme du marché de l’immobilier d’enseignement. Trouver un campus adapté, performant et bien localisé est souvent un véritable défi pour les établissements mais aussi un excellent levier d’attractivité.