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Les nouveaux défis de « l’expérience étudiante »

Un étudiant heureux est le meilleur ambassadeur de son école ou de son université. Et les établissements d’enseignement supérieur français ne sont pas toujours au niveau sur cette thématique. Même les plus réputés… « Notre campus offre un environnement d’apprentissage exceptionnel, mais il montre aujourd’hui les limites. Les structures de services aux étudiants ne sont pas au niveau attendu pour une business school de renommée internationale », notait ainsi Peter Todd en 2016, un an après son arrivée à la tête d’HEC.

Ce qu’en disent les étudiants interrogés par EducPros

Chaque année EducPros publie une passionnante étude sur l’opinion qu’ont les diplômés des écoles de management de leur école selon douze critères (satisfaction générale, cours et professeurs, vie associative, etc.). En 2018 ce sont les diplômés 2013 et 2016 qui ont été interrogés.

Alors que l’Essec qui crève tous les plafonds de satisfaction quel que soit le critère, les autre écoles qui sont au-dessus ou à la moyenne sont : Audencia, Edhec, Essca, Grenoble EM, HEC, Iéseg et Skema.

Les écoles qui sont un peu en dessous sur un à quatre des neuf principaux critères sont : BSB (sur deux critères d’un un sur des locaux qui viennent juste d’être rénovés), EM Normandie, EMLV (réseau des anciens peu développé dans cette jeune école), emlyon (sur les locaux uniquement), ESC Clermont, ESCP Europe, ICN (essentiellement pour les locaux mais l’école vient tout juste de déménager), Idrac, Istec (bien classée dans six critères), Kedge (sur l’encadrement, les « cours et professeurs » et la « préparation à la vie professionnelle »), Neoma (uniquement sur l’encadrement), Télécom EM (seuls les locaux et l’ouverture internationale pêchent) et Toulouse BS (pour l’encadrement et l’ouverture internationale).

Les écoles qui sont moins bonnes sur plus de moitié des critères sont : EBS (mais excellente sur l’ouverture internationale), EDC (avec un vrai problème de locaux qui atteignent péniblement les 3,1 sur 5, seuls le réseau des anciens et les relations entreprises dépassant la moyenne), EM Strasbourg (mais là aussi excellente sur l’ouverture internationale), ESC Pau (très sévèrement notée pour son réseau des anciens), ESC Troyes (qui ne dépasse la moyenne des écoles que pour ses locaux et est la plus sévèrement notée des écoles pour son réseau des anciens), ESCE, Esdes, ICD, Inseec (en dessous dans les neuf critères), Ipag, ISC (qui ne dépasse la moyenne que pour sa vie associative), ISG (qui n’a la moyenne que pour les « cours et professeurs »), La Rochelle BS, Montpellier BS (dont les locaux sont très en dessous de la moyenne de satisfaction), PSB et Rennes SB (seuls les locaux, l’ouverture internationale et la vie associative y emportent les suffrages)

L’Essec l’emporte haut la main au classement de la satisfaction étudiante opéré par Educpros

Les 1001 visages de « l’expérience étudiante »

La prochaine grande séquence d’investissement de l’Edhec sera consacrée à ce qu’on appelle « l’expérience étudiante ». Un sujet sur lequel l’école déjà créé une cellule dédiée en juin 2017 mais qui reste encore à définir. « Notre responsabilité c’est de partir de là où sont nos étudiants pour construire avec eux des parcours. Pas question pour nous de leur proposer de choisir tous leurs cours avec des rayons de supermarché ! Le digital nous permet d’individualiser les parcours en mesurant combien de temps tel ou tel étudiant passe sur son cours de comptabilité, s’il regarde ou pas des vidéos, etc. », explique son directeur, Emmanuel Métais. Ainsi l’école peut suivre individuellement chacun d’eux et leur envoyer les contenus spécifiques dont ils ont besoin. Chacun doit pouvoir atteindre un niveau minimum et progresser ensuite sur tel ou tel sujet.

A l’ESTP l’accent va de plus en plus être mise sur les compétences au-delà des connaissances. « Dans les années à venir, nous voulons que chaque étudiant traite au moins un projet pendant six mois – aujourd’hui ils sont une centaine à le faire dans des promotions de 750 – en démultipliant le nombre de projets et en mettant en concurrence plusieurs équipes sur la résolution d’une même problématique », confie sa directrice, Florence Darmon. L’ESTP entend également favoriser le développement de partenariats avec des écoles de management (Essec, EDHEC, ESCP Europe, l’IAE Paris, l’ESC Troyes, etc. sont déjà ses partenaires), d’architecture ou encore des universités étrangères : « Le développement de l’esprit inventif de nos étudiants est au centre de nos attentions ».

La qualité des services. Parce que le bien-être de ses étudiants est, plus que jamais, une priorité pour son directeur, Stéphan Bourcieu, Burgundy SB vient d’étendre et de rénover son campus et d’y créer de nouveaux espaces pour ses étudiants : « Les étudiants doivent vivre dans un environnement stimulant qui corresponde à leurs valeurs. Les choses ont changé. On peut très bien travailler allongé dans un fauteuil Fatboy. Il faut sortir du seul schéma classique de l’étudiant assis devant sa table. Aujourd’hui nos étudiants veulent être dans un univers où, quel que soit son profil, il est bon de s’exprimer et de se socialiser ».

Une expérience présentielle qu’entend également améliorer l’Edhec en équipant toutes ses salles de cours de chaises Steelcase polyvalentes et de murs sur lesquels on peut écrire et projeter des informations. Le tout en conservant quelques amphis. « A Harvard on utilise tous les outils, du tableau à la craie au projecteur. Bientôt tous nos professeurs pourront facilement se filmer pendant leur cours », assure Emmanuel Métais qui s’interroge : « Le modèle économique de Coursera n’est pas stabilisé. Aujourd’hui Netflix produit de la musique, pourquoi Coursera ne rachèterait-il pas un jour un campus ? Ce qu’il nous restera ce sera notre expertise pour construire des parcours. »

Satisfaits… mais pas trop

Mais n’est-ce pas un peu dangereux de mettre la satisfaction des étudiants au cœur du projet ? « Satisfaction ne veut pas nécessairement dire faire plaisir ou tout céder. Et surtout cela n’est pas contraire à l’exigence. Un excellent professeur peut-il être détesté par ses étudiants ? Non. Parce que je crois justement que plus on est exigeant avec ses étudiants, plus on est apprécié. Le professeur démagogue qui pense qu’il faut faire ami/ami avec ses étudiants pour être bien évalué par eux, il se trompe. Comme celui qui laisse les étudiants entrer en cours avec 15 minutes de retard », répond Stéphan Bourcieu.

Parce qu’il faut d’abord former de futurs professionnels. « Dans l’entreprise traditionnelle il faut parfois porter des « charlotte » et respecter des horaires. C’est souvent ce problème d’adhésion à une vision collective qui conduit les jeunes à se lancer dans la création de start up. Alors comment développer le sens du collectif dans une institution d’enseignement supérieur ? C’est là qu’il faut s’interroger sur la réponse à donner aux étudiants. L’enjeu est de les préparer à ce monde collaboratif aux formes tellement diverses », note le délégué général de la Fnege (Fondation nationale pour l’enseignement de la gestion des entreprises), Maurice Thévenet.

Recruter des étudiants internationaux

La satisfaction des étudiants est d’autant plus un impératif qu’il s’agit de recruter des étudiants internationaux. BSB a tellement augmenté le nombre de ses étudiants étrangers qu’elle doit maintenant « passer de procédés artisanaux à des procédés industriels ». Une qualité de service qui a un coût. BSB a par exemple transformé le MSc Wine Business de sa School of Wine & Spirits Business en MBA, le prix passant à 22 000€ par an. « En même temps que nous nous alignons sur les tarifs de nos concurrents internationaux, nous pouvons aussi offrir plus de services. Certains étudiants ont plus de 30 ans, un conjoint, des enfants, et ne parlent bien souvent qu’anglais », commente Stéphan Bourcieu.

Si la France se classe toujours au 3ème ou au 4ème rang des destinations les plus attractives pour les étudiants internationaux elle n’en peine pas moins à attirer ceux qui s’attendent à une « qualité de service » équivalente à celle des États-Unis ou du Royaume-Uni. « Un master facturé 246 € n’est guère attractif pour un étudiant international qui a des attentes qui nous remettent en cause dans nos comportements en matière de service », note David Alis, président de l’Université Rennes 1. Des frais de scolarité plus importants pour les étudiants étrangers non communautaires ? Un sujet très sensible au sein des universités que pourrait justifier un service plus personnalisé offert aux étudiants étrangers.

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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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