ECOLES DE MANAGEMENT

Cour des Comptes : le rapport sur les écoles de management finalement assez positif

En s’appuyant sur son pré rapport Le Monde titrait « La Cour des Comptes épingle les écoles de commerce », France 2 traçait le 28 janvier un portrait peu amène des écoles de management, mais que lit-on aujourd’hui dans le rapport final de la Cour des Comptes intitulé « Les écoles supérieures de commerce et de gestion : un développement à réguler » ?

Un satisfecit global

Pour un rapport présumé très critique le moins qu’on puisse dire c’est qu’il commence par des compliments comme on aimerait en entendre plus souvent sur les entreprises françaises : « Dans un marché de la formation en gestion d’abord dominé par les institutions anglo-saxonnes, les écoles françaises ont réussi à occuper une position internationale enviable, qui s’est affirmée au cours des 20 dernières années », explique la Cour des Comptes avant d’insister : «  La performance internationale du modèle français des grandes écoles de commerce est confirmée par le classement 2012 du Financial Times des meilleurs masters in management dans le monde. Sur les cent premières formations de niveau master, les ESCG françaises comptent 19 écoles et trois dans les cinq premières ».

Mêmes louanges en matière d’insertion professionnelle : « Les diplômés des ESCG sont embauchés à la sortie de l’école en contrat à durée indéterminée pour plus de 80 %, à des salaires annuels moyens (bruts hors primes) de plus de 30 000 €. La situation est meilleure en termes de rémunération pour les étudiants sortis des ESCG que pour ceux sortis de l’université ou des écoles d’ingénieurs ».

Des écoles qui s’autofinancent de plus en plus

Les écoles de commerce et management réussissent très bien et se financent de plus en plus par elles-mêmes. La part des financements provenant des chambres de commerce et d’industrie a ainsi fortement décru (35 % il y a une dizaine d’années contre 11 % aujourd’hui) alors que la taxe d’apprentissage rapporte en moyenne aux écoles 10 % de leurs ressources et que les subventions publiques directes sont enégligeablese (3 % du budget en moyenne sur l’échantillon, mais avec de grandes disparités selon les écoles) et proviennent uniquement des collectivités locales. Corollaire de ce moindre investissement public, les frais de scolarité sont en forte hausse depuis 2006 : +71% à HEC, +49,4 % à ESCP Europe et 54 % pour l’ESSEC, note la Cour, relevant également que l’augmentation a été « généralement nettement moins forte dans les écoles de province (7,4 % selon les parcours entre 2008 et 2010 pour l’EM Normandie, 16 % pour l’ESC de Toulouse depuis 2005).

Au total, les droits de scolarité représentent en moyenne 58 % des ressources des écoles, avec parfois des différences importants : plus de 70 % des ressources de Reims Management School (76,1 %) ou Rouen Business School (73 %), mais moins de 55 % pour ESCP Europe ou le groupe Sup de Co Montpellier et seulement 35 % pour HEC.

Attention à la faible mixité sociale

Tout en reconnaissant que » faible mixité sociale n’est pas un phénomène propre aux écoles de commerce et se retrouve dans les écoles d’ingénieurs issues du même système de classes préparatoires », la Cour des Comptes concentre ses critiques sur le manque de mixité sociale des écoles de management notant que « selon l’enquête annuelle de l’ACFCI, les élèves dont les parents sont cadres, ingénieurs, commerçants et chefs d’entreprise constituent, en 2011, 60 % de la totalité de la population des élèves des écoles ». Si elle admet que de nombreux dispositifs d’aide au financement des études ont été mis en place elle remarque qu’en moyenne, « 18 % des étudiants en première année du programme « Grande école » dans les ESCG bénéficient d’une bourse d’État, alors qu’à l’Université, plus d’un tiers des étudiants (37,5 %) sont aidés par des bourses ».

La Cour des Comptes recommande donc que « l’égalité d’accès des jeunes, quelle que soit leur origine sociale, à cette filière de formation doit être mieux assurée par les écoles et mieux garantie par l’État, dans un contexte de droits de scolarité de plus en plus élevés » et, pour cela de « s’assurer que la forte augmentation des droits de scolarité est compensée par des systèmes de bourses, de prêts ou d’apprentissage, qui permettent à chaque élève de suivre ces formations en fonction de ses mérites personnels, quels que soient ses revenus ou ceux de sa famille »

La question du statut

Si la question des accréditions est également abordée, c’est surtout celle des statuts qui est largement traitée par la Cour des Compte. Elle recommande même que soit engagée rapidement par l’État une « réflexion sur le statut juridique et financier applicable à ces écoles ». Elle fait ainsi remarquer que si « certaines écoles refusent une évolution de leur statut et se satisfont de la situation, comme celle de Grenoble », d’autres (elle cite Amiens, Angers, Lyon, Reims et Rouen) ont, « avec l’accord de leur CCI, adopté un statut d’association ».

Pour autant, dit encore la Cour dans son rapport « le statut d’association sans but lucratif ne parait pas le plus adapté pour des organismes qui, de facto, développent une activité de nature commerciale sur le marché de la formation internationale et nationale ». Et de constater que « avec une certaine logique, HEC envisage d’adopter le statut de société anonyme (SA) » tout en estimant que « le statut d’établissement public, autorisant une tutelle minimale de l’État sur les comptes et la stratégie des écoles, pourrait se révéler justifié ».

Le verre à moitié vide

Au total le rapport de la Cour des Comptes pointe que si la stratégie a été « couronnée de succès pour les plus prestigieuses et les plus riches écoles de commerce dont la notoriété internationale s’est considérablement accrue (…) d’autres écoles se trouvent toujours à la croisée des chemins : l’acquisition d’une taille critique et la définition d’une stratégie de développement adaptée à leurs moyens ».

Si on parlait de constructeurs automobiles allemands, des succès de BMW et de Volkswagen tout en remarquant qu’Opel ne va pas si bien, on se féliciterait d’un pays dont la réussite globale est si manifeste. Mais nous sommes en France et on se dépêche surtout d’épingler les problèmes, certes non négligeables, d’un système en pleine expansion qui traverse une crise de maturité bien naturelle.

Olivier Rollot (@O_Rollot)

  •  À lire également « Écoles de commerce : la Cour des Comptes confirme sa demande de régulation » sur Educpros
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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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