ECOLES DE MANAGEMENT

« La gouvernance d’Audencia attend que je ramène de la sérénité »

Directeur général adjoint d’Audencia pendant 8 ans, Christophe Germain a été nommé directeur général d’Audencia BS en avril dernier. Un poste qu’il connaît bien pour en avoir assuré l’intérim en 2016. Depuis, il s’était largement consacré à la création d’une des antennes chinoises d’Audencia : la SABS (Shenzhen Audencia business school). Mais que va-t-il faire maintenant à Nantes ?

Olivier Rollot : Après avoir assuré l’intérim de la direction d’Audencia BS en 2016, vous voilà à sa tête. Quel est votre carnet de route ?

Christophe Germain : La gouvernance d’Audencia attend d’abord que je ramène de la sérénité dans une période de changement. L’intérim que j’ai assuré en 2016 m’a permis de bien maîtriser les dossiers. Nous allons maintenant faire le point à mi-parcours de notre plan stratégique pour identifier les domaines sur lesquels nous devons nous concentrer. La feuille de route n’est pas encore totalement finalisée mais elle intègrera par exemple le développement d’autres campus à l’international après le succès de la SABS. Nous voulons également développer nos réalisations dans le cadre de l’Alliance qui nous lie à Centrale Nantes et à l’Ecole d’architecture. Enfin, nous avons de très importants chantiers immobiliers en cours pour accompagner notre croissance.

 O. : Après votre intérim à la tête de l’école, vous avez été chargé de développer la SABS (Shenzhen Audencia Business School) en Chine de concert avec l’université de Shenzhen. En à peine un an, vous y avez créé une nouvelle business school. Que gardez-vous de cette expérience ?

C. G : Créer en 2017 la SABS a été une merveilleuse expérience. J’y ai beaucoup appris sur une culture très différente. Même s’il faut savoir s’adapter à l’administration chinoise, les champs des possibles y sont très larges. Le tout est de savoir remettre en cause ses certitudes en gardant en tête que le mot qui caractérise le mieux le travail là-bas est « flexibilité ». Une réunion peut déboucher sur un compte rendu de décisions très précis et le lendemain tout a changé.

Il faut à la fois être philosophe et prendre les choses telles qu’elles se présentent sans les subir pour autant. Il faut être acteur tout en étant souple en admettant qu’on n’a pas la même influence sur les décisions qu’en France. Ce qui n’empêche pas d’avancer très vite à condition d’être très disponible, d’être prêt tout le temps, de ne pas être rigide afin de s’adapter constamment.

La SABS restera capitale pour moi car j’ai un engagement moral vis-à-vis des équipes là-bas. Je me suis engagé sur le moyen et long terme et j’y retournerai périodiquement.

O. R : La politique chinoise en matière d’enseignement supérieur évolue vite. Quelle analyse en faites-vous ?

C. G : A partir des années 80 et des réformes impulsées par Deng Xiaoping, la Chine a encouragé les étudiants chinois à partir à l’étranger. Et beaucoup ne sont pas revenus. Aujourd’hui, la Chine possède d’excellentes institutions et les étudiants qui partent préfèrent de plus en plus revenir en Chine au vu des formidables opportunités qui leur sont offertes. Plus largement, le gouvernement chinois ne veut plus se laisser « piller » ses meilleurs étudiants et les règles se durcissent pour les établissements étrangers qui veulent s’installer en Chine.

Nous fonctionnons d’autant plus en confiance avec l’université de Shenzhen que la France est le seul pays à avoir signé un accord dit des « 1000 stagiaires » avec le gouvernement chinois.

O. R : Une sorte de « taille critique » semble être nécessaire pour développer les écoles de management. Où en êtes-vous de votre développement ?

C. G : Nous approcherons les 50 millions de chiffre d’affaires en 2018 avec l’objectif de parvenir à 55 M€ en 2020. Nous sommes dans les temps ! Notre formation continue progresse – +30% en 1 an pour atteindre les 5 M€ – avec des activités aussi bien en France qu’en Algérie et en Chine. Pour aller plus loin, nous avions également prévu le rachat d’un opérateur externe et cela reste au programme. L’apprentissage qui était jusqu’à maintenant peu proposé aux étudiants de nos différents programmes de formation va pouvoir être développé grâce au soutien de la Région.

Si le développement de notre périmètre est important, ce n’est en revanche pas forcément une voie exclusive. Nous devons être de nouveau innovants alors que nous sommes talonnés de près par d’autres écoles en ce qui concerne la RSE (responsabilité sociale des entreprises), l’hybridation ou les doubles compétences. Il faut nous renouveler sans renier nos points forts.

O. R : Qu’amène le statut d’EESC (établissement d’enseignement supérieur consulaire) qu’Audencia a adopté début 2018 ?

C. G : Il nous permet de mieux réaliser un projet ambitieux. Nous avons notamment obtenu la propriété de nos bâtiments – remis aux normes ! – et nous pouvons ainsi développer nos campus de Nantes, de Paris et Shenzhen.

O. R : Deux campus à Nantes dont un dédié à votre école de communication, Audencia SciencesCom. Le groupe Audencia n’est pas entièrement focalisé sur le management et cela le différencie de beaucoup d’autres. D’autres types d’écoles pourraient vous rejoindre ?

C. G : Quand nous pensons hybridation des compétences pour aller au-delà des champs du management, nous pensons d’abord au développement de partenariats. Nous lançons par exemple quatre nouveaux doubles diplômes : dans la finance avec l’ISFA Lyon, en sciences politiques avec Sciences Po Rennes, en droit avec l’Institut du droit d’Aix et en ingénierie avec l’Institut français du pétrole. Il s’agit de créer des « collèges virtuels » comprenant des savoir-faire qui donnent une vraie valeur ajoutée à nos étudiants.

Nous préférons ces accords à des rapprochements / fusions compliqués. En développant des projets de cette sorte, on avance plus vite.

O. R : Être à Nantes, l’une des villes les plus populaires de France, est un sacré atout ! Notamment pour attirer les étudiants issus de classes préparatoires…

C. G : Oui, la ville de Nantes est très attractive. Par ailleurs, son orientation vers la culture résonne parfaitement avec les fondamentaux de l’empreinte de l’Ecole qui accorde une large place à ce champ, ainsi qu’aux humanités, ce à quoi les étudiants de classes préparatoires sont sensibles.

O. R : A ce propos, pourriez-vous faire évoluer la façon dont sont organisés vos oraux ?

C. G : Nous n’avons pas l’intention de les changer pour l’instant.

O. R : Comment faites-vous évoluer le « continuum » classes prépas / Grande école ?

C. G : Nous sommes l’une des trois seules écoles qui ne reçoivent que des élèves de prépas en première année. Le projet développé au cours des années 90 par le directeur de l’époque, Aïssa Dermouche, était de mettre les classes préparatoires au cœur de notre stratégie et je reste fidèle à cette vision. D’ailleurs, Audencia a été l’une des toutes premières écoles à aller à la rencontre des prépas. Nous nous efforçons également de renforcer le dialogue entre nos différents intervenants.

Des éléments sont mis en place pour que le continuum soit de mieux en mieux assuré. Nous avons par exemple lancé cette année l’opération « Inside Audencia » afin de recevoir des élèves de première année de prépas et leur montrer la réalité d’une école. Ils ont été 37 cette année mais nous avions reçu beaucoup plus de demandes. Nous avons créé avec eux des capsules vidéo pour valoriser leur venue et montrer ce qu’ils ont appris alors qu’ils ne savent pas toujours  ce qui les attend après leur concours.

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Olivier Rollot est directeur du pôle Information & Data de HEADway Advisory depuis 2012. Il est rédacteur en chef de "l’Essentiel du Sup" (newsletter hebdomadaire), de "l’Essentiel Prépas" (webzine mensuel) et de "Espace Prépas". Ancien directeur de la rédaction de l’Etudiant, ancien rédacteur en chef du Monde Etudiant, Olivier Rollot est également l'un des experts français de la Génération Y à laquelle il a consacré un livre : "La Génération Y" (PUF, 2012).

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