Un campus intelligent est un projet stratégique pour toute école de management ou d’ingénieurs qui l’envisage : pour beaucoup, c’est à la fois la vitrine de la marque et l’un des principaux leviers de transformation de l’établissement.
N’est-il pas alors plus simple d’opter pour un campus neuf ? Est-ce la seule stratégie viable ? Quels sont les facteurs de choix à considérer ? Peut-on rendre « intelligent » un campus existant ?
Qu’il soit neuf ou ancien, les services intelligents induisent des dépenses et un ROI à prendre en considération dès l’origine du projet !
Tour d’horizon du sujet avec Mouchira LABIDI, Sophie HIRAT et Gregor MACIAK.
Quels sont les enjeux et objectifs d’un projet de campus, qu’il soit neuf ou ancien ?
La question du neuf ou de l’ancien se pose depuis de nombreuses années. Plusieurs considérations motivent ce questionnement :
- l’ambition affichée des écoles est d’augmenter très sensiblement leur nombre d’étudiants : qu’ils soient physiques ou virtuels, il faut « pousser les murs » le numérique permet de nouvelles formes de pédagogie qui « projettent » les apprenants dans des espaces diversifiés et modulaires pour co-construire, collaborer, bénéficier d’une pédagogie active, individualisée, en présentiel et en distanciel ; en réseau avec les partenaires de l’établissement à l’étranger et en local, le bâtiment doit pouvoir s’adapter,
- les flux de personnes s’en trouvent modifiés et, comme dans un aéroport, doivent être pris en compte pour une circulation à la fois fluide et sécurisée,
- les bâtiments anciens sont énergivores, leur vétusté entraîne une augmentation des coûts de maintenance et une dégradation du ressenti de la Customer eXperience,
- le monde, la pédagogie et la collaboration se digitalisent à un rythme permanent ; il est donc nécessaire de se hisser au niveau des standards internationaux et de rendre compatible le campus avec les usages présents et futurs.
La nécessité de faire « peau neuve » s’impose ainsi très vite. Plusieurs stratégies sont alors envisageables :
- ajouter de nouveaux bâtiments,
- rénover, améliorer l’existant,
- construire un campus neuf et déménager.
Quels sont les facteurs de choix à considérer ?
Les facteurs de choix numériques sont les suivants :
- Emplacement: le lieu choisi pour votre campus permet-il d’avoir accès aux autoroutes de fibre optique qui permettront sa connexion au reste du monde ? Est-il représentatif des valeurs de l’établissement ? Permettra-t-il son ancrage dans le territoire et son tissu économique ? Vous impose-t-il des contraintes architecturales ? (Voir pour cela l’article Penser les nouveaux services du campus intelligent).
- Student eXperience / Customer eXperience: le ressenti client influe directement sur l’expérience résiduelle et le sentiment d’appartenance. Il doit être le plus élevé possible tout en reflétant la culture et les valeurs de l’établissement (voir pour cela l’article Student eXperience et Campus Intelligent).
- Facility Management / services généraux : ils concernent toutes les actions qui contribuent au bon fonctionnement de l’établissement et jouent un rôle majeur dans le campus intelligent dans la mesure où leurs actions deviennent « prédictives » plutôt que « curatives ».
- Gestion technique patrimoniale : pierre angulaire du choix financier entre rénovation de l’existant et programme neuf, elle s’applique à optimiser la gestion technique des opérations de maintenance pour valoriser le patrimoine immobilier. Elle permet notamment d’établir une comparaison entre le coût de la rénovation, celui de la maintenance technique pluriannuelle du bâtiment (dont la consommation énergétique) et l’équivalent d’un programme neuf.
- Responsabilité sociétale des entreprises : elle permet de valoriser la performance de l’établissement au-delà des exigences réglementaires. Elle touche des domaines très variés comme le campus durable et responsable, le bien-être social et culturel des étudiants, notamment étrangers, ou encore l’accessibilité auditive pour tous (voir pour cela l’article Campus intelligent et accessibilité auditive).
Peut-on rendre « connecté » un campus existant en le rendant plus efficient, plus intelligent, sans obligatoirement opter pour du neuf ?
Clairement oui !
Le bâtiment intelligent est comme un être humain, il doit savoir écouter, apprendre de son passé, communiquer avec ses occupants et en prédire les besoins.
A ce titre, un campus existant dispose d’un historique d’usages. Il peut plus facilement devenir intelligent puisqu‘on connaît la « consommation » qu’en font les occupants au quotidien. Le bâtiment neuf, lui, devra « apprendre à marcher » sur plans, puis être en capacité de s’améliorer une fois en service.
Neuf ou ancien, le bâtiment intelligent doit également savoir s’adapter à ses occupants dont les besoins et habitudes sont multifactoriels. Certains sont présents dès 7 heures du matin, d’autres encore ne chauffent leur bureau qu’à 18°…
Pour ce faire, le campus fournit aux occupants des informations utiles pour eux en tant qu’individus uniques et reçoit, de leur part, des informations « chaudes » comme la mise à jour de leur agenda ou leur position réelle dans le bâtiment.
Ainsi, le campus consommera intelligemment son énergie et n’activera les services que sur les éléments nécessaires. Il tiendra également compte d’informations comme la position du soleil et ne chauffera pas les pièces exposées car il comprend que c’est inutile.
Comment le campus perçoit-il son environnement et les besoins de ses occupants ?
Pour écouter, il lui faut en premier lieu des oreilles et des yeux (capteurs IoT, caméras connectées, détecteurs de mouvements, sonomètres…). Ces derniers captent de nombreuses données comme la température, le taux de carbone, la luminosité ou encore, la concentration de particules d’une salle. Il lui faut ensuite un système nerveux pour transmettre les effets intelligents à des mains bien particulières puisqu’il s’agit de déclencheurs dont les fonctions sont d’activer physiquement les effets intelligents attendus.
Par exemple :
- augmenter la ventilation d’air « frais » dans un amphithéâtre pour éviter que le taux de carbone n’augmente,
- ne chauffer que les zones qui le nécessitent en tenant compte des préférences et du ressenti de chacun,
- opacifier ou occulter les vitres pour éviter la gêne induite par les rayons du soleil,
- améliorer la sécurité des personnes isolées,
- (…).
C’est autant une question de performances énergétiques que de confort !
Cela doit nécessiter des travaux considérables, non ?
Pas du tout, contrairement à la GTB (Gestion Thermique de Bâtiment), l’utilisation de capteurs IoT permet de déployer l’intelligence thermique sans pour autant tirer des câbles. Elle est donc moins coûteuse et particulièrement adaptée aux contraintes les plus exigeantes comme celles des bâtiments historiques.
Qu’en est-il du « cerveau intelligent » du campus ?
En premier lieu, il utilise les technologies de l’intelligence artificielle comme le Machine Learning.
En analysant les informations historisées, il en tire des enseignements additionnels pour améliorer la qualité de l’adaptation du bâtiment à ses occupants. Toute évolution est bien sûr, sécurisée et contrôlée via des solutions comme Leonardo® qui laissent à l’homme la responsabilité de déployer ou non ces évolutions.
En second lieu, il a recours à un système de gestion de bâtiments où sont considérés dans un système unique le chauffage, l’éclairage, la gestion des accès (…) qui consommeront les mêmes informations comme le planning d’occupation des salles, le nombre de personnes présentes, etc.
Ces usages techniques et numériques sont rendus possibles par les mêmes capteurs que ceux utilisés dans la conception des nouveaux services destinés aux occupants. Les investissements en sont donc rationalisés et le retour sur investissement maximisé, que l’on soit dans du neuf ou de l’ancien.
Est-ce vraiment efficace et rentable ?
Oui ! Un bâtiment intelligent qui « écoute » ses occupants permet de réaliser une économie d’énergie significative. Une telle solution déployée dans 140 établissements scolaires « anciens » de la région parisienne a permis une économie de 30 % et un retour sur investissement inférieur à un an.
Sur un bâtiment HQE dont la facture énergétique est moindre, le gain réalisé reste sensible et oscille, selon les usages, dans une fourchette de 20 à 30 %.
Pourquoi la logique de développement Business (au sens large) est-elle le critère clé de choix entre le neuf et l’ancien ?
Parce qu’il n’y a pas de freins technologiques au choix entre le neuf et l’ancien. Depuis des années, les opérateurs de bâtiments connectés agissant pour le compte du secteur tertiaire ou de l’industrie réalisent ces projets de neuf ou d’ancien rénové.
Les coûts de construction consultables sur certains sites (exemple ici) permettent d’avoir une assez bonne visibilité du budget « en dur » d’un campus neuf, coûts d’acquisition des terrains compris.
En revanche, ce qu’on oublie trop souvent, c’est le coût de digitalisation du campus et la mise en œuvre de son « intelligence » qui, selon l’ambition, peut aller de quelques dizaines d’euros au m2 à bien plus pour une expérience très haut de gamme qui évoluera régulièrement pour maintenir l’excellence de cette dernière.
Fort heureusement, la digitalisation induit son propre retour sur investissement :
- ROI direct : économies d’énergie, optimisation du taux d’occupation (effectifs au m2), optimisation des coûts de maintenance,
- ROI indirect : amélioration nette du ressenti des occupants, mise en œuvre des nouvelles formes de pédagogie, plus forte attractivité et meilleure image.
En conclusion, les critères de choix sont vraiment à aligner sur la logique de développement Business, la Student eXperience et les enjeux d’attractivité / performance.
Si vous souhaitez aller plus loin dans la réflexion, n’hésitez pas à contacter les équipes d’HEADway et d’Econocom.
contact.chroniquetech@econocom.com
Rédacteurs :
Sophie HIRAT et Gregor MACIAK
Biographie Mouchira Labidi.
Responsable offre Intelligence Artificielle chez Econocom.
Passionnée d’innovation, Mouchira a fait de l’Intelligence Artificielle son fer-de-lance professionnel. Elle a pour objectif d’être actrice de la révolution numérique et inspirer les femmes à rejoindre ce domaine passionnant.
Docteure en IA, elle a piloté, pendant 6 ans, des projets à forte valeur ajoutée inscrivant l’IA à leur cœur de métier au sein du groupe ENGIE. Smart building, smart networks et smart city : trois sujets abordés quotidiennement dans lesquels elle s’est épanouie avec de belles success stories.
Ses passions : intégrer les nouvelles technologies au sein des différents métiers, fédérer les collaborateurs autour d’un projet et mettre l’utilisateur au cœur de ses préoccupations.
Lorsqu’elle se perd dans ses pensées, c’est très souvent qu’elle imagine un monde meilleur associant technologie et intelligence humaine